• Agacée que le chirurgien la traite comme une enfant un peu niaise, Meredith se rebella. Mais je ne vous ai rien demandé ! rétorqua-t-elle. J’aurais très bien pu m’en sortir toute seule !

    Derek fit un sourire un peu narquois. Oh oui, je l’ai vu. Un peu plus et vous vous retrouviez par terre. Il fronça légèrement les sourcils. Et d’ailleurs, qu’est-ce que vous faites ici ? Votre boutique n’est pas encore ouverte que vous pensez déjà à vous reconvertir ? demanda-t-il avec une pointe de sarcasme. La moue boudeuse, la jeune fille leva légèrement les yeux au ciel. Si vous voulez mon avis, vous devriez rester dans la pâtisserie parce que vous ne me semblez pas très douée pour la librairie, poursuivit Derek. Encore que… - il fronça à nouveau les sourcils - si j’ai bien compris, vous connaissez Penthouse ? Il feignit d’être un peu choqué. Je n’aurais jamais cru ça de vous ! Vous en avez d’autres, des secrets comme ça ?

    Mais pour qui me prenez-vous ? lui lança Meredith, scandalisée. Je ne lis pas ce genre de cochonnerie !

    Vous devriez peut-être, c’est très instructif, plaisanta Derek. Elle le fusilla du regard. Il fit semblant d’avoir peur et recula d’un pas. Hé, ne me regardez pas comme ça ! J’étais venu pour acheter le dernier Playboy et maintenant, je n’ose pas vous le demander. Il fit un sourire qui lui donna un air fripon. Nous pourrions peut-être aller quelque part pour le lire ensemble. Je pourrais vous expliquer tout ce que vous ne comprenez pas.

    Meredith sauta en bas de son tabouret et se campa devant le médecin, les yeux brillants de colère. Docteur Shepherd, je ne suis sans doute pas aussi délurée que les femmes que vous avez l’habitude de fréquenter. Mais ce n’est pas parce que j’arrive de ma campagne que vous devez me traiter comme la pire des demeurées !

    Derek eut un rire espiègle. Demeurée ? Grand Dieux, non ! Je n’ai jamais pensé ça. Je vous trouve… juste encore un peu enfant, parfois. Mais n’y voyez aucune critique. Il la dévisagea effrontément. Dans votre campagne, on vous a déjà dit que vos yeux étaient magnifiques quand vous étiez en colère ? Elle rougit violemment et pour se donner une contenance, elle commença à ranger quelques revues. A nouveau, son air gauche et un peu honteux remua le médecin. Il abandonna son ton moqueur. Vous ne m’avez toujours pas dit ce que vous faisiez ici ? Et où est Alex ?

    Il fait quelques travaux dans la boutique, lui répondit-elle du bout des lèvres.

    Quel brave garçon ! s’extasia trop ostensiblement Derek.

    Meredith crut qu’il se moquait du marchand de journaux et elle prit aussitôt la défense de ce dernier. Mais oui, tout à fait. C’est quelqu’un de très serviable et d’aimable. Et il est rempli de charmantes attentions. Pas plus tard qu’hier, il offert des fleurs à Izzie.

    Surpris, Derek haussa les sourcils. Il a offert des fleurs ? demanda-t-il en insistant particulièrement sur le "il".

    Meredith opina de la tête. Oui, des tournesols si vous vous voulez tout savoir. Derek contracta légèrement la mâchoire. Quoi, il avait donné cinquante dollars pour des tournesols ? Et en prime, ce petit salaud d’Alex les avait offerts en son nom. Quoique dans le cas présent, il avait eu raison. Derek ne voulait pas qu’Izzie puisse penser qu’il était le genre d’hommes à faire un présent aussi minable. Il reporta son attention sur ce que disait Meredith. Il est vraiment très obligeant. Et depuis hier, il nous a vraiment bien aidés. Il a presque fini les peintures. S’il n’avait pas été là, jamais on n‘aurait autant avancé. En tout cas, quand je pense à ce qu’on lui donne pour faire les travaux, je trouve que ce n’est pas cher payé.

    Derek faillit s’étrangler d’indignation. Comment ça, ce que vous lui donnez ? Parce que vous le payez en plus ?

