• C’est normal. Tu es sa fille, elle s’inquiète pour toi. Et il faut reconnaitre que je lui donne de la matière. Derek reprit la main de sa compagne. Je suis désolé pour ce week-end. Je t’avais emmenée à ce mariage pour te distraire, parce que je savais que tu étais tracassée à cause de mon père, et ça a été tout le contraire. Avec toutes les conneries que j’ai dites, je t’ai rendue malheureuse alors que c’est tout ce que je veux éviter. Il remercia Anne qui venait de lui apporter une tasse de café et attendit qu’elle soit repartie pour poursuivre. Enfin, tout ça pour te dire que ça ne peut pas durer comme ça !

    Un éclair de panique traversa le regard de Meredith. Qu’est-ce que tu veux dire par, ça ne peut pas durer comme ça ? Tu n’es tout de même pas en train d’envisager de rompre avec moi ?

    Interloqué, Derek écarquilla les yeux tout ronds. Non, non, grands dieux, non ! Je ne veux absolument pas rompre. Tu sais bien que je suis incapable de vivre sans toi. Je crois que je mourrais si je ne t’avais plus. Non, ce que je voulais dire, c’est que je vais suivre une thérapie. Il faut que je me sorte de toute cette merde que je traine derrière moi depuis tellement d’années.

    Meredith parut stupéfaite. Tu vas faire une thérapie ? Pour moi ?

    Pour toi et pour moi. Parce que tant que je n’aurai pas réglé mes problèmes, je ne pourrai pas te rendre vraiment heureuse et si tu n’es pas heureuse, je ne le suis pas non plus. Et je veux être heureux, je crois que je l’ai bien mérité après tout ce que j’ai vécu. Alors, comme tu vois, cette envie de thérapie, c’est purement égoïste en fait, plaisanta Derek. Meredith sourit. Ils se dévorèrent du regard quelques instants, jusqu’à ce que Derek recommence à parler. A propos de ce que j’ai dit ce week-end, je voudrais t’expliquer… J’ai peur du mariage parce que j’ai peur de ne pas être à la hauteur et de répéter les erreurs de mes parents. Je ne veux pas revivre ce que j’ai vécu et encore moins le faire vivre à d’autres. Et certainement pas à toi, ni aux enfants qu’on pourrait avoir. Rien que cette idée me donne envie de vomir. Mais je t’aime, Meredith, et je ne veux pas passer à côté de nous. Et c’est ce que je risque de faire si je continue à penser comme ça. Ça fait un moment que je réfléchis à tout ça. J’en ai déjà parlé avec Mark d’ailleurs. Et puis, hier, après avoir discuté avec mon père, j’ai réalisé que notre histoire n’a rien à voir avec celle qu’il a vécue avec ma mère. Je ne suis pas comme eux et toi, non plus. Notre histoire sera simplement ce qu’on en fera, conclut-il en reprenant ce que son meilleur ami lui avait dit.

    Alors, tu n’as plus peur maintenant ? demanda Meredith

    Bien sûr que si. Je suis mort de peur, avoua Derek sans honte. Ce n’est pas parce que j’ai l’intention de bien faire les choses que je vais y arriver. Et puis, je ne peux pas m’empêcher de me demander quand tu vas réaliser que je ne suis pas l’homme qu’il te faut, que tu mérites mieux. Et je sais que si ce jour-là arrive, je vais m’effondrer.

    La jeune fille lui lança un regard désapprobateur. Pourquoi tu penses ça ?

    Meredith, regarde-toi ! Pour commencer, tu es beaucoup plus jeune que moi. Elle leva les yeux au ciel mais il l’ignora. Tu es magnifique, tu es brillante. Tu pourrais avoir n’importe quel homme si tu le voulais.

    Elle l’arrêta. Mais justement, je ne veux pas n’importe quel homme. Je te veux, toi et personne d’autre. Et tu sais, tout ça, je l’ai pensé aussi. Moi aussi, je me suis souvent dit que tu étais trop bien pour moi et que ça ne durerait pas entre nous, que c’était impossible qu’un homme comme toi ait envie de sortir avec moi, et encore moins de vivre avec moi.

