• Agrippée au lavabo des toilettes, Meredith se mordit les lèvres pour s’empêcher de pleurer à nouveau. Maintenant, tu arrêtes ! s’ordonna-t-elle à mi-voix. Tu ne vas pas passer la soirée à pleurer dans ces toilettes. Reprends-toi ! Tu as un petit ami adorable alors, arrête de faire la petite fille capricieuse. Elle prit une grande inspiration avant d’arracher une feuille de papier destinée au séchage des mains qu’elle plia en quatre afin de frotter les quelques petites traces de mascara noir qui étaient éparpillées autour de ses yeux. Une chance que ce soit du waterproof, se dit-elle. Elle passa le bout de son index sous ses yeux pour tenter d’effacer les traces de crème teintée délavée par ses larmes. Dommage que je n’aie pas pris mon sac, regretta-t-elle. J’aurais pu me remaquiller

    La porte s’entrouvrit et Derek passa la tête dans l’entrebâillement. Bébé ? En voyant Meredith devant le miroir, il ouvrit la porte plus largement. Ça va ? Ça fait un moment que tu es là, alors je me demande si tout va bien.   

    Elle se tourna vers lui avec un air mortifié. Mon maquillage a coulé. Je ressemble à rien, je suis horrible.

    Derek pénétra dans la pièce en souriant. Voilà qui me semble très exagéré. Il prit le visage de sa petite amie entre les mains. Voyons ce qu’on pourrait faire… Il passa les pouces en-dessous de ses yeux pour unifier la couleur de sa peau. Comme ça… et comme ça. Voilà. C’est comme si rien ne s’était passé. Tu es magnifique. Comme toujours. 

    Faut le dire vite, grommela Meredith.

    Mais arrête ! Tu es très belle et ce n’est pas un peu de maquillage en plus ou en moins qui va y changer quoi que ce soit. Derek la prit par la main. On y retourne ? Ils doivent se demander ce qu’on fait.

    Meredith lui emboita le pas. Ils doivent surtout se demander ce qui t’est passé par la tête le jour où tu as décidé de te caser avec une fille comme moi.

    Il fronça légèrement les sourcils. Pourquoi tu dis ça ?

    Ben, la fille qui s’enfuit parce que son copain a dit quelque chose qui lui a pas plu... ils ont bien dû se marrer, présuma la jeune fille.

    Derek lui serra plus fortement la main. Je peux t’assurer que personne ne s’est moqué de toi. Au contraire. Randall était très embêté et tout le monde m’est tombé dessus à cause de ce que j’avais dit. Surtout Mark. Si ses yeux avaient été des revolvers, je serais mort à l’heure qu’il est. Meredith sourit. Ce cher Mark ! Il était toujours de son côté. Alors, tu ne dois pas avoir peur de les retrouver, poursuivit Derek. Ils sont 100% team Meredith. Arrivé devant l’entrée du chapiteau, il s’arrêta et se plaça devant son amie. Tout va bien se passer, bébé. C’est moi qui dois être gêné, pas toi, en aucun cas ! En réalité, il ne l’était absolument pas. Il était certain que ses amis ne lui tiendraient pas rigueur pour ce qu’il avait dit, parce qu’ils savaient qu’il s’était mal exprimé tout simplement et parce qu’ils comprenaient parfaitement son dégoût du mariage, car ils connaissaient tous son histoire familiale. Toutefois, il était très embêté d’avoir blessé Meredith, en public qui plus est, ce qui l’avait fait se sentir humiliée, alors que ce n’était nullement son intention. Il aurait donné tout ce qu’il avait pour pouvoir revenir en arrière et dire les choses autrement, tant il détestait lui faire de la peine. La reprenant par la main, il l’entraina sous la tente et la guida jusqu’à leur table, en priant intérieurement pour qu’aucun de ses amis ne commette une nouvelle gaffe. 

    Aaaah les voilà ! s’écrièrent en chœur les quelques camarades qui n’étaient pas sur la piste de danse. 

    J’étais sur le point de lancer un avis de recherche, lança Colton. Dis-moi, Meredith, j’espère que tu lui as flanqué une bonne correction pour lui app… Il s’interrompit lorsque sa femme lui donna un solide coup de coude dans les côtes. Aie !

