• Est-ce que ton cœur te parle encore d’amour ? l’interrogea Momsy, la voix empreinte d’une tendre sollicitude.

    Bien sûr, avoua Meredith. J’ai eu un copain avant Derek, et je croyais en être amoureuse mais maintenant, je sais que ce n’était pas le cas. Ce n’était rien en fait, rien comparé à ce que j’ai éprouvé pour Derek. Elle frissonna en pensant à la révolution qu’avait été sa rencontre avec le chirurgien. Lui, je l’ai aimé à la folie. Et encore maintenant… Elle se mordit les lèvres pour ne pas éclater en sanglots. L’amour est toujours là, bien sûr, arriva-t-elle enfin à articuler.

    Eh bien, je crois que tu as ta réponse, dit Momsy, ses doigts s’enroulant autour des mèches blondes.

    Non, soupira Meredith. Parce que même si je l’aime encore, je n’arrive pas à oublier qu’il a couché avec d’autres filles. A nouveau, les larmes envahirent ses yeux.

    Bon, il a trempé son engin un peu n’importe où, c’est vrai, concéda Momsy. Mais tu sais, une fois que c’est lavé, c’est comme neuf.

    Pas pour moi, affirma Meredith d’un ton douloureux. Je… Je ne… je ne sais pas comment passer au-dessus de ça.

    Avoir parlé avec Derek pendant quelques heures avait convaincu Momsy de la force et de la sincérité de ses sentiments. Voilà pourquoi elle était bien décidée à défendre sa cause. Il a des torts, Meredith, je ne cherche pas à les nier, et lui non plus d’ailleurs. Mais ce garçon est vraiment fou de toi ! s’écria-t-elle.

    Et ça excuse tout ? demanda Meredith, étonnée de la désinvolture avec laquelle Momsy jugeait l’attitude de Derek.

    Agacée par son entêtement, la vieille dame fit claquer sa langue contre son palais. Ce que je veux dire, c’est que tout le monde fait des erreurs. Le principal, c’est d’être capable de les admettre et d’en tirer des leçons. Je pense que c’est ce qu’il est en train de faire. Pour toi, parce qu’il t’aime, parce qu’il ne veut pas te perdre.

    Meredith réfléchit un instant. Oui, tout le monde faisait des erreurs et, sans doute, en avait-elle fait, elle aussi. Mais s’il fallait dresser un classement, celles de Derek lui semblaient bien plus graves, et donc plus difficiles à pardonner. Et vous, comment auriez-vous réagi si votre mari vous avait trompée ?

    Moi ? Les yeux de Momsy se plissèrent jusqu’à ne plus faire qu’une fente. Ah moi, je lui aurais arraché les couilles avec mes dents et je les aurais jetées aux chiens !

    Ah vous voyez ! s’exclama Meredith, triomphante.

    Mais oui, bien sûr ! Seulement, après… Momsy sourit devant le regard intrigué de Meredith. Après, je lui aurais pardonné. Parce que, au final, vois-tu, Edward, c’était l’homme de ma vie. Je n’aurais pas pu aimer un autre que lui. Et je lui aurais fait greffer de nouvelles coucougnettes, parce que le sexe avec lui, c’était grandiose, ajouta-t-elle, malicieuse.

    Meredith ressentait exactement la même chose. Derek était sans conteste l’homme de sa vie et elle était certaine de ne plus jamais pouvoir aimer quelqu’un d’autre. Quant au sexe, oui, c’était fantastique. Mais l’amour, le désir, le plaisir, c’était une chose, la confiance en était une autre et pour elle, le tout était indissociable. Je sais que le sexe est important dans un couple, très important, commença-t-elle à expliquer. Et faire l’amour avec Derek… Elle releva vers sa confidente un regard embarrassé. Evidemment, je n’ai aucun point de comparaison. Pourtant, je sais que ce que j’ai vécu avec lui à ce niveau était exceptionnel. Mais ça ne me suffit pas, Momsy. A quoi ça sert qu’il soit un dieu dans mon lit s’il l’est dans tous les autres ?

    Ça, j’ai des doutes, tu vois, répliqua Momsy en se rappelant ce que Derek lui avait dit au sujet de ses infidélités. En tout cas, ce n’est pas ce qu’il m’a dit.

    Qu’est-ce qu’il vous a dit ?

    Que tu l’avais comblé au-delà de ce qu’il espérait. Qu’il n’avait pas couché avec ces filles par désir mais par peur. Avec ce qu’il a vécu, ça peut se comprendre, décréta Momsy.

    Oh vous, vous lui trouvez toujours toutes les excuses, lui reprocha Meredith avec agressivité.

    Et toi, tu es en colère, fit remarquer Momsy avec un grand sourire.