    Et tu ne le penses plus ?

    Oh je pense toujours que tu es un homme magnifique et brillant et que tu pourrais avoir toutes les femmes que tu veux. Tu les as eues d’ailleurs, lui rappela-t-elle avec un petit sourire. Mais je ne pense plus que je ne suis pas la femme qu’il te faut. Parce que je sais qu’on est fait l’un pour l’autre et que rien ne pourra nous séparer. C’est comme si… c’est comme si j’étais née pour être avec toi.

    C’est tout à fait ce que je ressens. Derek se releva du canapé pour aussitôt se laisser tomber à genoux devant la jeune fille. Devinant ce qui allait suivre et au comble de l’émotion, elle porta la main à sa bouche. Meredith, je t’aime plus que les mots ne me permettront jamais de le dire, proclama Derek. Tu es la femme de ma vie. Tu me rends heureux à un point que tu n’imagines même pas. Il lui prit la main et la serra fortement. Et tu me rendrais encore plus heureux si tu acceptais de devenir ma femme.

    Meredith eut un peu de mal de croire ce qu’il venait de lui dire, tant c’était inattendu. A tel point qu’elle ne put s’empêcher d’émettre des doutes. Tu ne fais pas ta demande pour me faire plaisir ou te faire pardonner, n’est-ce pas ? 

    Non, bien sûr que non. Tu n’as pas écouté ce que j’ai dit, lui reprocha-t-il gentiment en reprenant place à côté d’elle. Je t’aime et je sais que je ne m’aimerai plus jamais personne après toi. Mon amour pour toi mourra avec moi. Alors, de ce point de vue-là, t’épouser, être lié à toi jusqu’à la fin de mes jours, ça ne me fait pas peur. Et ce qu’on vit est tellement merveilleux ! s’exclama-t-il. Depuis qu’on est ensemble, j’ai l’impression de vivre un rêve. Tu as embelli ma vie. Je peux même dire que tu lui as donné un sens. Te demander en mariage, c’est aussi ma façon de te dire que j’ai confiance en toi et en nous. Alors, bébé, je te le demande encore une fois, veux-tu m’épouser ?

    Les yeux de Meredith étaient larmoyants quasiment depuis le début du discours de Derek. C’est mi-pleurant, mi-riant qu’elle répondit. Ouiiii, oui, bien sûr ! Mon dieu, un million de fois oui. On va se marier ! cria-t-elle en se jetant dans les bras de son désormais fiancé.

    Il sourit. On va se marier, répéta-t-il plus calmement. Je suis désolé, je n’ai pas eu le temps d’aller t’acheter une bague de fiançailles, mais je vais le faire.

    La bague, je m’en moque. Tu es vraiment sûr de toi ? lui demanda encore Meredith.

    Je n’ai jamais été plus sûr de moi qu’en ce moment, lui assura Derek.

    Maman, hurla alors Meredith en courant vers la cuisine. Je suis fiancée. Derek m’a demandée en mariage. On va se marier ! Derek la regarda partir avec le sentiment étrange mais infiniment agréable qu’il était enfin là où il devait être.  


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  • Cette histoire va connaitre une nouvelle pause, le temps que j'écrive le tout dernier chapitre.

    A très bientôt


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  • Vous pourrez découvrir la fin de "More than Words" à partir de ce lundi 2 novembre.


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  • Appuyé sur la balustrade de la terrasse de sa chambre, Derek afficha un large sourire quand il vit son fils ainé sauter dans la piscine en faisant la bombe, éclaboussant ainsi tous ceux qui étaient dedans et même sa grand-mère qui était confortablement installée dans un fauteuil, au bord du bassin. Nathan ! s’écria Anne. Fais un peu attention ! Mon magazine est tout mouillé maintenant.

    Dans un mouvement élégant, le jeune homme sortit aussitôt de la piscine pour aller prendre sa grand-mère dans ses bras. Oh Granny, je te demande pardon ! Je vais faire attention à ne plus te mouiller, promit-il avec un air espiègle.

