• Madelina releva la tête vers Derek, le regard légèrement inquiet. C’était bon ? demanda-t-elle en lui passant délicatement une serviette sur la verge, avant d’essuyer le sperme qui avait giclé sur sa main et sa poitrine.

    Il rouvrit les yeux en souriant. Je croyais que ce ne serait pas la peine de demander mais, si tu veux que je te le dise, oui, c’était très bon. Il se pencha et la prit par la taille, pour la soulever jusqu’à lui et la faire asseoir sur ses cuisses. Elle s’appuya sur ses épaules pour qu'il ait ses seins à la hauteur du visage. Il rit doucement, comprenant qu’elle l’incitait à passer à la vitesse supérieure. Il embrassa ses seins l’un après l’autre, avant de pincer ses tétons pour les faire dresser et de les lécher en alternance, pour finalement en aspirer un, et le téter doucement, tandis qu’il faisait tourner l’autre sous son doigt. Madelina renversa la tête en arrière, laissant échapper de petits gémissements. Elle n’était pas certaine d’arriver à lui faire oublier celle qui le rendait malheureux, mais lui, il allait vraisemblablement reléguer bon nombre de ses amants au titre de rebut. Excitée, elle lui reprit le membre en main et en frotta le gland contre son pantalon de toile, à la hauteur de son sexe. Derek saisit immédiatement le message. Il la fit lever et l’entraîna vers le lit, devant lequel il lui enleva son pantalon, la tenant par la main tandis qu’elle soulevait les pieds pour le laisser au sol, avant de la pousser sur le matelas. Allongé contre elle, il recommença à l’embrasser, une main sur un sein, une autre passant sur le string humide. Je t’excite ?

    Oh oui, geignit-elle. Tu m’excites. J’ai aimé avoir ton sexe dans ma bouche. Elle reprit une lente masturbation. Je veux que tu me caresses, et que tu me lèches aussi. Je veux que tu me prennes, ajouta-t-elle en écartant lentement les cuisses. Et je veux te sentir bouger en moi.

    C’était l’avantage avec les femmes qui avaient de l’expérience. Elles n’avaient plus peur d’exprimer leurs désirs. Derek trouvait ça très excitant. A plusieurs reprises, il avait essayé d’encourager Meredith à en faire autant, mais il n’y avait jamais vraiment réussi. Attention, danger ! se dit-il. Tu ne penses plus à elle ce soir. Tu es avec une fille qui en veut et tu vas lui en donner. Elle a été hyper sympa avec toi, elle mérite une récompense. Il écarta le string de Madelina et passa les doigts sur sa vulve trempée. Ne t’inquiète pas, tu vas avoir tout ce que tu veux, lui assura-t-il. Il s’agenouilla et, lentement, fit glisser le sous-vêtement, révélant un sexe soigneusement épilé.