    Invite-moi à danser avant de dire des bêtises, exigea-t-elle. Colton se leva avec un air déconfit et ils rejoignirent la piste de danse alors que Jenna et son époux en revenaient.

    Plus mal à l’aise que jamais, Meredith reprit place à la table avec le sentiment désagréable qu’elle ne pourrait pas éviter les allusions, même voilées, à ce qui s’était passé ni les commentaires plus ou moins sympathiques. Elle était certaine que tous les amis de Derek la trouvaient immature, faible, pleurnicharde, ridicule, en un mot nulle, et elle s’en voulait de ne pas parvenir à changer la donne. Elle était persuadée que, plutôt que de prendre la fuite en pleurant, toutes les femmes de la table se seraient révoltées si leur conjoint avait osé leur dire la même chose que Derek. Certaines auraient peut-être même décidé de rompre sur-le-champ. Elle, elle en était incapable. Elle avait bien trop peur de se faire remarquer, d’être jugée ou moquée, et surtout elle était trop amoureuse. Outre l’humiliation subie, elle n’avait pas du tout apprécié les propos de son petit ami, parce qu’elle avait l’impression de toujours devoir vivre sa vie en fonction de l’histoire familiale de ce dernier, mais surtout parce qu’il semblait décidé à s’accrocher à sa vision des choses malgré la peine que, de toute évidence, cela lui faisait. Il était gentil, amoureux, tendre, attentionné mais quand ils avaient un différent, il fallait toujours que cela se règle comme lui le voulait. Elle avait de plus en plus l’impression qu’il ne se préoccupait pas vraiment de ce qu’elle pensait et ressentait et cela lui laissait un goût amer. Pourtant, malgré tout cela, elle n’avait pas envisagé un seul instant de mettre un terme à leur relation. Elle avait Derek dans la peau, elle ne voyait même pas comment il lui était possible de se passer de lui. Néanmoins, elle n’avait pas envie de renoncer à tous ses rêves. Elle était prête à faire tout son possible pour que son compagnon se sente bien dans sa peau mais elle voulait être bien dans la sienne, elle aussi, et pour cela, il fallait faire des concessions d’un côté comme de l’autre, ce à quoi Derek ne semblait pas disposé. Bref, elle estimait être dans une impasse et ne voyait pas d’issue.


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  • De l’autre côté de la table ronde, Mark, qui essayait depuis quelques minutes d’intercepter le regard de Meredith, lui décocha un grand sourire quand enfin, elle tourna la tête vers lui. Il était évident que la discussion qu’elle avait eue avec Derek ne lui avait pas apporté les réponses qu’elle souhaitait probablement avoir. Comme de plus en plus souvent ces derniers mois, Mark se dit qu’il ne comprenait pas son meilleur ami quand il s’agissait de son couple avec Meredith. Comment pouvait-il encore avoir des réticences ou des appréhensions par rapport à cela ? Une fois de plus, Mark regretta de ne pas être à sa place. S’il avait eu la chance d’être aimé par la jeune fille, il n’aurait pas hésité à lui donner tout ce qu’elle voulait, mariage, enfants, chien, chat, poisson rouge, n’importe quoi pour qu’elle n’ait jamais cette lueur triste dans les yeux, comme celle qu’elle avait en ce moment. Pourtant, elle essayait de dissimuler son chagrin derrière un sourire mais il n’était pas dupe. D’un mouvement du menton, il lui désigna la piste de danse en agitant son index et son majeur vers le bas. Les lèvres de la jeune fille s’étirèrent en un vrai sourire en même temps que ses sourcils se fronçaient légèrement.

    Derek, qui ne la quittait pas des yeux, suivit son regard et tomba sur Mark dont les doigts dansaient maintenant sur la table. Qu’est-ce que vous manigancez, tous les deux ? demanda-t-il, amusé mais aussi un peu jaloux de leur complicité, d’autant plus qu’il avait l’impression que Meredith le tenait encore plus à distance depuis qu’ils étaient revenus des toilettes. 

    Mark repoussa sa chaise. J’étais en train d’essayer de faire comprendre à ta copine que je l’invitais à danser.