    Et qu’est-ce que tu crois que tu es en train de faire, là ? ronchonna Anne. Non mais tu as quel âge, mon garçon ? Dix-neuf ans ou cinq ? Elle jeta à son petit-fils un regard empreint d’une sévérité qui n’était pas réelle, car elle avait des trésors de bienveillance pour ses petits-enfants à qui elle ne trouvait aucun défaut. C’est pour être plus proche d’eux qu’elle avait décidé de quitter le Kentucky et tout ce qui la retenait là-bas pour vivre à San Francisco.

    Dégoulinant d’eau, Nathan se redressa tout sourire. Ça dépend des jours, Granny, mais aujourd’hui, je penche plutôt vers les cinq. Sept maximum. Après s’être secoué un peu à la manière d’un chien, ce qui eut pour effet d’envoyer de nouvelles gouttes d’eau sur son aïeule, il se retourna et courut en diagonale pour sauter à nouveau dans la piscine, en prenant ses genoux dans ses bras. Whaouuuuuu ! hurla-t-il en aspergeant à nouveau tous ceux qui étaient à proximité. Du haut de sa terrasse, Derek pouffa de rire en voyant Anne plier bagage en maugréant pour se retirer dans le pool house, tandis que les jeunes qui étaient dans l’eau se vengeaient de leur tortionnaire en lui envoyant de grandes giclées avec leurs mains. Quatre jeunes filles se précipitèrent sur lui pour tenter de lui enfoncer la tête sous l’eau mais il les repoussa sans mal, en saisissant même deux par la taille pour les rejeter au loin. Hé frangin, amène-toi, cria-t-il à son cadet qui sortait de la maison en compagnie de sa petite amie. C’est la guerre ici, j’ai besoin de renfort.

    Bradley lâcha la main de sa copine pour répondre à l’appel de son frère. Banzaiiii ! beugla-t-il avant de plonger dans l’eau en créant un grand splash.

    Les frères Shepherd à l’attaque ! brailla Nathan.