    Meredith le regarda d’un air outré. C’est le moins qu’on puisse faire quand même ! Tout travail mérite salaire, non ? Et ce n’est pas avec moi qui tiens son échoppe à sa place, qu’il va gagner sa vie. Je ne suis pas très douée, comme vous avez pu le voir, conclut-elle avec une certaine amertume.

    Et il vous demande cher ? s’enquit Derek, en essayant de camoufler son irritation.

    En fait, il n’a rien demandé, lui révéla Meredith. C’est moi qui ai voulu le payer, mais lui, il avait l’intention de travailler pour rien.

    Oui, c’est vraiment un brave garçon, ironisa Derek, ce qui lui valut un regard noir de la part de la jeune fille. Un client surgit et le chirurgien profita de ce que Meredith s’en occupait pour rentrer dans la boutique, avec l’intention de régler ses comptes avec Alex. La première chose qu’il vit fut les tournesols, fièrement dressés dans leur petit pot de plastique, qu’on avait posé sur un tabouret. Derek se rendit dans la pièce du fond et y trouva Alex qui était en train de mettre la dernière main à la peinture des plinthes. Alors, mon gars, tout va comme tu veux ?


    7 commentaires
  • Le jeune homme se tourna vers Derek, avec l’air satisfait de celui qui a fait un travail de première qualité. Ça va pas mal du tout, Docteur. J’avance bien. Il se releva.

    Derek jeta un coup d’œil à la ronde. Je vois ça, oui. Il prit son air le plus innocent. Et tu penses que ce que je t’ai donné va suffire ? Ou bien il va falloir une petite rallonge ?

    Alex grimaça, comme s’il était embêté. Ben, c’est que… finalement, ça prend plus de temps que je n’aurais cru. Et la gamine dehors, elle est gentille, pleine de bonne volonté et tout ça, mais elle n’est pas très douée. Rien que sur la journée d’hier, j’ai un sacré manque à gagner. Alors si ça continue… Il soupira. Je ne pourrai peut-être pas terminer les travaux… ou alors…

    Ou alors il faudrait que je te donne un supplément, conclut Derek, faussement compatissant.

    Ben, oui. Alex fit un geste de la main pour signifier que cela n’avait pas beaucoup d’importance. Mais bon, on reparlera de ça plus tard, Docteur. Je sais que je peux avoir confiance en vous.

    Et moi en toi, n’est-ce pas, Alex ? dit Derek sur un ton doucereux.

    Alex lui fit un grand sourire. Ça, c’est sûr, depuis le temps qu’on se connaît.

    Derek regarda autour de lui. Tiens, c’est bizarre, je ne vois pas mes fleurs. Il reporta son regard perçant sur Alex et remarqua que ce dernier semblait subitement mal à l’aise.

    Euh… non… Izzie a repris le bouquet à la maison, prétendit le jeune homme. Il était tellement énorme. Puis, vous comprenez, avec les travaux, il risquait de s’abîmer.

    Evidemment ! dit Derek, d’un ton convaincu. Evidemment… Enfin, ce qui est bizarre, c’est qu’elle ne m’ait pas remercié. Je m’attendais à un appel ou à un petit mot… et rien. Tu n’as pas oublié de dire que c’était de ma part, n’est-ce pas ? demanda-t-il d’un air candide.

    Alex posa sa main sur son cœur. Non, bien sûr. Mais bon, les femmes, ce sont de drôles d’oiseaux, vous le savez bien.

    C’en fut trop pour Derek. Quant est-ce que tu vas arrêter de me prendre pour un con ? explosa-t-il. Il ferma la porte de l’arrière-boutique pour que Meredith ne puisse pas les entendre.

    Le marchand de journaux, qui connaissait le caractère redoutable du chirurgien, prit peur. Mais… mais… qu’est… ce… que… vous… voulez… dire ? balbutia-t-il.

    Tu as vraiment cru que tu allais pouvoir m’entuber ? cria Derek. Comme Alex prenait l’air bête de celui qui ne comprend rien, il décida de le confondre. Je sais que tu as accepté de l’argent des filles pour les travaux, alors que je t’avais déjà payé, et grassement encore !