    Il voulut se lever mais Derek fut plus rapide. Désolé vieux, mais ça fait longtemps que j’ai réservé sa première danse. Et les suivantes aussi, d’ailleurs. Il tendit la main à Meredith. Si Mademoiselle veut bien me faire l’honneur… Elle n’avait pas le cœur à danser, ni avec lui ni avec un autre, mais elle ne voyait pas comment refuser son invitation sans que tout le monde pense qu’il s’agissait d’une basse vengeance pour l’affront qu’il lui avait fait. Elle prit sa main et le suivit docilement tandis qu’il se dirigeait vers la piste de danse. Je vais danser avec ma petite femme, annonça-t-il sur un ton exagérément guilleret à Sarah et Tom qui revenaient à la table.

    Meredith retira brusquement sa main à son petit ami. Pourquoi tu leur as dit ça ? l’interrogea-t-elle sèchement quand il se retourna vers elle avec un air surpris.

    Parce que c’est ce qu’on va faire, on va danser.

    Non, ce n’est pas de ça que je parle. Pourquoi tu m’as appelé ta petite femme ?

    Derek sentit son estomac se tordre sous l’effet de l’anxiété. Parce que je suis très embêté d’avoir dit ce que j’ai dit, la façon dont je me suis exprimé, et que j’essaie de me rattraper, avoua-il. Je sais que mes amis m’ont compris mais toi, tu t’es sentie humiliée et… j’essaie simplement d’arranger les choses, bébé.

    C’était maladroit, lui fit-elle remarquer sur un ton plus doux.

    Je sais. Il fit une petite grimace pour exprimer à quel point il était penaud. Je ne suis pas très doué pour ce genre de choses. Il lui reprit la main. Allons danser, l’implora-t-il. Touchée par son remords sincère mais motivée également par la certitude que tous ceux qui étaient à leur table les observaient, elle accéda à sa prière par un signe de la tête. Quand ils furent au milieu des danseurs, Derek prit les mains de sa petite amie pour les nouer dans son cou avant de l’enlacer par la taille. Tu sais, ce que j’ai dit, c’était maladroit mais dans tous les cas, c’était sincère, assura-t-il en la faisant tourner au son du slow que l’orchestre jouait à ce moment-là. Pour moi, tu es ma femme et tu le seras jusqu’à la fin de mes jours. Je n’ai pas besoin de signer des papiers ou de prononcer des vœux pour le savoir.

    Mais qu’est-ce que ça changerait si tu le faisais ?  

    Je ne sais pas. Peut-être tout. Un de mes collègues à la clinique, ça faisait 10 ans qu’il était en couple. Ils étaient heureux, ils avaient deux enfants. Il se sont mariés et un an après, ils ont divorcé, lui raconta-t-il. Je te l’ai déjà dit, c’est un risque que je ne veux pas courir.

    Je ne te savais pas aussi superstitieux, répliqua Meredith, sarcastique.

    Ce n’est pas de la superstition, mais de l’expérience, rétorqua Derek.

    Pourtant, tes amis – Meredith tourna vaguement la tête du côté de leur table – ils sont tous mariés, non ? Ça n’empêche pas qu’ils ont l’air très heureux.

    Ça ne fait pas si longtemps qu’ils sont mariés. Ça peut encore se gâter, s’obstina Derek avec mauvaise foi. Il lâcha la taille de son amie pour lui prendre le visage entre les mains. Je t’aime, Meredith. Je n’ai jamais vraiment aimé que toi et je n’aimerai plus que toi jusqu’à mon dernier souffle, lui promit-il. Et je t’ai dit que je ferais tout ce qui est en mon pouvoir pour te rendre heureuse alors, si tu tiens tant que ça à te marier…

    Trop fière pour accepter cet ersatz de demande en mariage qui ne correspondait pas du tout à ce qu’elle avait envie d’entendre, Meredith lui coupa la parole. Non, je n’y tiens pas. Pas du tout. D’ailleurs, arrêtons d’en parler. Le soulagement qu’elle lut sur le visage de Derek lui fit plus mal que tout ce qu’il lui avait dit jusqu’à présent.