    C’est avec fierté que Derek regarda ses fils se jeter sur leurs prétendus opposants en feignant de vouloir les noyer. C’étaient vraiment de beaux garçons, avec une stature athlétique due à une pratique intensive du sport, en particulier Nathan qui jouait dans l’équipe universitaire de football et qui ambitionnait de passer professionnel à la fin de ses études. Il était le portrait craché de son père tant physiquement que du point de vue du tempérament, notamment en ce qui concernait ses relations avec la gent féminine (au grand dam de sa mère, d’ailleurs). Contrairement à son ainé, Bradley était un parfait mélange de ses parents : il avait hérité de la blondeur, de la douceur et de l’empathie de Meredith. De Derek, il tenait les yeux bleus, la détermination et l’impétuosité. Toutefois, ce dont Derek était le plus fier, c’est de la personnalité de ses enfants et la relation qu’il avait développée avec eux. Pourtant, ce n’était pas gagné au début. Il se souvenait encore parfaitement de ce qu’il avait ressenti lorsque Meredith lui avait annoncé, quelques mois après leur mariage, qu’elle était enceinte. Inutile de dire que c’était un accident. D’ailleurs, c’est avec beaucoup de ménagement que Meredith avait annoncé la grande nouvelle qui avait néanmoins fait l’effet d’une bombe pour son mari. Lui qui pensait avoir encore quelques années pour se préparer à l’idée d’être père, s’était retrouvé au pied du mur, ce qui l’avait fait paniquer, même s’il avait réussi plus ou moins à sauver la face en donnant l’impression que cette grossesse imprévue n’était pas une catastrophe et qu’il y avait tout de même de quoi se réjouir. Or, de réjouissance, il n’en avait pas été question pour lui. Les traumatismes de son enfance avaient resurgi d’un coup, l’amenant à se demander s’il allait être capable d’aimer cet enfant et être à la hauteur de ce qui l’attendait. Les huit mois qui avaient suivi avaient été horribles, à jouer la comédie du futur père heureux. Le pire, cela avait été l’affreuse sensation que le petit être qui grandissait dans le ventre de Meredith était un ennemi qui allait lui voler l’amour de sa vie. Même la thérapie ne lui avait pas permis de se départir de ce terrible sentiment. Mais lorsque l’infirmière lui avait mis son fils dans les bras et que celui-ci lui avait saisi l’auriculaire pour le serrer avec un rictus qui lui étirait les lèvres, Derek avait eu une véritable révélation. Oublié tout ce qu’il avait dit à Meredith sur les réflexes des nouveaux-nés. Quand le bébé s’était agrippé à son doigt avec ce qui ressemblait tellement à un sourire, il avait senti son cœur se gonfler d’un amour démesuré. C’est à cet instant précis qu’il était devenu père au plus profond de lui-même. Une demi-heure plus tard, il avait confié à Meredith qu’il voulait avoir d’autres enfants. Et effectivement, deux ans plus tard, le couple avait eu des jumeaux, Bradley, prénommé ainsi en l’honneur de son grand-père maternel, et sa sœur, Maxine. Deux garçons, une fille, beaux et en bonne santé. Les parents comblés avaient décidé d’en rester là, d’autant plus que Meredith faisait des études en même temps. Comme Derek ne voulait pas que ses enfants soient élevés par une armada de nounous, comme lui-même l’avait été, il avait décidé de mettre sa carrière entre parenthèses, pour seconder son épouse et lui permettre de réaliser ses rêves. Aimant et attentif, très protecteur aussi, il s’était complètement investi dans l’éducation de ses enfants, quoique se montrant parfois un peu trop tolérant envers les bêtises qu’ils pouvaient commettre, ce qui obligeait souvent Meredith à passer derrière lui pour faire le gendarme. Pour le reste, donner le biberon et changer les couches, même en pleine nuit, préparer les panades, se promener au parc, jouer aux petites voitures ou à la poupée, donner le bain, lire des histoires avant le coucher, il avait tout fait et à sa grande surprise, il s’était pleinement épanoui dans son rôle de père. Il s’était même carrément éclaté. Il avait d’ailleurs rempilé avec plaisir lorsque, trois ans après la naissance des jumeaux, Meredith avait donné naissance à Ashleigh, un accident elle aussi, mais cette fois, Derek en avait été ravi.

    Il se serait fait tuer plutôt que de l’admettre mais Ashleigh était d’une certaine façon sa préférée. D’abord parce qu’elle était la petite dernière mais surtout parce qu’elle lui rappelait furieusement sa mère. La même chevelure d’ébène, le même regard violet, la même flamboyance et plus que tout, le même caractère bien trempé. Des quatre enfants, elle était sans conteste la plus déterminée et la plus difficile. Toute petite déjà, elle piquait d’énormes colères lorsqu’elle n’obtenait pas ce qu’elle désirait. La situation ne s’était guère améliorée avec les années, ce qui avait parfois amené Derek à craindre que sa plus jeune fille ne souffre de la même maladie que sa grand-mère paternelle. Ce n’était heureusement pas le cas. Ashleigh avait simplement des idées très arrêtées sur ce qu’elle voulait faire de sa vie et elle n’entendait laisser personne la faire dévier de la route qu’elle comptait se tracer. Ainsi, alors que Bradley avait l’intention de suivre la tradition familiale en devenant neurochirurgien et que Maxine se destinait à une carrière de puéricultrice ou d’institutrice en maternelle, la benjamine avait décrété qu’elle voulait être mannequin, un choix de carrière qui n’emballait pas vraiment ses parents. Certes, Ashley n’avait que treize ans, elle allait certainement encore changer d’avis un million de fois. Le problème, c’est qu’elle négligeait ses études, les trouvant totalement inutiles pour défiler sur les podiums, ce qui créait des conflits avec ses parents, principalement sa mère.