    Bien sûr que je suis en colère ! cria Meredith en sautant sur ses pieds. Je lui ai tout donné, poursuivit-elle d’un ton légèrement plus calme, en tournant en rond dans la pièce. J’ai toujours fait tout ce qu’il voulait. J’ai commencé cette relation avec des a priori, je l’avoue. Il y avait des trucs qui ne m’emballaient pas, que je n’avais pas envie de faire, mais que j’ai fait quand même, parce que je savais qu’il aimait ça – la façon dont elle exprimait les choses fit sourire Momsy – justement pour qu’il n’ait pas besoin d’aller se les faire faire ailleurs. Et la première pétasse qui passe… Meredith s’arrêta un instant devant Momsy. Vous me parlez d’amour, de sexe, mais le respect et la confiance, vous en faites quoi ? Moi, je ne peux pas avoir une vraie relation sans ça.

    Momsy regarda avec tendresse la jeune fille qui revenait s’agenouiller devant elle. Cette petite avait des principes et cela lui plaisait. Elle comprenait maintenant plus que jamais ce qui avait tant séduit Derek. Ne te méprends pas, Meredith. Je ne suis pas en train de te dire que ce que Derek a fait n’a pas d’importance et que tu dois l’accepter sans broncher. Pas du tout ! Elle passa affectueusement sa main sur la longue chevelure blonde. Seulement, je pense qu’il faut que tu fasses la part des choses. Il a fait une erreur, c’est vrai, mais ça ne veut pas dire qu’il recommencera. Il faut que tu réfléchisses, que tu réfléchisses bien. Parce que s’il est vraiment l’homme de ta vie et que tu ne lui donnes pas sa chance, tu risques bien d’être malheureuse le reste de tes jours.


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  • Au volant de son pick-up, Jackson suivait tranquillement la route sinueuse qui le ramenait, lui et ses camarades, à l’Hacienda. L’horloge du tableau de bord indiquait que le jour allait bientôt se lever. Le jeune homme pensa qu'il aurait juste le temps de prendre une douche et de se changer avant de commencer à s’occuper des animaux. Dire qu’à cette heure, il aurait pu encore être bien au chaud, sous la couette. Pourquoi diable avait-il cédé aux supplications de Taylor de les escorter, elle et Meredith, à cette soirée ? Il détestait ce genre de manifestations dans lesquelles il se sentait toujours en décalage. Il ne buvait pas d’alcool et ne dansait pas plus. Il n’appréciait pas vraiment la musique qu’on y jouait et le fait de devoir hurler pour se faire entendre l’incitait à ne pas entamer de conversation. Forcément, il ne sortait pas dans le but de rencontrer des filles et, à moins d’aller dans des bars gays, qu’il évitait aussi au demeurant, à cause de leur côté ghetto, il s’interdisait de draguer les garçons pour ne pas déclencher des réactions hostiles. Quant à jouer les chaperons, cela le mettait mal à l’aise car il discernait difficilement les situations où son intervention était nécessaire. En résumé, il se sentait beaucoup plus dans son élément à l’écurie, en compagnie des chevaux, que dans ce genre de réunion.

    Je n’avais pas réalisé qu’il était si tard, dit Meredith en le regardant d’un air confus. Tu aurais dû nous obliger à rentrer plus tôt.

    Hé ça va pas ! s’écria Taylor. J’ai passé une très bonne soirée, moi.

    Quoi, avec ton bouseux, là ? se moqua Jackson.

    Super bouseux même, renchérit la jeune fille. Mais il a payé toutes mes consommations. Grâce à lui, je n’ai pas dépensé un cent. Alors, on ne le critique pas !

    Le sourire de Jackson se teinta d’ironie. A quoi ça tient, une bonne soirée, tout de même. Je t’ai connue plus exigeante en matière de mec.

    Ah mais je le suis toujours, assura Taylor. Plus que jamais même. Je me suis fixé un but et je vais l’atteindre. Très bientôt !

    Ah ! Et on peut savoir ce que c’est ? demanda le jeune métis, curieux de savoir quelle nouvelle lubie avait encore frappé la fantasque adolescente.

    Mark Sloan ! Consciente qu’elle allait susciter leur désapprobation, Taylor se redressa et défia du regard ses deux compagnons de voyage.

    Meredith choisit de se taire. Elle avait déjà fait connaître son point de vue sur le sujet, autant à Taylor qu’à Mark. Ce dernier était venu passer le dernier week-end chez sa grand-mère et Meredith avait assisté aux multiples tentatives de séduction dont il avait fait l’objet de la part de l'adolescente, du moins dès que Momsy avait le dos tourné. Certes, il avait promis à Meredith de rester d’une sagesse exemplaire mais elle avait de sérieux doutes. Elle avait surpris quelques regards, entendu quelques phrases qui ne prêtaient à aucune équivoque. Mark trouvait Taylor plus qu’à son goût et la morale ne serait sans doute pas suffisante pour l’empêcher de succomber à la tentation. Quant à Taylor… eh bien, Meredith venait d’avoir la preuve que leur conversation n’avait eu aucun effet sur elle.