    Alex se fit tout petit. Je suis désolé, docteur, mais la vie est dure. C’est pas toujours facile de nouer les deux bouts.

    Et ça t’autorise à escroquer les braves gens ? riposta Derek. Que tu n’aies pas eu de scrupules avec moi, passe encore ! Je gagne bien ma vie et franchement, trois cents dollars de perdus, je n’en ai rien à foutre. Mais la petite, là, dehors ! dit-il en pointant le doigt en direction de la rue. Ça se voit qu’elle ne roule pas sur l’or. Et en plus, tu te fais payer mais tu lui fais faire ton boulot, enragea-t-il.

    Je suis désolé, répéta Alex. Je vais arranger tout ça.

    Et comment ! s’exclama Derek. Déjà, tu vas commencer par la rembourser.

    Alex prit un air catastrophé. Vous voulez que je lui dise pour…

    Derek le regarda avec mépris. Et lâche en plus ! Tu fais comme tu veux mais tu lui rends son pognon. Le mien, tu peux le garder. Alex ne put retenir un soupir d’aise.Derek s’approcha des murs pour les inspecter et repéra immédiatement quelques défauts. Dis donc, mais tu travailles comme un sagouin ! Tu ne crois pas que pour deux cents cinquante dollars, tu pourrais ne pas bâcler? Tu vas me faire le plaisir de rattraper ça.

    Alex se courba légèrement. Pas de problèmes, docteur, pas de problèmes. Je ferai comme vous voulez, promit-il. Dites… vous allez en parler au Dr Sloan… de ma bêtise ?

    Derek lui lança un regard plein de suspicion. Pourquoi veux-tu que je lui parle de ça ? Tout à coup, il comprit. Il t’a payé aussi, c’est ça ? Alex baissa la tête. Combien ? Alex se tut. Combien ? gronda Derek, hors de lui.

    Cent dollars… et cinquante pour des fleurs.

    Que tu n’as jamais achetées, je suppose. Derek avisa le pot de tournesol avec désolation. Espèce de crapule ! Rends-moi l’argent de mon ami. Il tendit la main. Alex sortit de sa poche des billets qu’il remit au chirurgien, sans oser le regarder. Tu as deux jours pour tout terminer, décréta Derek. Après, tu dégages ! Je ne veux plus jamais te voir dans le quartier, compris ! Alex fit signe que oui.

    En sortant de la boutique, Derek fut accueilli par une Meredith plus qu’enthousiaste. Il travaille super bien, n’est-ce pas ?

    Il vit son visage enfantin, transfiguré par la joie et l’excitation. Elle en était presque jolie. Il ne se sentit pas capable de détruire ses illusions. Super, oui ! Vous allez avoir le plus joli tea-room de San Francisco et vous en serez la plus charmante vendeuse. Ravie, elle lui sourit. Il ne put soutenir son regard rayonnant. Allez, je file. A la prochaine. Mal à l’aise sans trop savoir pourquoi, il courut plus qu’il ne marcha jusqu’à sa voiture et disparut dans les fumées des gaz d’échappement.


    9 commentaires
  • Meredith frappa un coup sec sur le réveil qui venait de la tirer de son sommeil. Un rapide coup d’œil vers le cruel appareil lui confirma qu’il était 5h30 ! Elle soupira. Il lui semblait qu’il y avait une éternité qu’elle n’avait pas dormi plus de cinq heures par nuit. Mais aujourd’hui, il y avait une excellente raison de se lever tôt sans râler. Le jour tant attendu de l’ouverture de Sweet Dream était arrivé. La jeune fille s’étira comme un chat avant de se rallonger sur le côté droit, le dos tourné à la fenêtre. Les yeux fixés sur le mur, elle pensa aux derniers évènements.