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  • L’attention de Derek fut attirée par sa fille ainée qui nageait pour rejoindre un jeune homme accroupi au bord de la piscine. Bien que celui-ci lui tournât le dos, Derek n’eut aucun mal à le reconnaitre. Avec son physique de viking et ses cheveux blonds mi-longs, Damian Sloan était facilement reconnaissable. De plus, il faisait partie des intimes de la maison, où il passait d’ailleurs plus de temps que chez lui. Il était né dix-huit ans plus tôt, d’une courte relation que Mark avait eue avec une avocate à l’époque où il vivait à Londres. Ah mais où avais-je la tête ? Vous n’êtes pas encore au courant ! Deux mois après lui avoir servi de témoin à son mariage, Mark avait annoncé à son meilleur ami qu’il partait pour la Grande-Bretagne où l’attendait un emploi très bien rémunéré dans une clinique privée spécialisée dans l’esthétique. Derek avait été assommé par la nouvelle. Jamais il n’avait envisagé de ne plus travailler avec Mark et pire encore, de ne plus rien partager avec lui, sans parler du fait qu’à aucun moment son ami n’avait manifesté une quelconque envie envie de partir, surtout pas de l’autre côté du monde. Derek n’avait pas encore eu le temps d’encaisser le choc que Callie s’en prenait à lui en lui imputant la responsabilité du départ de Mark. Il était tombé des nues quand elle lui avait révélé que la décision de leur ami était motivée par le fait qu’il n’arrivait plus à gérer ses sentiments pour Meredith et que, même s’il était très heureux pour le couple, leur bonheur de jeunes mariés le faisait trop souffrir. Derek avait eu l’impression que le ciel lui tombait sur la tête. Il ne s’était pas rendu compte que Mark était tombé amoureux de Meredith, il n’avait même jamais imaginé que ce soit possible. Au départ, il avait vécu la situation comme une véritable trahison. Après une violente confrontation au cours de laquelle il n’avait même pas laissé Mark se défendre, il avait coupé les ponts avec celui qu’il ne considérait plus comme un ami. Mark était parti pour Londres sans qu’ils se soient parlé ou revus. Heureusement, le temps arrange bien les choses. La réflexion et de nombreuses discussions avec Meredith, la paternité aussi, lui avaient permis de relativiser. Il avait fini par admettre que l’amour ne se commande pas et qu’il ne pouvait pas en vouloir à Mark d’être tombé amoureux de Meredith. D’ailleurs, comment en aurait-il pu être autrement ? Et le plus important n’était-il pas que Mark n’avait jamais essayé de la séduire ? Au contraire, il avait placé son amitié pour Derek au-dessus de son amour pour la jeune femme, en prenant ses distances avec elle. A la suite de cette prise de conscience, Derek avait peu à peu repris contact. Pour commencer, un mail de temps en temps, et puis quelques appels téléphoniques avaient permis aux deux hommes de recréer un lien sans toutefois parvenir à retrouver totalement leur complicité d’antan.

    Et puis, cinq ans après son départ, Mark s’était présenté à l’improviste chez les Shepherd, portant dans ses bras son fils, dont la mère venait de décéder dans un accident de voiture. Même s’il avait compris immédiatement, à la façon dont Mark avait salué Meredith, que les sentiments qu’il avait pour elle n’avaient pas disparu, Derek l’avait accueilli à bras ouverts, réalisant à quel point son ami lui avait manqué. Ce dernier avait avoué d’emblée au couple qu’il ne se sentait pas capable d’élever un enfant, du moins pas seul. Il avait un travail qui lui prenait la plus grande partie de son temps, il n’était pas stable d’un point de vue sentimental, ni à aucun point de vue d’ailleurs. Il était tout à fait conscient de ne pas être digne de la tâche qui l’attendait et il avait besoin d’aide pour donner à son fils une chance d’avoir une meilleure enfance que la sienne. Compte tenu des circonstances, il était un peu gêné de s’adresser à eux mais il n’avait personne d’autre vers qui se tourner. Un seul échange de regards entre Derek et son épouse leur avait permis de savoir qu’ils étaient d’accord pour accepter la demande de leur ami. Ce qu’ils n’avaient pas prévu, c’est que Mark se déchargerait sur eux de l’éducation de son fils, lequel avait passé de plus en plus de temps dans sa famille d’adoption. Mark se contentant de le voir un week-end sur deux et de l’emmener en vacances deux à trois fois par an, leur relation était restée superficielle. Damian aimait son père et appréciait de passer du temps avec lui pour parler de sport ou des filles, mais quand il avait un vrai problème, c’était vers Derek qu’il se tournait. Dans son cœur, il considérait les Shepherd comme ses vrais parents. Quant à Derek, s’il avait beaucoup de mal à comprendre l’attitude de son ami, il ne lui en avait jamais fait le reproche. Il savait que, tout comme lui, Mark était abimé par son histoire familiale, à la différence qu’il n’avait pas eu la chance de rencontrer une Meredith pour le réparer.