    Provocante, la jolie brune écarta les jambes et se passa la main sur la vulve, en se mordant les lèvres, avant d’insinuer un doigt entre ses grandes lèvres. Le pénis à nouveau à la verticale, Derek se jeta sur elle pour embrasser et mordiller ses seins, tandis qu'il insinuait son index et son majeur entre les petites lèvres pour qu'ils fassent connaissance avec le clitoris. Viens me lécher, supplia Madelina, haletante. J’en ai trop envie. Derek ne se fit pas prier et vint s’allonger entre les jambes de la jeune femme, la bouche à la hauteur de son intimité qu’elle lui présenta, en l’écartant avec ses doigts, les cuisses totalement ouvertes. Il y passa la langue, parcourant le chemin qui séparait le clitoris de l’entrée du vagin, pour finalement s’occuper exclusivement de son petit bouton, tandis qu’il la pénétrait de deux doigts. Fixant le plafond de ses yeux écarquillés, Madelina sentit monter la vague de chaleur annonciatrice de sa jouissance. Quelle bonne idée elle avait eue de descendre au bar et surtout d’accepter de parler avec cet inconnu ! Parce qu’il était en train de lui faire prendre son pied comme jamais. Ses jambes se mirent à trembler lorsque l’onde de plaisir commença à se répandre à partir de son clitoris. Ensuite, son vagin fut agité de contractions qui se resserrèrent autour des deux doigts qui allaient et venaient en elle. Elle ouvrit la bouche et laissa sortir un grand cri quand elle jouit. Derek n’avait pas encore retiré ses doigts qu’elle l'implorait déjà. Prends-moi vite. Il sortit du lit pour prendre un préservatif dans son pantalon. Après l'avoir enfilé à toute vitesse, il revint vers sa partenaire et, allongé sur elle, la pénétra d'un coup en s’enfonçant en elle le plus loin possible. A nouveau, Madelina ouvrit de grands yeux. Ce type était vraiment à la hauteur de ses espérances, attentionné, puissant, en un mot doué. Elle le regarda tandis qu’il coulissait en elle, appuyé sur ses bras pour avoir plus de force. Attends, je vais me mettre au-dessus, annonça-t-elle après seulement quelques coups de rein. Derek se retira aussitôt et, allongé sur le dos, la regarda s’installer à califourchon sur lui, prendre son membre en main et s’empaler dessus, avec un cri de bonheur, pour finalement aller et venir dessus de plus en plus vite en prenant appui sur ses cuisses. Il tendit les bras et reprit ses caresses sur la poitrine, devinant qu’à ce rythme-là, il ne tiendrait pas le coup longtemps. Il comprit qu’il n’était pas le seul dans ce cas lorsque la jeune femme lui enleva une main de sur son sein et l’amena sur sa vulve, lui faisant poser les doigts sur son clitoris qu’il se mit à titiller à toute vitesse. Les cris de Madelina se précipitèrent à la même cadence que ses déhanchements sur la verge. Lorsque celle-ci fut broyée par les contractions du vagin, Derek éjacula dans un râle, tandis que Madelina se laissait tomber sur son torse.

    Il n’avait pas encore retrouvé son souffle qu’il eût envie de s’en aller. Il repoussa doucement la jeune femme. Désolé mais je dois…

    Oh oui, bien sûr. Elle s’écarta pour le libérer et s’allongea sur le côté, le suivant du regard tandis qu’il disparaissait dans la salle de bains, promenant ses propres mains sur le corps qu’il venait de combler, attendant avec impatience son retour dans l’espoir que, peut-être, après un peu de repos, il serait disposé à recommencer. Mais elle comprit qu’il n’en serait rien lorsqu'il revint dans la chambre et se dirigea directement vers ses vêtements. Tu t’en vas déjà ? demanda-t-elle fébrilement en se redressant à moitié.

    Derek ramassa son boxer et son pantalon avant de s’asseoir dans le fauteuil pour les enfiler avant d'enfin daigner la regarder, s’étonnant de ne ressentir aucune envie de l’humilier comme il l’aurait fait avant. Et pourquoi l’aurait-il fait d’ailleurs ?  Elle était plutôt chouette et elle lui avait donné du plaisir, ni plus ni moins que ce qu’il attendait. Je me suis servi d’elle, reconnut-il intérieurement. Le salaud, c’est moi. Je n’ai pas à le lui faire payer. Il esquissa un sourire qu’il essaya de teinter de regret. Oui. Il faut que j’y aille. Je dois aller à l’hôpital, prétendit-il. Un patient à voir.

    Je comprends, répondit simplement Malvina. Elle ne le quitta pas des yeux tandis qu’il finissait de se rhabiller. Tu ne me dis pas si j’ai réussi ? dit-elle subitement.

    Derek la regarda avec un air perplexe. Réussi ?

    A te la faire oublier…

    Meredith fut soudain entre eux aussi certainement que si elle s’était réellement trouvée dans la pièce. Tu as réussi, oui, admit Derek presque douloureusement. L’espace d’un instant. Oui, il l'avait oubliée durant quelques secondes mais maintenant, elle était là, plus présente que jamais, et il savait que ce qu'il avait fait n'avait servi à rien et qu'il pourrait répéter l'expérience des centaines de fois, il ne parviendrait pas à effacer ce qu'il ressentait pour elle.

    J’imagine que c’est mieux que rien, répondit Madelina, en ramenant la couverture sur elle. En tout cas, moi, je ne regrette rien. Elle s’assit sur le lit. Si un jour, tu passes par Atlanta, appelle-moi. Elle regarda autour d’elle. Tu ne vois pas un papier quelque part ? Je vais te noter mon numéro. 