    Jackson se renfrogna. Sloan ? Tu fais la sortie des maisons de retraite maintenant ? grommela-t-il.

    Meredith est sortie avec Derek qui a le même âge que Mark et tu ne lui dis rien, à elle, objecta Taylor.

    Premièrement, je ne connais pas assez Meredith pour me permettre de lui faire des remarques sur sa vie privée, fit sèchement remarquer Jackson. De plus, elle est majeure, ce qui n'est pas ton cas. Il connaissait Taylor depuis qu’elle était toute gamine et il la considérait un peu comme sa petite sœur. Il n’avait déjà pas vu d’un bon œil qu’elle sorte avec son frère Nick, alors, qu’elle s’intéresse à ce don juan de Mark Sloan l’énervait considérablement. Il n’y avait pas grand-chose qu’il appréciait chez cet homme-là, même s’il était conscient que son jugement était plus que certainement influencé par leur histoire commune.

    Oh c’est bon, Jackson, tu me fais chier avec tes leçons de morale. De toute façon, quand on aime, l’âge ne compte pas ! déclara Taylor avec emphase.

    Jackson ricana. Quand on aime ? J’ai dû rater un épisode, je pense. Depuis quand Sloan est-il amoureux de toi ?

    Depuis qu’il m’a vue, quand il a amené Meredith, affirma la jeune fille. J’ai tout de suite compris que je lui plaisais vachement.

    Cette fois, Meredith se sentit obligée d’intervenir. Tu sais, je connais plutôt bien Mark, et avec les filles… enfin, je veux dire, c’est rare quand elles ne lui plaisent pas.

    T’es gentille. Avec lui, tout est bon ! C’est pire qu’une poubelle, ce mec, aboya Jackson.

    Meredith le regarda avec un air surpris. D’habitude si calme, presque philosophe, le jeune homme se montrait carrément agressif, et même insultant. Elle réalisa alors que, pendant tout le temps que Mark était resté à l’Hacienda, Jackson s’était fait plus que discret, comme s’il avait voulu éviter de le croiser. Elle en conclut que les deux hommes ne s’entendaient guère et elle se promit de se renseigner discrètement auprès de Momsy pour en connaitre la raison. Tu exagères, dit-elle doucement. Mais bon – elle se tourna vers Taylor – ce n’est pas parce que tu lui plais qu’il est amoureux.

    Mais merde ! éructa Jackson. Qu’il soit amoureux ou pas, on s’en fout. Il est beaucoup trop vieux pour toi, martela-t-il à l'intention de Taylor. Vous deux, ce serait indécent.

    Mais Meredith a juste quatre ans de plus que moi, rappela Taylor, au bord des larmes, parce qu’elle ne comprenait pas l’acharnement de celui qui avait toujours été si bienveillant avec elle. C'est pas énorme, quatre ans.

    Jackson lui jeta un regard dur. Tu calcules mal. C’est pas entre Meredith et toi que ça compte, mais entre Sloan et toi, et là, il y a dix-huit ans d’écart. Ça, oui, c’est énorme ! Il pourrait être ton père, nom de dieu ! grogna-t-il entre ses dents.

    A nouveau, Meredith opta pour le silence. Elle n’était pas d’accord avec Jackson mais elle ne voulait pas avoir l’air d’encourager la lycéenne dans ses chimères. Elle était la première à douter d’une réelle relation entre cette dernière et Mark, pour toute une série de raisons, mais l’âge n’en faisait pas partie. Sa propre expérience la poussait à approuver Taylor sur un point : quand on aimait, l’âge n’avait aucune importance. Concernant sa relation avec Derek, c'était un paramètre qu'elle n'avait jamais pris en considération, premièrement parce que, physiquement, Derek était loin de paraître ses trente-cinq ans et que pour le reste, il se conduisait souvent comme un gamin. Ses caprices, ses sautes d’humeur, sa fougue, tout chez lui était plus caractéristique de l’enfant que de l’homme. Elle avait souvent eu l’impression d’être la plus adulte des deux. Et puis, elle était tombée amoureuse de lui, tel qu’il était. Qu’importaient les années quand on était en phase avec la personne ?

    Pendant qu’elle réfléchissait à sa propre situation, la discussion avait continué sans qu’elle y fasse attention et, manifestement, Taylor n’avait pas désarmé, vu la réaction de Jackson dont l’éclat de voix fit sursauter Meredith. Oh et puis merde, fais ce que tu veux ! De toute façon, il te jettera dès qu’il t'aura sautée. J’t’aurais prévenue, alors faudra pas venir te plaindre.