    Derek fronça légèrement les sourcils en voyant Maxine sortir de la piscine pour se lover contre Damian. La jeune fille était un peu l’extraterrestre de la famille. Timide, peu sûre d’elle, très sensible, anxieuse, elle faisait tout ce qui était en son pouvoir pour ne pas se faire remarquer. Ce qui était compliqué, car elle était vraiment ravissante avec de longs cheveux d’un superbe blond vénitien qui lui arrivait presque en-dessous des fesses, un visage fin aux traits délicats, un teint très pâle constellé de minuscules taches de rousseur et de grands yeux verts qui étaient, selon Anne, ceux de son arrière-grand-mère paternelle. Petite, très mince et gracieuse, elle paraissait si menue dans les bras de son ami qu’on pouvait craindre qu’il la brise rien qu’en la serrant un peu trop fort contre lui. Toutefois, il émanait du duo une telle tendresse qu’on ne pouvait qu’être rassuré. Comme pour le confirmer, Maxine leva la tête vers Damian qui l’embrassa délicatement sur le front. Le regard qu’ils échangèrent ensuite n’avait pas grand-chose de fraternel.

    En entendant du bruit qui venait de la chambre, Derek, qui avait le sentiment désagréable qu’il était en train de violer l’intimité de sa fille, quitta la terrasse pour rentrer. Il découvrit Meredith, nue sous son peignoir de bain et les cheveux enveloppés dans une serviette de bain, qui fouillait dans sa boite à bijoux. Tu ne crois pas qu’il y a quelque chose entre Maxine et Damian ? lui demanda-t-il, le front plissé. J’ai l’impression qu’ils se rapprochent.

    Ils ont toujours été proches, lui fit remarquer Meredith.

    Tu sais très bien ce que je veux dire, bougonna Derek. Et ça ne me plait pas beaucoup. On les a pratiquement élevés comme des frère et sœur.

    Ce qu’ils ne sont pas, souligna Meredith. Elle brandit une paire de boucles d’oreille. Ah voilà ! Je les ai trouvées. 

    Qu’est-ce qu’on va faire ?

    Meredith tourna la tête vers lui. Absolument rien ! Premièrement, on n’est pas sûr qu’il se passe vraiment quelque chose entre eux. Derek fit une moue attestant qu’il n’était pas dupe. Deuxièmement, je n’ai pas accepté que ma mère s’interpose entre nous au début de notre relation, poursuivit-elle sans réagir. Alors, il n’est pas question que j’inflige ça à notre fille. Elle recommença à examiner le contenu de sa boite à bijoux. En plus, j’aime beaucoup Damian, il est plein de qualités. Maxine pourrait tomber plus mal.

    Je ne dis pas le contraire. Moi aussi, je l’aime bien, ce gamin, déclara Derek sur un ton bourru. Mais si ça ne marche pas entre eux, ça va être le bordel.

    Et pourquoi ça ne marcherait pas ? Moi, je crois au contraire qu’ils sont faits l’un pour l’autre. Elle sortit un collier de la boite à bijoux avant de refermer celle-ci.

    Derek regarda sa femme avec un regard admiratif tandis qu’elle avançait vers lui. Excepté quelques petites pattes d’oie autour des yeux et une silhouette un peu plus ronde à cause des grossesses, elle n’avait guère changé en vingt ans. Dans tous les cas, elle était toujours pour lui la ravissante jeune fille pour laquelle il avait craqué un soir de gala.


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