    Il s’empressa de sauter sur la perche qu’elle lui tendait, sans se poser plus de questions. D’accord. Bonne idée. Il est temps qu’on profite un peu de cette soirée. Certain de l’avoir convaincue, il lui fit faire quelques tours plus rapides avant de la soulever légèrement de terre puis de la redéposer sur le sol pour l’embrasser passionnément. Et comme à chaque fois que cela se produisait, Meredith perdit instantanément tout velléité de révolte. 


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  • A la table, les anciens de l’école de médecine n’en revenaient pas. Si quelqu’un m’avait dit que je verrais un jour Derek dans cet état-là, je ne l’aurais pas cru, déclara Connie, médusée.

    Randall approuva d’un signe de tête. Moi non plus. On ne l’a jamais vu comme ça. En tout cas, moi, je ne m’en souviens pas.

    Moi non plus. Colton se tourna vers Mark. Et toi, tu l’as déjà vu comme ça avant ? Mark se contenta de hocher la tête.   

    Quand on s’est retrouvé à la conférence de Miami, il m’a dit qu’il n’avait jamais ressenti pour personne ce qu’il ressentait pour Meredith, révéla Jenna. Je m’en étais rendu compte en l’écoutant me parler d’elle mais quand on les voit ensemble, ça saute vraiment aux yeux.

    Oui, il a l’air tellement heureux, s’extasia Lauren.

    Elle, nettement moins, laissa tomber Mark, implacable.

    Ils se retournèrent tous vers lui avec un air unanimement estomaqué. Qu’est-ce qui te faire dire ça ? demanda Connie.

    Mark fit une moue un peu dédaigneuse. Il suffit de la regarder.

    Tom haussa un sourcil avec une expression ironique sur le visage. Ben, je trouve qu’elle n’a pas l’air spécialement traumatisée, là. Tous les hommes de la table, à l’exception de Mark, éclatèrent d’un rire gras en déportant leur regard vers la piste de danse sur laquelle le couple évoluait toujours en échangeant des baisers langoureux.

    C’est bien une remarque de mec, ça ! persifla Sarah en foudroyant son époux du regard.

    Connie fit un signe de la main à un serveur pour qu’il vienne remplir sa coupe de champagne. Mark n’a pas tout à fait tort. Elle ne donne pas l’impression de nager dans le bonheur.

    C’est depuis toute cette discussion sur le mariage, fit remarquer Simon. Avant ça, elle était bien.

    Randall fit son mea culpa. Ouais, j’ai bien merdé sur ce coup-là. Je n’ai jamais imaginé que ma blague pourrie la rendrait aussi malheureuse. Sinon, vous pensez bien que je me serais abstenu.

    Je ne dirais pas qu’elle est malheureuse, mais elle est très triste, certainement, nuança Jenna. Elle veut se marier, c’est évident, et ce que Derek a dit lui a fait beaucoup de peine.

    Page prit un air plein de commisération. Oui, c’est un peu comme s’il avait ruiné tous ses espoirs.

    Colton leva les yeux au ciel. Ah les femmes ! Toutes les mêmes ! Elles sont obsédées par la robe blanche et le mariage de princesse, se moqua-t-il.

    Elles veulent être la reine du jour, ajouta Simon avec une certaine emphase sarcastique.

    Ça, c’est sexiste, releva Jenna. Et en ce qui concerne Meredith, ce n’est pas le problème. Je ne dis pas qu’elle ne rêve pas de la robe blanche et tout ça, mais je ne crois pas que ce soit ce qui compte vraiment. Pour elle, si Derek ne veut pas l’épouser, c’est parce qu’il ne l’aime pas assez. En tout cas, c’est ce qu’elle m’a dit.

    Oh la pauvre chérie ! compatit Lauren. Mais comment peut-elle penser ça ? Il l’adore. La façon dont il nous en a parlé… c’est tellement évident.

    Mark ricana, suscitant ainsi l’étonnement de ses amis. Ouais, il parle bien, mais comme je l’ai dit, il faut que les actes soient au diapason. Vous ne connaissez pas toute l’histoire, ajouta-t-il pour se justifier, en voyant les expressions quelque peu choquées de ses camarades. Il ne s’est pas toujours bien comporté avec elle. Il lui a même fait quelques sales coups. Il a changé, je suis le premier à le reconnaitre, mais elle, elle a de bonnes raisons de ne pas être tout à fait sûre de lui.