    Alex avait terminé les travaux dans la boutique en seulement deux jours. Lorsque Meredith avait voulu le payer, il avait refusé et même, il avait insisté pour lui rendre les cent dollars qu’elle lui avait déjà donnés. Le lendemain, son échoppe était restée fermée, ainsi que les jours suivants. Le marchand de journaux avait disparu, sans que personne ne sache pourquoi ni où il était parti. Cinq jours plus tard, l’échoppe avait rouvert avec un nouveau marchand, un homme d’une cinquantaine d’années prénommé Everett, qui n’avait jamais entendu parler de son prédécesseur. Cependant, Meredith et ses amis n’avaient pas eu le temps de s’appesantir sur cette histoire, compte tenu de tout ce qu’ils avaient eu à faire dans la boutique. Pendant que Cristina et George s’étaient chargés d’aller chercher les meubles choisis par Izzie, ainsi que tout l’électroménager, Meredith et Izzie avaient couru les brocantes pour trouver de quoi décorer la boutique. Ensuite, il avait fallu tout installer, tout défaire et tout réinstaller jusqu’au moment où, enfin, Izzie avait été satisfaite. Les deux derniers jours avaient été consacrés aux courses dans les magasins et marchés afin de réunir toutes les denrées dont elle allait avoir besoin.

    Meredith fronça le nez. Une délicieuse odeur de pâtisserie venait d’arriver à ses narines, signe qu’Izzie devait déjà être à pied d’œuvre depuis un bon moment. Cela voulait dire aussi qu’il était grand temps de se lever. Exceptionnellement, elle dérogea à son habitude de commencer sa journée en contemplant la ville de sa fenêtre, pour passer directement à la salle de bains. Mais elle compensa en restant longtemps sous l’eau chaude, profitant de ce moment privilégié pour penser à celui qui commençait à l’obséder. Après l’incident avec le client pornographe, le Dr Shepherd était passé tous les jours à la boutique, jetant un petit coup d’œil aux travaux, prenant des nouvelles de la santé de Meredith, la gourmandant de temps en temps quand il estimait qu’elle en faisait trop, le tout accompagné de quelques sourires éblouissants qui mettaient la jeune fille dans tous ses états. Mais petit à petit, la tendre sollicitude des débuts avait fait place à une indifférence presque totale. Par contre, le chirurgien avait commencé à faire preuve d’un grand empressement auprès d’Izzie. Il n’avait pas fallu longtemps pour que Meredith comprenne que ses visites n’avaient qu’un seul but, séduire la jolie blonde. Elle en avait éprouvé une grande tristesse mais aucune amertume. Izzie était tellement parfaite. Quel homme aurait pu rester de marbre devant elle ?

    C’est en grelottant un peu que Meredith sortit de la salle de bain. Elle se planta devant sa penderie et examina ses vêtements. Evidemment, ce n’était pas avec ses vieux jeans et ses tee-shirts beaucoup trop larges qu’elle pouvait prétendre rivaliser avec son amie. Mais de toute façon, ce n’était pas une jolie robe qui aurait changé quoi que ce soit à la situation. Comparée à Izzie, elle n’était rien et jamais elle ne pourrait séduire un homme comme le Dr Shepherd. Chassant ce dernier de ses pensées, elle sauta dans un pantalon, enfila un pull un peu plus présentable que les autres et noua ses cheveux avec une pince. Elle descendit l’escalier en courant et trouva ses amis en pleine effervescence. Izzie, encore plus éblouissante que d’habitude, disposait des gâteaux sur un plateau tout en faisant ses dernières recommandations. George, tu portes ce plateau dans la voiture. Et tu fais attention ! J’ai passé la moitié de la nuit à confectionner ces muffins à la myrtille. Cristina, tu as bien tous les prospectus ? Oui ? Bon, très bien, alors, je crois qu’on va pouvoir y aller.

    Le trajet jusqu’à Marina Boulevard se fit dans une ambiance plus que tendue. Ils étaient tous morts de peur à l’idée que leur entreprise pourrait n’avoir aucun succès. Un échec impliquerait un retour définitif à Crestwood et ça, aucun des quatre ne voulait ni ne pouvait l’envisager. Lorsque la voiture s’arrêta devant la boutique, personne ne descendit. Izzie, qui était assise à la place du passager avant, se tourna vers ses camarades. Voilà… C’est le grand jour, murmura-t-elle. Avant qu’on commence, je voulais vous remercier d’avoir accepté de m’aider dans cette aventure. Vous m’avez fait confiance et ça signifie beaucoup pour moi. J’’espère que cette boutique va marcher mais si ce n’est pas le cas, ce ne sera pas grave, parce que je sais que je vous aurai toujours dans ma vie. Vous serez toujours mes meilleurs amis.