    Derek regarda distraitement autour de lui avant de secouer la tête. De toute façon, quelle importance ? Il ne comptait pas l’appeler. Mais allez savoir pourquoi, peut-être pour ne pas lui faire de peine, il mit les mains dans les poches de sa veste et en sortit la note du bar. Tiens, écris-le là-dessus, lui dit-il en lui tendant le bout de papier et son stylo. Il remit ses chaussures pendant qu’elle alignait les chiffres de son numéro de téléphone, avant de revenir s’asseoir sur le lit. Il prit le papier qu’elle lui redonnait et l’enfonça négligemment dans la poche de son jean. Bon, ben… Il n’avait jamais été doué pour les adieux aimables et ne savait pas trop quoi dire pour ne pas paraître tout à fait mufle. A une autre fois peut-être.

    Si tu viens à Atlanta…

    Oui, voilà. Il tapota la poche dans laquelle il venait de mettre la note d'hôtel. Prends soin de toi. Il se leva sur un dernier sourire et sortit de la chambre, sans plus se retourner, pressé maintenant de quitter cet hôtel, avec à nouveau ce même goût d’amertume qu’il avait eu en suivant Madelina.


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  • Meredith trouva sa tante dans le hall d'entrée. Gloria, Gloria, où es-tu ? hurlait la vieille dame en chemise de nuit.

    Gloria n'est pas là, lui dit Meredith d'une voix douce. Elle est rentrée chez elle. Tu as besoin de quelque chose ?

    J'ai soif, geignit Ellis.

    Meredith la prit par le bras. Eh bien, viens avec moi à la cuisine. Je te donnerai à boire et après, je te raccompagnerai dans ta chambre. Il faut que tu te reposes si tu veux être en forme pour accompagner Gloria au marché demain. Elle qui jusqu’à présent, se reprochait d’avoir refusé de passer la soirée avec son petit ami, se félicitait maintenant d’être restée chez elle, puisqu’elle avait pu se rendre utile pour sa tante. Son sacrifice n’avait pas été vain. C’est le cœur plus léger qu’elle servit un verre d’eau à Ellis.

    Après avoir passé un moment à la fenêtre à regarder distraitement les voitures qui passaient dans la rue, Mark reposa son verre sur la table et alla entrouvrir la porte donnant sur le hall d’entrée, pour guetter les éventuels bruits au cas où Meredith aurait besoin de son aide. C’est alors qu’il perçut la sonnerie lointaine de son téléphone. Machinalement, il porta la main à la poche arrière de son jean avant de se rappeler que son téléphone était dans sa veste qu’il avait jetée sur un fauteuil, à son arrivée. Il alla le chercher en priant le ciel que ce ne soit pas l’hôpital ou quoi que ce soit d’autre qui l’oblige à partir. Et puis merde, si c’était le cas, il ne décrocherait pas. Meredith n’avait pas le moral, elle l’avait appelé à la rescousse, il n’allait pas la laisser tomber. Son premier réflexe fut donc de lire le nom de son correspondant sur l’écran couleur de son BlackBerry. Il fronça les sourcils en reconnaissant le numéro du ranch de sa grand-mère. Vu l’heure tardive, si elle l’appelait maintenant, c’est qu’il y avait un problème sérieux. Allo ? Momsy ?

    Non, c'est Frances, sa dame de compagnie.

    Les minutes qui suivirent furent terriblement éprouvantes pour Mark. Sans dire un mot, il écouta Frances lui raconter que sa grand-mère avait fait un infarctus le matin même. Elle avait été conduite à l’hôpital mais une fois tirée d’affaire, elle avait signé une décharge pour rentrer chez elle, sans tenir compte de l’avis des médecins qui s’étaient montrés des plus pessimistes. Pour eux, si la vieille dame faisait l’objet d’une nouvelle attaque, l’issue serait sans aucun doute fatale. Et malheureusement, une nouvelle crise était plus que prévisible, elle était inévitable. Cette triste perspective n’avait en rien troublé la sérénité de l’autoritaire vieillarde. Elle était consciente des risques mais puisqu’elle était condamnée, elle préférait mourir chez elle. Cependant, si elle était prête à tirer sa révérence, elle ne voulait pas le faire sans avoir revu son petit-fils. Alors, conclut Frances, la voix chargée de sanglots, il ne devait pas trop tarder à lui rendre visite car il n’y avait plus aucune garantie concernant la santé de Momsy.