    Mais oui, c’est ça, rétorqua Taylor sur un ton ironique, car elle était absolument convaincue qu’une fois qu’elle aurait pris Mark dans ses filets, il ne pourrait plus et ne voudrait plus s’en dégager.

    Pfft ! Arrêtez de vous disputer, intervint Meredith, excédée. On a passé une bonne soirée tous les trois. C’est dommage que ça se termine comme ça.

    C’est pas moi qui ai commencé, ronchonna Taylor, ce qui provoqua un ricanement sarcastique de la part de Jackson.

    Bon, ça suffit, vous deux, ordonna Meredith. Quoiqu’il en soit, Momsy a vu clair dans ton jeu, lança-t-elle à Taylor. Et comme elle connaît bien Mark, elle lui a fait promettre qu’il ne s’approcherait pas de toi.

    Voilà qui règle l’affaire ! claironna Jackson. Sloan était un sale type mais il fallait lui reconnaître une qualité, il adorait sa grand-mère, il la respectait et il ne ferait jamais rien qui puisse la contrarier ou la décevoir. S’il lui avait promis de ne pas toucher Taylor, il respecterait sa parole.

    Refusant de croire que tous ses espoirs venaient de s’évanouir, l’adolescente haussa ostensiblement les épaules. Dans un peu plus d'un an, elle entrerait à l’université de Californie. Autrement dit, elle passerait le plus clair de son temps à San Francisco. A partir de ce moment-là, Momsy ne pourrait plus faire grand-chose pour l’empêcher de fréquenter son petit-fils chéri. Mais, en attendant, Taylor n’avait pas envie de laisser le dernier mot à Jackson. Au lieu de t’occuper de mes affaires de cœur, tu ferais mieux d’arranger les tiennes. Y a assez à faire.

    Meredith vit la mâchoire de Jackson se contracter. Quelques jours plus tôt, les murs de l’écurie avaient tremblé des éclats de la dispute qui avait opposé le régisseur de l'Hacienda à son petit ami. Toutes les personnes présentes dans les environs l'avaient entendu reprocher à Jonas de ne pas avoir le courage d'assumer leur relation. Le ton était monté et les deux hommes s’étaient quittés fâchés. A voir la réaction de Jackson à la suite de la remarque de Taylor, il paraissait évident qu’il n’y avait pas eu de réconciliation depuis. Meredith foudroya Taylor du regard. C’est méchant, ce que tu viens de dire. A nouveau, la jeune fille haussa les épaules avant de se tourner vers la vitre, faisant semblant de s’absorber dans la contemplation d’un paysage que, pourtant, elle connaissait par cœur. Meredith préféra s’en désintéresser pour faire la conversation à Jackson. Il ne t’a toujours pas donné de nouvelles ?

    Non et je n’en attends pas, affirma le jeune homme, péremptoire.

    Il faut sans doute que tu lui laisses un peu de temps, suggéra Meredith avec douceur.

    Jackson secoua la tête avec obstination. Du temps ? Je lui en ai déjà assez donné. C’est fini. Il se pencha légèrement pour regarder en direction de Taylor. Tu vois, ça, c’est ce qui se passe quand il y a une trop grande différence d’âge dans un couple. On n’a pas les mêmes envies, les mêmes attentes et ça foire. Taylor ne releva pas.

    Meredith sourit. Quels qu’ils soient, quel que soit leur âge ou leur origine, tous les hommes avaient quelque chose en commun : leur mauvaise foi ! Tu caricatures, là. Il n’y a pas une si grande différence entre Jonas et toi. Et puis… – elle réfléchit quelques instants à sa propre histoire – je crois que c’est plus une question de maturité que d’âge. Regarde, Derek, il a quinze de plus que moi et pourtant, c’est lui qui s’est conduit comme un adolescent. C’est lui qui a eu peur de s’engager, pas moi. Tu ne peux pas faire de généralités, Jacks.

    L’occasion était trop belle pour que Taylor la laisse passer. Et toc ! répliqua-t-elle avec énergie.

    Jackson ignora sa remarque. Je ne peux pas juger pour toi et Derek, Meredith. Tout ce que je sais, c’est que, moi, je ne veux plus d’un mec qui n’assume pas ce qu’il est.


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  • Meredith fit une légère moue. Ben, ça ne doit pas être évident tout de même.

    Quoi ? D’être pédé ? demanda Jackson avec agressivité.