    Les yeux embués de larmes, Meredith se pencha vers l’avant pour saisir la main d’Izzie et la serrer dans la sienne, tandis que George, dont le sourire était mal assuré, posait sa main sur l’épaule de sa cousine. Si on pouvait éviter la scène de pleurs collectifs, ce serait sympa, ronchonna Cristina, qui n’appréciait pas ces démonstrations d’amitié. Ils descendirent du véhicule et commencèrent à décharger le coffre. Izzie et Meredith s’occupèrent ensuite de disposer les différents gâteaux dans le présentoir et dans les vitrines, pendant que Cristina et George sortaient la terrasse. Lorsque tout fut prêt, Cristina décida de mettre à profit l’heure qui leur restait avant l’ouverture, pour discuter du déroulement des opérations. Ce matin, Izzie et moi, on va rester ici pour accueillir les clients, les servir et aussi regarnir le présentoir au fur et à mesure. Et pour vous deux… - Cristina fit un grand sourire à Meredith et George – j’ai pensé à quelque chose cette nuit. Notre clientèle, ça va être quoi ? Les gens du quartier bien sûr, les profs de l’école Montessori, le personnel du bureau de poste, mais surtout, ça. Elle pointa le doigt en direction du Golden Health Center. Est-ce que vous vous rendez compte de l’énorme potentiel que cette clinique représente pour nous ?  


    7 commentaires
  • Entre le personnel, les familles des patients et les visiteurs, il y a beaucoup d’argent à se faire, poursuivit Cristina.

    Oui mais le personnel a déjà ses habitudes ailleurs, intervint Meredith. Et notamment, dans la boutique qui est un peu plus bas dans la rue, "Chez Miranda". Ils défilent tous là-bas, à l’heure du déjeuner.

    Je sais, je suis déjà au courant, répliqua Cristina. C’est la raison pour laquelle on va devoir faire quelque chose pour nous faire connaitre et surtout pour nous distinguer de nos concurrents. Donc, j’ai pensé que toi et George pourriezaller à la clinique vers 11h pour offrir un échantillon de pâtisseries à tous ceux qui passent par là. Bonne idée, non ?

    Super, murmura Meredith, qui n’avait pas du tout envie de croiser le Dr Shepherd alors qu’elle porterait des plateaux de pâtisseries, c’est-à-dire une fois encore quand elle serait à son désavantage.

    Et toi, George, en attendant, tu iras distribuer les prospectus dans les boites aux lettres du quartier, ordonna Cristina. Et tu en donneras aussi à toutes les personnes que tu croiseras. Elle se leva, signifiant ainsi la fin de la pause. Bon, au boulot tout le monde !

    Ils ne virent pas le temps passer. La curiosité, mais surtout la possibilité de déguster gratuitement les douceurs proposées, attirèrent les gens en nombre, grâce aux feuillets publicitaires distribués par George. Meredith et Cristina passèrent une bonne partie de la matinée à réapprovisionner les présentoirs. Quant à Izzie, éblouissante dans une robe en soie grenat et les cheveux noués en un chignon strict, elle arpenta le trottoir devant la boutique pour présenter aux passants des muffins aux myrtilles et des cookies aux noix et aux pépites de chocolat.

    Vers 11h, Cristina rappela à Meredith et George la mission spéciale dont elle les avait chargés. C’est avec des pieds de plomb que les deux camarades se rendirent à la clinique, chacun portant un plateau présentant un assortiment des meilleures spécialités de leur amie. Meredith avait à peine passé la porte qu’elle regardait autour d’elle dans l’espoir d’apercevoir celui qui était devenu l’objet de toutes ses pensées, ou presque. Elle tressaillit en le voyant en haut d’un escalier roulant. Vêtu d’une blouse blanche, il discutait avec le Dr Sloan. Trop occupée à l’observer, Meredith ne fit pas attention au paillasson dont un des coins était légèrement replié. Elle se prit les pieds dedans et trébucha. Si elle réussit à rester debout, son plateau, par contre, vola sur le sol dans un terrible fracas. Tétanisée à l’idée que tous les regards devaient très certainement être tournés vers elle, Meredith resta immobile quelques secondes jusqu’à ce que George commence à ramasser les pâtisseries qui étaient éparpillées, en morceaux pour certaines. Rouge comme une pivoine, elle s’agenouilla à côté de son camarade pour l’aider. Elle aurait voulu pouvoir disparaître sous terre. Une fois encore, elle s’était donnée en spectacle de la façon la plus ridicule qui soit devant l’homme à qui elle aurait tant aimé plaire.