    Oui, bien sûr, ânonna Mark. Bien sûr, je vais venir. Je vais venir, répéta-t-il, hébété. Sa grand-mère, son repère, son roc que rien n'avait pu abattre jusqu'à présent, celle qu’il avait toujours crue immortelle tant elle lui semblait forte… elle allait partir, le quitter. Je vais venir le plus rapidement possible, promit-il. Il faut juste que je prenne mes dispositions. La clinique, vous comprenez ? Dites-lui, dites-lui… - sa gorge se serra - dites-lui que je l’aime et… qu’elle m’attende. Surtout qu’elle m’attende !

    Il avait à peine raccroché que Meredith faisait irruption dans le salon. Voilà, elle avait juste soif. Je lui ai donné à boire et je l'ai remise au lit, expliqua-t-elle. Etonnée par le silence de son ami qui lui tournait le dos, elle vint se placer à côté de lui. Elle constata alors qu'il pleurait, ce qui la stupéfia. Voilà une chose à laquelle on ne s'attendait pas du tout de la part du Dr Sloan. Mark, qu'est-ce que tu as ? Incapable de parler, il secoua la tête. Elle lui prit la main. Qu'est-ce qui s'est passé ? Pourquoi tu pleures ?

    Ma grand-mère… Il ne put en dire plus et ferma les yeux avant de désigner du menton le téléphone qu’il avait déposé sur la table.

    Elle t'a appelé ?

    Mark se racla légèrement la gorge. Non, sa dame de compagnie. Il serra fortement la main qui était dans la sienne et prit une grande inspiration. Elle voulait me prévenir que ma grand-mère a eu un infarctus ce matin. Ce n’est pas le premier et le prochain pourrait lui être fatal.

    Meredith l'entraina vers le canapé. Oh je suis désolée.

    Je dois aller la voir. Il faut que j’aille la voir. Je ne veux pas qu’elle s’en aille avant que… Cette perspective intolérable pour Mark, ainsi que la tension nerveuse qu’il accumulait depuis des jours maintenant, provoqua en lui un flot de sentiments. Désespoir, amour, colère… Tout cela, Momsy, Meredith, c’était trop d’émotions pour lui qui n’était pas vraiment habitué à en éprouver, du moins pas d’aussi fortes. Ses pleurs silencieux se transformèrent en de gros sanglots bruyants.

    Bouleversée par ce chagrin, Meredith sentit les larmes lui envahir les yeux. Ne pleure pas, supplia-t-elle. Je suis certaine que ça va s'arranger, dit-elle parce qu'elle ne savait que dire d'autre pour réconforter son ami.


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  • Non, pas à son âge. On ne se remet plus de ça à son âge, répondit Mark entre deux sanglots qu’il se maudissait de ne pouvoir réfréner. Son cœur est usé, il n'y a plus rien à faire, les médecins l'ont prévenue. Et je crois qu'elle n'a plus envie de se battre.

    Meredith le prit dans ses bras. Je sais que c'est triste mais elle a eu une vie bien remplie d'après ce que tu m'as dit, murmura-t-elle. Ça ne lui plait peut-être pas de vivre comme ça, en étant diminuée, alors elle préfère partir. C'est dur pour ceux qui restent mais il faut le respecter. Elle s'en voulait de ne trouver rien d'autre à dire que des platitudes mais que pouvait-on dire à quelqu'un qui était sur le point de perdre la personne à laquelle il tenait le plus au monde ?

    Tu ne te rends pas compte, je n’ai plus qu’elle. Quand elle sera partie, je serai seul. Mark regarda la bouteille de tequila qui était sur la table. Il prit une nouvelle profonde inspiration. Tu n’as pas quelque chose de plus fort ? demanda-t-il d’une voix enfin plus posée. Meredith se leva pour aller chercher une bouteille de whisky et un verre qu’elle déposa devant lui. La main tremblante, il remplit ce dernier à ras-bord et le vida d’un coup. Je n’aurai plus personne, répéta-t-il, comme si l’évidence s’imposait à lui. Dans un effort désespéré de retrouver le contrôle de lui-même, il tenta de changer de sujet et désigna la bouteille d’alcool à Meredith. Tu en veux ? Elle secoua la tête. De la tequila alors ?