    Oui, répondit franchement Meredith. Je sais que les mentalités ont évolué et pourtant… L’homosexualité reste un délit dans plusieurs états de ce pays, Jacks. On est au vingt-et-unième siècle et on vit en Californie, qui est connue pour sa tolérance, mais il y a tout de même cinquante-deux pour cent des électeurs qui se sont prononcés contre le mariage gay. Révoltée, elle commença à parler plus fort et plus vite. Et il y a seulement deux ans, cet adolescent qui a été assassiné en plein cours par un de ses camarades, uniquement parce qu’il affichait ouvertement son orientation sexuelle ! Ça a peut-être été facile pour toi, Jackson…

    Il l’interrompit, le regard douloureux. Facile ? Tu le crois vraiment ? La patrie des homos, c’est à San Francisco, Meredith, dans les milieux branchés, pas ici, s’emporta-t-il soudain. Je ne compte plus le nombre de fois où je me suis fait traiter de tapette, pédale et autres amabilités du même genre. Je t’épargne le couplet sur ma couleur de peau, hein ! Et ça, encore, c’était un moindre mal. Certains soirs, je suis rentré couvert de sang, parce que ça divertissait certains petits cons de casser du pédé. Enervé par ces mauvais souvenirs, il serra ses mains sur le volant si fort que Meredith crut que les jointures de ses doigts allaient éclater. J’étais encore un gamin quand j’ai compris de quoi ma vie serait faite, poursuivit-il. Il avait douze, treize ans quand il avait pris conscience qu’il était bien plus troublé par la nudité des garçons avec lesquels il prenait sa douche, après le cours de sport, que par celle des filles qui s’étalaient dans les magazines que ces mêmes garçons aimaient regarder entre les cours. C’était aussi dans les douches du collège qu’il avait entendu toutes ces blagues homophobes qui lui avaient fait comprendre ce qui l’attendait. Pendant longtemps, je me suis demandé si ce ne serait pas plus facile de me cacher, expliqua-t-il à Meredith. Mais cela aurait impliqué que je vive dans le mensonge et ça, il n’en était pas question. Alors, j’ai assumé et je me suis imposé, parfois à la force de mes poings. Ça n’a pas été évident, crois-moi, mais c’était le prix à payer pour pouvoir être moi-même.

    Meredith le considéra avec étonnement et confusion aussi. Jamais elle n’aurait pu imaginer que Jackson avait été victime d’homophobie ou de racisme. A le voir, épanoui et serein, elle avait supposé qu’il avait grandi dans l’harmonie et la tolérance. De toute évidence, c’était loin d’être le cas. J’ai encore perdu une occasion de me taire, on dirait, dit-elle avec une intonation gênée.

    C’est rien, la rassura Jackson avec un sourire empreint de gentillesse. Tu ne pouvais pas savoir. Il fixa un instant la route, réfléchissant encore à toutes ces épreuves qu’il avait traversées pour avoir le droit d’être lui. Tu sais, je comprends que ça ne soit pas facile pour Jonas mais… j’ai vingt-sept ans, Meredith. Je ne me suis jamais caché et je n’ai pas envie de commencer, même pour lui. S’il ne m’aime pas assez pour surmonter ses peurs, eh bien, alors, tant pis. C’est qu’il n’est pas fait pour moi. Meredith hocha doucement la tête. Voilà un sujet qu’elle connaissait bien. C’était aussi à cause des peurs qu’il n’avait pu surmonter que Derek lui avait fait du mal. Parce qu’il ne l’aimait pas assez ? Peut-être bien. Peut-être qu’il n’était pas fait pour elle, après tout.

    Taylor, qui était restée muette dans son coin, se redressa. Moi, je comprends que Jonas ait peur de lâcher le morceau. Qui n’aurait pas peur avec un père comme le sien ?

    Il n’a pas peur de son père, rectifia Jackson, bougon. Il a peur de le décevoir.  

    Et quand on connaît le Marshal Hunt, on sait que c’est ce qui va se passer, lâcha Taylor. Ça va le tuer d'apprendre que son fils est gay.

    C’est horrible de décevoir ses parents, murmura Meredith. Elle-même ne s’était jamais résolue à avouer à sa mère qu’elle sortait avec Derek. Celui-ci ne correspondait en rien à l’image qu’Anna Grey se faisait du gendre idéal. Avec sa voiture de sport, ses goûts de luxe, son mode de vie et sa conception très particulière du couple, le chirurgien lui serait apparu comme un bellâtre superficiel et dépravé et elle n’aurait pas compris que sa fille puisse en tomber aussi follement amoureuse, sans parler de la différence d’âge. Meredith se tourna vers Jackson avec des yeux suppliants. Laisse-lui une chance.

    Comme toi avec Derek ? railla Taylor, décidée à se venger pour toutes les remarques malvenues qu’on lui avait faites au sujet de Mark. Elle répondit par un grand sourire au regard noir de Meredith.

    Ça n'est pas comparable, riposta cette dernière.

    Vous en êtes toujours au même point, tous les deux ? s’enquit Jackson avec sollicitude.