    Effectivement, le bruit assourdissant du plateau tombant par terre avait attiré l’attention de Derek et de Mark. Tiens, voilà ta petite protégée qui vient encore de se casser la gueule, ironisa ce dernier. Qu’est-ce que tu attends pour courir à son secours ?

    Arrête avec ça, grogna Derek, agacé. Les meilleures plaisanteries sont les plus courtes.

    Ah mais je ne plaisante pas, assura Mark. Cette godiche ne tient pas sur ses jambes. Si ça se trouve, elle a un problème. Il tapota plusieurs fois de suite son index contre sa tempe. Tu devrais peut-être l’opérer pour essayer d’arranger ça. 

    Derek haussa une épaule tout en jetant légèrement ses yeux au ciel. Elle a renversé un plateau. Ça peut arriver à tout le monde.

    Avoue qu’elle fait pitié, tout de même ! laissa tomber Mark sur un ton méprisant. Derek regarda quelques secondes la jeune fille à genoux pour ramasser les morceaux de gâteaux. Mark n’avait pas tort. Elle faisait pitié. Un oiseau pour le chat…

    Une fois que les restes de pâtisserie furent récupérés, Meredith se releva en évitant soigneusement de regarder en direction de l’escalier roulant. Elle ne voulait pas voir le chirurgien se moquer d’elle avec son ami. Pressée de quitter au plus vite cet endroit, elle se précipita vers la sortie, sans réaliser que la porte en verre était fermée. Elle fonça dedans, la tête la première. Son visage heurta violemment le battant dans un bruit sourd. Elle entendit un rire tonitruant qui résonnait dans tout le hall et fut certaine que c’était celui du Dr Shepherd. Malgré la douleur et la honte, Meredith resta stoïque. Elle ouvrit la porte et sortit, avec George sur ses talons.

    En fait, l’éclat de rire était celui de Mark. Ah elle est trop forte, celle-là ! s’exclama ce dernier en frappant sa main sur sa cuisse. C’est à se demander si elle ne le fait pas exprès. Un vrai numéro de caméra cachée…

    Derek hocha la tête avec un air désapprobateur. Ce n’est pas la compassion qui t’étouffe. Elle a dû se faire sacrément mal.

    Mark haussa les épaules. Et après ? Qu’est-ce que tu veux que j’y fasse ? Et depuis quand on est compatissant avec les cruches ? Derek ne répondit pas. Parce que, putain, elle est cruche, celle-là ! insista Mark en ricanant. Il se tourna brusquement vers son camarade, puis regarda l’endroit où avait eu lieu l’incident, avant de revenir sur Derek. Un petit sourire naquit sur ses lèvres. Dis-moi, tu as déjà trouvé ta cavalière pour le gala ?


    8 commentaires
  • Si tu crois que j’ai eu le temps de penser à ça ! s’écria Derek, que la ténacité de son ami en la matière commençait à contrarier sérieusement.

    Mark fit un mouvement de la tête, menton en avant, en direction de la porte que venait de franchir Meredith. C’est elle.

    Derek fronça les sourcils. Quoi, c’est elle ?

    Ta cavalière, c’est elle ! Miss Catastrophe, précisa Mark devant la mine interrogative de Derek

    Celui-ci le regarda avec un air incrédule, comme s’il n’était pas certain d’avoir bien compris. Meredith ?

    Ben, qui veux-tu ? Mark s’esclaffa. Pas le toquard qui l’accompagnait ! Quoique… si on lui colle une perruque et des faux seins, il pourrait faire l’affaire. Il fut à nouveau agité de soubresauts de rire en imaginant la scène. Derek lui lança un regard mauvais. Bon, ça va, je ne vais pas te demander de changer de bord, promit Mark, hilare. Surtout pas avec un abruti pareil. Non, pour le gala, l’assistante pâtissière fera très bien l’affaire.