    Jenna hocha la tête. Oui, c’est vrai, il m’en a parlé. Il m’a dit qu’il n’avait pas toujours été correct avec elle. Je suppose que maintenant, elle a besoin de preuves de son amour et le mariage en serait une.

    A mon avis, elle veut être certaine que Derek veut vraiment s’engager avec elle, ajouta Dean.

    Etre marié ne garantit rien, souligna Sarah. En tout cas, ça n’a jamais empêché personne d’être infidèle.

    Non, bien sûr. Mais elle est jeune. Elle est encore pleine d’illusions, estima Colton.

    C’est évident que Derek n’a aucune intention de la tromper, intervint Lauren en dodelinant de la tête au son de la musique. Regardez-le. Ça se voit trop qu’il est fou amoureux d’elle.

    Son mari la regarda tendrement. Ma chérie, tu es une incorrigible romantique.

    On ferait mieux de changer de sujet, ils reviennent, signala Randall. Dites donc, les amoureux, c’est un remake de Dirty Dancing que vous nous avez fait là ! lança-t-il au couple.


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  • Ouais, c’était super chaud. Mais je suis un peu déçu que vous n’ayez pas fait le fameux porté, plaisanta Tom.

    Derek éclata de rire. Content que le spectacle vous ait plu, bande de voyeurs ! Il s’adressa ensuite à Meredith. Ils n’ont pas arrêté de nous espionner pendant qu’on dansait !

    Lauren lui sourit affectueusement. C’est parce que vous êtes tellement beaux, tous les deux.

    C’est vrai, vous formez un couple magnifique, renchérit Jenna.  

    Derek couva sa petite amie d’un regard extrêmement amoureux. C’est Meredith qui est magnifique. La femme la plus magnifique que j’ai connue de toute ma vie. Moi, je suis simplement heureux, comme je ne l’ai encore jamais été. Si vous me trouvez magnifique, c’est parce que sa magnificence rejaillit sur moi.

    Oooh ! firent ces dames, attendries et aussi un peu envieuses, tandis que Meredith rosissait de confusion. Bizarrement, elle n’éprouvait aucun plaisir à entendre Derek parler d’elle en des termes aussi élogieux. Pour commencer, elle avait toujours un peu de rancœur contre lui et surtout, elle ne se reconnaissait pas dans le portrait qu’il faisait d’elle. A vrai dire, elle avait le sentiment qu’il en faisait trop pour se faire pardonner ses commentaires désagréables et surtout, sa détermination à ne jamais l’épouser alors qu’il était plutôt évident que c’était ce qu’elle voulait. Mais par-dessus tout, elle voulait cesser d’être le centre d’une l’attention qu’elle trouvait humiliante.

    Connie se tourna vers Randall. Ce n’est pas toi qui me dirais des jolies choses comme ça. Il fit une mimique pour exprimer ses regrets.

    Dean feignit d’être contrarié. Tu mets la barre beaucoup trop haut, mon vieux, dit-il à Derek. De quoi on a l’air, nous maintenant ?

    Oh je ne dis pas que de jolies choses, je dis aussi beaucoup de conneries, confessa celui-ci. D’ailleurs, à ce propos – il prit la main de Meredith – je suppose que vous l’avez tous compris mais pour que les choses soient bien claires, ce que j’ai dit tout à l’heure, ça n’avait rien à voir avec Meredith. Vous connaissez mon histoire, vous savez pourquoi j’ai le mariage en horreur. Mais ça n’a rien à voir avec Meredith, répéta-t-il.

    Les exclamations fusèrent dans le groupe. On le sait ! On avait bien compris ! C’était évident ! Tu t’es mal exprimé, c’est tout !

    Oui, je me suis très mal exprimé, confirma Derek. Parce que Meredith est tout pour moi. Grâce à elle, je sais enfin ce qu’est le bonheur et je ne veux pas gâcher ça. C’est pour ça que je ne veux pas entendre parler de mariage. J’ai vu trop souvent autour de moi quelle merde ça pouvait être. Ça me fait trop peur. Il porta la main de la jeune fille à sa bouche pour l’embrasser. J’aime notre relation, elle est parfaite, je ne veux prendre aucun risque. Je ne veux pas que ça change.