    Elle hocha à nouveau la tête avant de la poser sur l'épaule de son ami. Tu ne seras pas seul. Derek sera là et moi aussi. Elle lui déposa un baiser sur la joue. On ne va pas remplacer ta grand-mère, c'est sûr, mais on sera toujours là pour toi comme toi, tu es là pour nous.

    Mark sentit un nouveau sanglot monter dans sa gorge. Déstabilisé, il s’écarta en espérant que ce trop-plein d’émotions disparaisse. Lui, pleurnicher comme une gamine ? Non, non, ça ne lui ressemblait pas. Ce n’était pas lui, ça. Il se servit un deuxième verre de whisky et se laissa aller dans le fond du canapé, entraînant Meredith avec lui. Il ferma les yeux, essayant de faire abstraction de tout. Mais c’était plus fort que lui, Momsy était omniprésente et il avait besoin de l’évoquer. Tu vois, elle a toujours été là pour moi. Mes parents, tu sais bien… Un rictus de douleur déforma son visage. Leurs disputes résonnaient dans toute la maison. Ça hurlait, ça hurlait. Il abaissa vers Meredith un regard désespéré. Je crois que ça a été mon premier souvenir d’enfant. Leurs cris… Je me réfugiais dans les placards, je fermais les yeux et je me bouchais les oreilles en appuyant très fort mes mains dessus – il joignit le geste à la parole, comme pour mieux lui faire comprendre, avant de rouvrir les yeux – pour essayer de ne plus les entendre. Mais ils criaient tellement fort que je n’y arrivais pas. Emue, Meredith se contenta de lui serrer furtivement la main sans rien dire. Elle devinait que c’était la première fois depuis très longtemps qu’il se confiait sur les moments douloureux de son enfance et elle le savait suffisamment pudique pour ne pas prendre le risque de l’interrompre avec une parole malheureuse. Mon père aimait ma mère, poursuivit-il. Il en était fou et de savoir… Pour les jardiniers… Il eut un sourire attendri. Ce n’était pas un mauvais bougre, tu sais. Il était seulement amoureux d’une… d’une… Il cessa de parler et serra les dents avant de reprendre. Je la détestais tellement pour ce qu’elle nous faisait. Elle n’était jamais là et lui… lui, il fuyait la maison de son malheur. J’étais seul la plupart du temps, avec les nounous qui ne faisaient jamais que passer. Il se tut un instant, son regard se perdant au loin pour revoir le petit garçon solitaire et terrifié, qui errait dans la grande maison déserte. Le temps de boire une autre gorgée de whisky, il reprit son récit. Heureusement, il y avait Momsy. Elle venait me chercher pour m’emmener dans son ranch, le temps d’un week-end ou pour les vacances. Il eut un sourire attendri. C’était le paradis là-bas, pour un enfant. Les animaux, les grands espaces, pas de disputes, des pancakes au matin, des cookies ou des muffins pour le goûter, les dîners pris ensemble pendant lesquels on racontait tout ce qu'on avait fait, la maison pleine de va-et-vient… Tout ce que je n’avais pas chez moi. Sa main se perdit dans la chevelure de Meredith qu’il s’amusa à enrouler autour de son index en de grosses boucles. Et puis, ma grand-mère… Nos promenades, nos conversations…

    La jeune fille l’encouragea à continuer avec un doux sourire. Et tu parlais de quoi avec elle ?