    Et pourquoi elle ? s’enquit Derek, le regard sombre.

    Mark fit semblant d’être scandalisé. Tu oses demander pourquoi ? Il ferma son poing avant d’en sortir le pouce. Premièrement, la candidate doit être moche. Tu ne peux pas nier qu’elle le soit ! Il dressa son index en l’air. Deuxièmement, elle est conne. Bref, elle est parfaite. Tu vas te taper la honte de ta vie, conclut-il avec un grand sourire de satisfaction.

    J’aurai surtout l’impression de me taper ma petite sœur, objecta Derek, bougon. C’est encore qu’une gamine !

    Elle a le même âge qu’Izzie dont le jeune âge n’a jamais semblé te déranger jusqu’à présent, lui fit remarquer Mark. Et je ne vois pas ce que ta petite sœur vient faire dans cette histoire, elle est plus âgée que cette fille. Il pointa son index vers son ami. N’essaie pas de te trouver des excuses, ça ne marchera pas.

    Derek tourna la tête vers la porte par laquelle Meredith avait disparu quelques minutes auparavant. Après tout, pourquoi pas ? Parce que, si Meredith était sans conteste maladroite, naïve, peu élégante et loin des canons de beauté qui leur étaient chers, elle n’était certainement pas aussi bête et laide que ce que Mark disait. Derek réalisa que, finalement, la soirée risquait d’être bien plus agréable que ce à quoi il aurait pu s’attendre. Non seulement il allait coucher avec une jeunesse de vingt ans, ce qui allait lui permettre accessoirement de gagner sept mille dollars, mais en plus il aurait l’extrême satisfaction de faire de Mark le dindon de la farce. Oui, le soir du gala, il allait gagner sur tous les tableaux. Il soupira en prenant un air accablé. Très bien… si tu insistes, je vais l’honorer, ton foutu pari. Je vais m’afficher avec elle au gala…

    Et coucher avec elle ! lui rappela Mark.

    Il le faut vraiment ? demanda Derek, au comble de l’hypocrisie.

    Et comment ! s’exclama Mark. Et n’oublie pas, je veux des preuves. N’oublie pas ta caméra, Steven Spielberg. Cette plaisanterie déclencha un nouveau fou rire chez le chirurgien.

    Amusé par la bêtise de son ami, Derek secoua la tête. Je me demande ce que penseraient tes patients s’ils t’entendaient parfois… Et toi, tu seras accompagné par qui, à cette merde de soirée ?

    Par Izzie, qui veux-tu d’autre ? répondit Mark sur un ton suffisant. Je passe aujourd’hui à la boutique pour l’inviter.

    Tu es encore sur ce coup-là ? Derek ricana. Mais mon pauvre vieux, tu n’as pas encore compris que c’était mort pour toi ? Que veux-tu faire face à moi ?

    Je viens de te mettre hors concours, mec ! répliqua Mark. Pendant que tu escorteras la fée Carabosse, moi, je danserai avec la Belle au Bois Dormant. Je te jure bien qu’avant la fin de la nuit, j’aurai couché avec elle. J’en fais une affaire personnelle.

    Tu crois franchement qu’aller au gala avec Meredith va m’empêcher d’avoir Izzie ? demanda Derek avec un sourire narquois. Tu vas devoir continuer à compter avec moi, mon ami. Dès aujourd’hui, je vais aller déjeuner chez elle et je vais faire d’une pierre deux coups. J’emballe Meredith et je tiens Izzie au chaud. Plein d’assurance, il tapota l’épaule de son ami avant de s’éloigner.

    Dépité, Mark le regarda partir. Derek allait disparaître dans l’ascenseur quand il lui cria, Rendez-vous là-bas, alors ! Parce que, même si je dois bouffer tous les gâteaux de la boutique et prendre dix kilos, je te jure bien que je vais me la faire et que tu vas rester sur le carreau. Seul le rire moqueur de son ami lui répondit.


    11 commentaires