    Du moment que vous êtes tous les deux d’accord avec ça, tout va bien, déclara Jenna en regardant Meredith avec insistance.

    Celle-ci comprit le message mais elle se borna à sourire, en espérant que Derek et ses amis s’en contenteraient. Il était hors de question de parler de ce qu’elle ressentait devant ces personnes qui, même si elle les trouvait très sympathiques, étaient pratiquement des inconnus pour elle. Pourtant, elle avait beaucoup de choses à dire. Certes, Derek venait de lui faire une nouvelle très belle déclaration d’amour, elle en convenait, mais cette fois encore, cela ne l’avait pas vraiment touchée. Tout ce qu’elle retenait de ce qu’il avait dit, c’était qu’il décidait de tout en ce qui concernait leur relation, leur vie, sans même la concerter. Il n’arrêtait pas de parler de ce qu’il éprouvait, de ce qu’il voulait, sans se soucier un seul instant de ses sentiments et ses désirs à elle. Il ne voulait envisager les choses que de son point de vue et pour tout dire, elle le trouvait égoïste et cela la décevait terriblement. Et tout cela l’amenait à repenser à tout ce que sa mère lui avait dit. Et si Derek n'était pas le bon ? Cette éventualité l’effraya. Non, ce n’était pas possible, elle ne pouvait pas s’être trompée à ce point. Si c’était le cas, qu’allait-elle devenir ? Perdue, elle releva la tête et croisa le regard à la fois inquiet et interrogateur de Jenna. Craignant une intervention qui relancerait la discussion et accroitrait la pitié à son égard, elle la fixa avec des yeux suppliants pour lui enjoindre de se taire. Jenna tourna la tête, signe qu’elle avait compris la requête muette. 

    Ça va ? demanda Derek, que le silence persistant de sa compagne préoccupait.

    Oui, ça va.

    Tu es sûre ?

    Mais oui, répondit-elle avec un sourire qui n’était guère convaincant.

    Nous n’avons pas de problèmes, n’est-ce pas ? insista Derek qui avait un grand besoin d’être rassuré.

    Non, Derek, nous n’avons pas de problèmes, répliqua Meredith, agacée. Est-ce qu’on pourrait parler d’autre chose, maintenant ? J’aimerais bien m’amuser. Il parait que c’est ce qu’on fait dans les fêtes de mariage.

    Mark, qui suivait leur conversation tout en faisant semblant d’écouter Connie et Sarah parler des exploits scolaires et sportifs de leurs enfants, saisit la balle au bond. Tu veux t’amuser ? Moi aussi ! il se leva précipitamment et tendit la main à Meredith. En piste, jeune fille !


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  • Meredith se mit debout immédiatement mais Derek la retint en saisissant son poignet. Si tu voulais continuer à danser, il fallait me le dire. On peut y retourner si tu veux.

    Elle se libéra de son étreinte tout en donnant son autre main à Mark. Non, c’est à son tour maintenant. Je le lui avais promis, prétendit-elle. Et ça me fait plaisir de danser avec lui. Elle suivit Mark sur la piste de danse, laissant Derek désemparé.

    La façon dont elle lui avait repris sa main, un peu trop vivement à son goût, lui avait fait comprendre que, contrairement à ce qu’il avait voulu croire, elle ne lui avait pas totalement pardonné ses propos maladroits. Il s’interrogeait sur la façon dont il allait pouvoir rentrer dans ses bonnes grâces quand Jenna vint s’asseoir à côté de lui. Ça va ? Il fit une moue désabusée avant de boire une gorgée de champagne. Ne t’en fais pas, elle va finir par se calmer, lui dit-elle en souriant.

    Je croyais qu’elle l’était déjà, bougonna-t-il.

    Jenna pouffa de rire. Ça, c’était sans doute un peu trop optimiste.

    Je viens de lui demander si on avait des problèmes et elle m’a dit non, objecta Derek, l’air choqué.

    A quoi tu t’attendais ? riposta Jenna. A ce qu’elle te dise ce qu’elle a sur le cœur en pleine fête de mariage, au milieu de gens qu’elle ne connait pour ainsi dire pas ? Bien sûr qu’elle n’allait pas faire ça ! Mais à mon avis, tu ne perds rien pour attendre.