    Meredith acquiesça. Voilà plus d’une semaine déjà que Derek avait débarqué à l’Hacienda et, malgré les conseils et encouragements de Momsy, elle n'avait pu se décider à prendre contact avec lui. Elle s’était contentée de lui envoyer un texto lui demandant de ne plus chercher à la voir, pour le moment du moins. Elle avait besoin de temps pour digérer ce qui s’était passé. Lors de son séjour, Mark lui avait appris que Derek avait été dévasté par son message. Il avait espéré qu’elle lui laisserait au moins une chance de s’expliquer. Elle avait promis d’y penser. C’était tout ce qu’elle était capable de faire pour le moment. J’ai tellement peur de me faire avoir encore une fois, avoua-t-elle dans un souffle.

    Si je peux me permettre, commença Taylor.

    Non, dirent en chœur les deux autres.

    M’en fous ! répliqua la lycéenne en leur tirant la langue. Je vais me permettre quand même. Le jour où Derek est venu, il m’a donné l’impression d’un homme qui jouait sa vie, dit-elle en s’adressant à Meredith. Quand il a dû repartir sans t’avoir vue, il a supplié Momsy de te dire qu’il t’aimait comme un fou et qu’il regrettait terriblement le mal qu'il t'avait fait.


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  • Je ne crois pas que Derek Shepherd s’abaisserait à ça pour une fille à laquelle il ne tiendrait pas, fit remarquer Jackson.

    Peut-être. Meredith baissa la tête pour cacher son émotion. Tous les témoignages étaient unanimes. Leur rupture avait rendu Derek malheureux comme les pierres. Il regrettait ses erreurs et était bien décidé à se faire pardonner. Dans les nombreux textos qu’il continuait malgré tout de lui envoyer, comme dans les messages qu’il lui laissait quotidiennement sur la boite vocale de son téléphone, il ne cessait de lui crier son amour. C’était tendre, c’était désespéré, c’était beau, c’était tout ce qu’elle avait envie d’entendre mais elle ne savait toujours pas si elle pouvait y croire. Sa méfiance restait plus forte que tout. Sa peur aussi. Elle avait tellement souffert en réalisant que Derek n’était pas le prince charmant qu’elle avait imaginé. Si elle décidait de lui donner une autre chance et qu’il la déçoive encore une fois, elle n’y survivrait pas.

    En tout cas, moi, à ta place, je sais ce que je ferais, déclara Taylor d’un ton sans réplique.

    Jackson fit un clin d’œil en direction de Meredith. Je suis curieux d’entendre ça.

    La jolie lycéenne les dévisagea avec un air supérieur. Je repartirais dare-dare à San Francisco, j’irais sonner chez Derek et je lui apprendrais ce que c’est qu’une vraie réconciliation sur l’oreiller.

    Les deux autres pouffèrent de rire. C’était amusant de voir cette jeune fille jouer les femmes expérimentées. Je doute que tu aies quoi que ce soit à apprendre à Derek Shepherd, surtout en ce domaine, plaisanta Jackson. Meredith eut un sourire entendu. Oui, pour tout ce qui concernait le sexe, Derek n’avait de leçon à recevoir de personne.

    Taylor jeta les yeux au ciel. Toujours est-il que si j’avais la chance de connaître un mec comme celui-là, je ne perdrais pas mon temps dans ce bled. J’irais m’éclater avec lui. Elle regarda Meredith d’un air sévère. En plus, c’est pas le genre de gars qu’on laisse tout seul aussi longtemps, Mer. Tu joues un jeu dangereux.

    Ça veut dire quoi, ça ? demanda Jackson, le front barré de plis.

    Ça veut dire que ce mec est canon, Jacks, s’égosilla Taylor. Il était déjà sexy sur les photos de Momsy, mais maintenant… maintenant, il est torride, s’exclama-t-elle. Tu le verrais… Il est… tellement… tellement… Elle soupira. Il a de ces yeux… d’un bleu et son sourire ! Celui de la jeune fille était extatique et son regard brillait. Meredith sentit l’énervement la gagner. Elle était bien consciente de l’effet que Derek avait sur les femmes mais le constater en direct, c’était difficilement supportable, surtout compte tenu des circonstances. Cela lui rappelait que, si elle décidait de renouer avec lui, il lui faudrait supporter ce type de comportement au quotidien et elle doutait d’y arriver. Elle se tassa sur son siège, l’air contrarié. Tu vois ce mec, t’as envie de coucher avec lui, j’te jure, Jackson, conclut Taylor, toujours aussi exubérante.

    Le jeune homme sourit. Ah ça, je veux bien te croire. D’après le témoignage de Taylor, les années n’avaient pas nui au charme de ce cher Derek, que du contraire. Il semblait avoir fait autant d’effet à la lycéenne qu’il lui en avait fait douze ans plus tôt. Si je me souviens bien, il était plutôt… pas mal.