    De tout. De politique, de ce qui se passait dans le monde, de musique, de cinéma… Et des études, bien sûr. La voix de Mark prit un ton presque jovial. Avec elle, pas question d'échouer ! Je pouvais faire toutes les conneries que je voulais mais les résultats scolaires devaient être au top. Si je suis devenu ce que je suis, c’est grâce à elle, tu sais. Un sourire ému apparut sur les lèvres du chirurgien. Elle m’a tout appris. Quand j’ai grandi, c’est à elle que j’ai pu demander conseil. Pour les filles. Il s’assombrit à nouveau. J’étais timide, gauche, je n’osais pas. Et j’étais complexé par rapport à Derek. Ce salaud avait un tel charme, énonça-t-il sans la moindre amertume. Elles venaient toutes vers lui sans qu’il ait rien à faire. Meredith soupira. Malheureusement, rien n’avait changé depuis. Quant à Mark, elle comprenait trop bien ce qu’il avait dû ressentir car elle avait toujours éprouvé la même chose, un énorme manque de confiance en soi et l’impression de n’être jamais à la hauteur. C’est Momsy qui m’a expliqué comment je devais m’y prendre, continua Mark. Et ça a marché ! Il repensa à sa première petite amie, la jolie Cindy qui, grâce aux conseils de Momsy, avait accepté d’aller au cinéma avec lui et qui s’était laissé embrasser à l’entracte. Cindy, la première d’une longue liste… Ensuite, j’ai pris de l’assurance et j’ai affiné la méthode, ironisa-t-il. Au début, Momsy, ça l’a amusée, toutes ces filles qui défilaient à la maison. Après, elle a moins apprécié. Il eut un petit rire. Elle voulait que je me trouve une gentille fille, qui serait sérieuse, pour me fixer, et moi, je ne pensais qu’à baiser. Tout à coup, il imita la voix éraillée de sa grand-mère. Ce n’est pas comme ça que je t’ai élevé, Mark Sloan ! Toutes ces filles ! Des Marie-couche-toi-là ! Tu veux répéter les erreurs de ton père ? Il fit tourner son verre entre ses doigts, regardant le fond de whisky en tapisser les parois, avant de le vider. Elle ne lui a jamais pardonné d’avoir épousé ma mère. Mais quand il est mort, c’est un peu d’elle qui est parti avec lui. Il abaissa son regard vers le visage de la jeune fille qui l’écoutait avec tellement d’attention. Quand elle partira, j’ai peur de ne plus être tout à fait le même, avoua-t-il dans un souffle.


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  • Mais si, bien sûr, assura Meredith. Au fond de ton cœur, tu es toujours Mark, le petit garçon qui se cachait dans les placards pour ne plus entendre ses parents crier. Mais tu n'es pas que ça. Tu es un chirurgien super doué, et aussi le meilleur ami qu'on puisse avoir. Que ta grand-mère soit là ou pas ne changera rien à la personne que tu es au fond de toi. C'est juste que tu ne la montres pas à beaucoup de personnes.

    Mark sourit tristement. Tu as sans doute raison. Je déteste parler de moi, habituellement. Remuer toutes ces vieilles histoires… Il fit une brève grimace. Mais avec toi, j’en avais envie. C’est venu naturellement et ça m’a fait du bien. Il se pencha vers Meredith et plongea le nez dans ses cheveux blonds, humant leur parfum de lavande, avant de se remettre à les enrouler autour de ses doigts. De jouer avec eux avait sur lui un effet apaisant. Il renversa la tête en arrière et ferma les yeux. Tu crois que si on reste là, comme ça, sans bouger, le temps peut s’arrêter ? lui demanda-t-il soudain, d’une voix lasse. S’ils y arrivaient, il pourrait rester là, avec elle, et il n’arriverait rien à sa chère grand-mère.

    Meredith sourit de sa candeur qui contrastait tellement avec l’image qu'il donnait de de lui. On peut toujours essayer, chuchota-t-elle en se lovant contre lui. Elle sentit la main de Mark cesser progressivement de lui caresser les cheveux et son bras qui s’alourdissait. Quand elle leva les yeux vers lui, elle le vit qui dormait, la tête posée contre le dossier du canapé. Attendrie, elle le contempla quelques instants avant de se lever tout doucement pour aller chercher une couverture qu’elle revint poser sur lui. Elle n’avait pas le cœur à le réveiller pour le renvoyer chez lui. Elle se rassit à côté de lui et lui reprit la main. Quelle soirée pourrie ! se dit-elle. Cristina qui s’était moquée de ses ambitions, Derek qui s’était inscrit aux abonnés absents, Mark l’ami fidèle qui venait de recevoir un coup de massue… Elle finit par s’endormir en pensant que, oui, décidément, les choses n’étaient jamais ce qu’on voulait qu’elles soient.