    Qu’est-ce qu’elle t’a dit quand vous étiez ensemble ?

    Jenna agita son index en l’air. Oh ça, ne compte pas sur moi pour te le répéter. Solidarité féminine oblige ! En plus, je ne voudrais pas prendre le risque de te dire des choses que j’aurais mal interprétées. Mais de toute façon, je préfère ne pas m’en mêler. Les problèmes de couple, ça se règle à deux. 

    A mon avis, je vais encore en prendre pour mon grade, déplora Derek en soupirant.

    Jenna posa sa main sur le bras de son camarade. Avoue que tu l’as un peu mérité.

    Oui, je sais. Je me suis comporté comme un con, regretta Derek. Encore une fois.

    Jenna lui sourit. Du moment que tu t’en rends compte, tu vas pouvoir t’améliorer.

    Dans le même temps, Meredith confiait ses ressentiments à Mark. Il m’énerve. Qu’est-ce qu’il m’énerve ! Tu ne peux pas savoir à quel point.

    Je crois que je devine.

    Ça, ça m’étonnerait ! s’exclama la jeune fille. Parfois, il arrive vraiment à me mettre en colère. Si on n’était pas à ce mariage, avec tous ces gens, je… je… je l’aurais frappé, je crois.

    Comme d’habitude, alors que Mark n’avait pas apprécié le comportement de son meilleur ami et qu’il le lui avait fait savoir, il prit sa défense. Je comprends mais tu sais, il a raison quand il dit que ce qu’il pense du mariage n’a rien à voir avec toi. Et ça le rend vraiment malheureux de t’avoir fait de la peine. Là, comme tu le vois, il ne sait plus quoi faire pour se rattraper.

    Ouais, il est très gentil, marmonna Meredith. Il m’invite à danser, il me demande tout le temps si je vais bien, il me fait des compliments que je trouve un peu exagérés, si tu veux mon avis, et il me dit qu’il m’aime toutes les cinq secondes, même que ça en devient lourd. Et j’ai l’impression que si je le voulais, je pourrais me faire offrir des tas de trucs très chers. Mark sourit de toutes ses dents. Cette description d’un Derek coupable était très réaliste. Mais ça ne l’empêche pas de décider tout seul ce que notre relation doit être, poursuivit Meredith. Il ne veut pas se marier et il m’a déjà fait comprendre qu’il n’était pas très chaud pour avoir des enfants. Tout ça à cause de sa famille de merde ! fulmina-t-elle. Elle baissa le ton en remarquant que le couple qui dansait à côté d’eux la regardait bizarrement. Mais moi, je n’ai pas vécu la même expérience que lui. J’ai une super famille. Et j’ai envie de me marier et d’avoir des enfants.

    Tu devrais le lui dire, conseilla Mark.

    Pour avoir l’air de la pauvre fille qui supplie qu’on l’épouse ? Meredith ricana. Certainement pas !

    Mark fit une moue. Je ne suis pas un expert mais il me semble que si vous voulez durer sur le long terme, toutes ces réactions d’orgueil ou d’ego, appelle ça comme tu veux, ça n’a plus lieu d’être. Vous devez apprendre à communiquer. Tu dois lui dire ce que tu ressens et ce que tu veux. Et lui, il doit faire la même chose, et à partir de là, vous devez négocier et faire des concessions pour arriver à un compromis. C’est comme ça que ça marche, un couple, je crois.

    La hargne de Meredith fit subitement place à la peur. Et s’il ne veut pas faire de concession ? Et si on n’arrive pas à tomber d’accord et qu’il me quitte, Mark ?

    La détresse, presque de la douleur même, qu’il vit dans ses yeux remua Mark au plus profond de lui-même, le ramenant encore une fois à la question qu’il ne cessait jamais de se poser quand elle lui parlait de son amour pour Derek. Pourquoi n’était-ce pas lui qu’elle aimait ainsi ? Comme à chaque fois qu’il ressentait des émotions trop fortes, il se réfugia dans l’humour. Bah, je trouverai bien un moyen de le faire changer d’avis. Je pourrais le torturer jusqu’à ce qu’il accepte de t’épouser.


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