    Pas mal ? Ben, oublie tes souvenirs. Ça n’a plus rien à voir ! s’enthousiasma la jeune fille d’une voie aigüe. Ce mec est une tuerie. Moi, il ne devrait pas me le demander deux fois.

    Cette fois, Meredith ne put plus se taire. Hé, ça va, vous deux ? Je ne vous dérange pas ? C’est de mon copain dont vous êtes en train de parler.

    Taylor et Jackson la corrigèrent de concert. Ton ex-copain.

    Ouais, ben, peu importe, grogna-t-elle. Ex ou pas, il n’est pas pour vous. On ne vous a jamais dit que ça ne se faisait pas de vouloir sortir avec l’ex petit-ami d’une amie ?

    Non, répondirent-ils en riant. T’es au courant de ça, toi ? feignit de s’inquiéter Jackson. Taylor lui répondit en faisant de grands hochements de la tête, les yeux écarquillés, comme si elle venait d’entendre une insanité. Puis, il est célibataire, non ? insista le jeune homme. Il est libre de faire ce qu’il veut, il me semble.

    Ta gueule ! laissa échapper Meredith, au comble de l’énervement.

    C’était tellement incongru dans sa bouche que ses deux camarades éclatèrent de rire. Bon, ben, maintenant, c’est clair, décréta Taylor, une fois son hilarité calmée. Meredith et Derek, c’est pas fini.

    Pour le moment, si, répliqua Meredith. Et ça le sera tant que je ne serai pas sûre que je peux lui faire confiance.

    Ce n’est pas en restant cachée ici et en l’évitant que tu vas le savoir, souligna Jackson. Tu ne crois pas que ce serait mieux pour vous deux de vous voir et de mettre tout à plat ?

    Je ne sais pas, répondit Meredith d’une toute petite voix. Peut-être bien. Elle savait, bien sûr, qu’elle ne pourrait pas profiter éternellement de l’hospitalité de Momsy, qu’il lui faudrait un jour affronter la réalité, c’est-à-dire Derek. Mais elle voulait rester à l’abri encore un peu. Elle l’aimait encore. Elle l’aimait tellement qu’elle redoutait qu’une fois en face de lui, elle n’ait plus la force d’être en colère. Or cette colère était la seule chose qui la retenait de rentrer à San Francisco et de se jeter dans les bras de celui qui lui avait fait tant de mal. Rester à Santa Rosa lui permettait d’entretenir cette colère et de ne pas pardonner. Rester à Santa Rosa lui permettait de ne pas perdre la face.


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  • Meredith regarda Taylor entrer dans la maison, après leur avoir adressé un dernier signe de la main. Tu crois qu’on a réussi à la convaincre, pour Mark ?

    Jackson fit un signe de dénégation. Non. Quand elle a une idée en tête, elle ne l’a pas ailleurs. Elle sait qu’elle lui plait, regretta-t-il avec une expression de dégoût sur le visage. Dès qu’il remettra les pieds ici, elle passera à l’attaque.

    Meredith souffla de dépit. Pfft ! Ça promet ! Déjà que j’ai passé mon week-end à les coller, pour éviter qu’ils se retrouvent en tête-à-tête. Je connais des façons plus agréables de passer son temps.

    Pourquoi tu fais ça ? s’étonna le jeune homme. Ils n’ont qu’à se débrouiller après tout.

    J’ai pas vraiment envie de voir Mark derrière des barreaux, figure-toi, répliqua Meredith.

    Jackson lui sourit. Ça n’arrivera pas. Si Sloan ne craint pas la taule, il a peur de sa grand-mère. Il ne franchira pas certaines limites.

    Meredith soupira. On n’a plus qu’à l’espérer. Tu ne l’aimes pas beaucoup, hein ! lui dit-elle dans l’espoir qu’il lui révèlerait les dessous de son histoire avec Mark.

    Non, pas beaucoup, reconnut-il. Et c’est réciproque. On n’a pas grand-chose en commun, lui et moi. C’était faux, et il le savait. Il était étroitement lié à Mark Sloan et c’était précisément la cause de leur inimitié.

    A son air fermé, sa camarade comprit qu’il ne lui en dirait pas plus. Bon, je vais aller me coucher. Toi, essaie d’aller dormir un peu, tout de même, lui conseilla-t-elle en sautant en bas du pick-up.

    Il fit la grimace. Si je vais me coucher maintenant, je n’aurai plus le courage de me lever quand il sera l’heure. Alors, autant continuer sur ma lancée.

    Après l’avoir salué d’un sourire, Meredith referma la portière. Elle regarda la voiture s’éloigner avant de se diriger vers la maison. Jackson était vraiment un chouette garçon, attentif aux autres et de bon conseil. Elle se sentait en confiance avec lui. Elle n’avait peut-être pas de chance en amour mais en revanche, elle avait le nez fin pour ce qui était de choisir ses amis, du moins depuis qu’elle avait débarqué à San Francisco. Mark et puis Jackson… Etonnant d’ailleurs que ces deux-là ne s’entendent pas. Meredith, votre prochaine mission, si toutefois vous l’acceptez, sera de réconcilier ces deux hommes, chuchota-t-elle en parodiant la série "Mission Impossible".

    Elle entra dans la maison encore endormie et avança sur la pointe des pieds dans le couloir qui menait à sa chambre. En passant devant celle de Momsy, elle vit qu’un rai de lumière filtrait en-dessous de la porte. Rien d’étonnant à cela. Momsy était insomniaque et elle passait le plus clair de ses nuits à bouquiner ou à regarder de vieux films. Je vais la prévenir qu’on est rentré, se dit Meredith. Elle frappa deux petits coups mais n’obtint pas de réponse. Elle ouvrit précautionneusement la porte, s’efforçant de faire le moins de bruit possible, et passa sa tête dans l’entrebâillement. Elle aperçut alors, éclairée par un rayon de lune, la silhouette de la vieille dame, assise dans son fauteuil qui était tourné vers la fenêtre dont les rideaux n’étaient pas tirés. A côté, par terre, gisait un album photo. Meredith entra et referma derrière elle. Momsy ? chuchota-t-elle, au cas où son hôtesse serait endormie. Il n’y eut pas de réaction. Momsy, redit-elle à peine plus fort, en déposant son sac à l’entrée de la pièce. N’obtenant toujours pas de réponse, elle souffla en secouant la tête. Vous n’êtes pas raisonnable tout de même, maugréa-t-elle entre ses dents, en avançant à pas de loup, de peur de réveiller trop brusquement Momsy. Regarder des photos jusqu’à pas d’heure et vous endormir dans votre fauteuil, à votre âge ! Vous seriez mieux dans votre lit tout de même. Elle arriva près de l’aïeule dont la tête était légèrement inclinée en arrière, un doux sourire flottant sur ses lèvres. La jeune fille la regarda avec tendresse. Peut-être rêvait-elle de ses jeunes années à Hollywood ou, plus vraisemblablement, d’Edward, sujet qu’elle s’était plu à évoquer souvent, ces derniers jours, pour le plus grand plaisir de sa jeune amie.

    Après avoir ramassé l’album qui était resté ouvert sur les images de ce bonheur passé, Meredith hésita un instant sur ce qu’il convenait de faire. Momsy dormait si bien que c’était dommage de la déranger. Mais d’un autre côté, la laisser dans ce fauteuil, c’était lui assurer de douloureuses courbatures. Ce fut à contrecœur qu’elle se décida à la réveiller. Momsy, appela-t-elle à voix basse, en posant sa main sur le bras de l'endormie pour la secouer doucement. La tête de Momsy tomba sur son épaule sans que l’expression de son visage ne change en rien. Meredith se sentit blêmir. Refusant de croire à ce que son instinct lui disait, elle parla un peu plus fort, en intensifiant sa pression. Momsy. Cette fois, ce fut tout le buste de la vieille dame qui s’affaissa. Momsy, répéta la jeune fille bien que convaincue maintenant qu’elle n’obtiendrait plus jamais de réponse. Et pourtant, elle ne pouvait s’y résoudre. Momsy, je vous en prie, non, se mit-elle à supplier, en commençant à pleurer. Ne me laissez pas. Vous ne pouvez pas. Pas encore. Revenez, Momsy. J’ai encore besoin de vous. Et Mark aussi. Pensez à lui. Mais Momsy était déjà partie et plus rien ne pourrait la ramener. Meredith le savait, il n’y aurait pas de miracle. De grosses larmes roulant sur ses joues, elle marcha à reculons jusqu’à buter contre un tabouret, sur lequel elle se laissa lourdement tomber. Elle avait l’impression d’être seule au monde, comme orpheline. La vieille dame avait l’habitude d’évoquer son prochain départ et pourtant, Meredith n’avait jamais envisagé que cela se produise, pas si vite. Elle venait à peine de la rencontrer, elle avait encore tant de choses à apprendre d’elle. Mais c’était fini, il n’y aurait plus de soirée devant la télévision, plus de révélations sur les anciennes stars de cinéma, plus de débats sur les hommes et l’amour, plus de confidences. Tout cela appartenait déjà au passé.

    Meredith se releva péniblement, comme si elle avait tout le poids du monde sur les épaules. Le pire restait à venir : prévenir Mark que sa grand-mère chérie était partie pour un monde que l’on disait meilleur. Elle se traîna jusqu’à l’endroit où elle avait abandonné son sac et ramassa celui-ci pour y prendre son téléphone. Ses yeux étaient tellement noyés de larmes qu’elle dut se reprendre à trois fois pour composer le numéro.


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