    Lorsque Mark se réveilla quelques heures plus tard, il faisait nuit noire. Le corps endolori, il ouvrit lentement les yeux et ses lèvres s’étirèrent en un tendre sourire lorsqu’il réalisa que Meredith dormait à ses côtés, la tête au creux de son bras. Tout lui revint en mémoire d’un coup : le coup de fil de la jeune fille, leur conversation sur ses études qui avait très rapidement débouché sur ses problèmes avec Derek, la vieille tante qui était venue hurler dans le couloir, Frances et ses mauvaises nouvelles… Mark eut la gorge serrée à la pensée de sa grand-mère qui menait son dernier combat contre la mort, attendant de le revoir pour rendre les armes. Lors de sa dernière conversation avec elle, il avait bien senti que la vieille dame était lasse de la vie et que seule l’idée de le laisser la retenait encore. Bien sûr, il savait que cette fin était inéluctable mais il aurait aimé pouvoir la reculer. Etre chirurgien de classe mondiale et ne rien pouvoir faire pour sauver la seule personne de sa famille qui comptait encore pour lui, quelle ironie ! Sentant les larmes lui monter aux yeux, il s’absorba dans la contemplation de la jeune fille qui dormait toujours profondément. Finalement, c’était une chance qu’il ait reçu ce terrible appel ici, quand il était avec elle. Cette douleur qu’il avait ressentie, il n’aurait voulu la partager avec personne d’autre, même pas Derek qui, pourtant, avait toujours été l'unique confident de ses faiblesses. Et lui, l’homme tellement orgueilleux, tellement fier de prétendre qu’il n’éprouvait aucun sentiment, ne regrettait pas une seconde de s’être laissé aller à pleurer devant cette fille. Il aurait aimé rester là, avec elle, jusqu’à la fin de la nuit, mais ce n’était pas possible. Il fallait qu’il quitte cette maison rapidement, avant le retour des deux autres locataires. Inutile d’alimenter leurs commérages. Prenant garde de ne pas bousculer Meredith, il dégagea son bras de dessous sa tête. Une fois debout, il grimaça. Sa tête était en train de lui rappeler que tequila et whisky ne faisaient pas bon ménage. Il se pencha et, après avoir soigneusement enveloppé son amie dans la couverture pour qu’elle ne prenne pas froid, il la souleva délicatement, avec précaution, la prenant contre lui pour que sa tête repose contre son torse. Il sortit de la pièce et emprunta lentement les escaliers qui menaient à l’étage, faisant attention à ne pas faire de mouvements brusques. Par chance, la porte de la chambre de Meredith n’était pas totalement fermée. Il n’eut qu’à la pousser légèrement du pied pour qu’elle s’ouvre. Il déposa son amie sur le lit, en soutenant sa tête jusqu’à ce qu’elle repose sur l’oreiller, dégageant ses cheveux vers l’arrière, avant de remonter la couette sur elle en la passant un peu sous ses bras pour qu’elle ne bouge pas, et finalement s’asseoir au bord du lit pour s’offrir l’infime plaisir de la regarder dormir. Il s’était toujours cru à l’abri de tout sentiment amoureux mais elle était arrivée et maintenant, il n’avait plus d’autre certitude que son amour pour elle. Mais elle en aimait un autre, il ne pouvait plus en douter. Alors, elle ne saurait jamais rien de ce qu’il éprouvait pour elle. Il resterait son ami dévoué. Après quelques minutes d’une fervente contemplation, il redescendit au rez-de-chaussée pour trouver de quoi écrire. Après avoir pris un stylo dans la poche de sa veste et un morceau de papier qui traînait sur la table, il s’assit et, l’oreille tendue pour écouter les bruits extérieurs, commença à rédiger. Mer, je te remercie d’avoir été là pour moi, ce soir. Je n’ai pas l’habitude de jouer les chochottes et pour une fois que ça m’arrive, il faut que ce soit avec toi. Pour Derek, ne t’en fais pas. Il n’est pas très fort pour exprimer ses sentiments, ça ne signifie pas qu’il n’en éprouve pas. Il faut juste que tu lui laisses un peu de temps. Sois patiente et ça se passera bien, je te le promets. Et puis, n’oublie pas, je serai toujours là pour toi. Je t’embrasse, ma Mer. A tout à l'heure. Il remonta à la hâte et pénétra une fois encore dans la chambre, s’avançant vers le lit où la jeune fille n’avait pas bougé d’un pouce. Après l’avoir encore regardée un moment, le cœur gonflé d’une tendresse infinie, il déposa son message sur la table de chevet et se pencha pour poser un baiser sur le front de Meredith. Au rez-de-chaussée, il repassa par le living pour réveiller le chien et reprendre les plats chinois auxquels ils n’avaient même pas touché. C’est le cœur lourd qu’il quitta la maison, suivi par Murphy qui remuait frénétiquement la queue.


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  • Un bruit de portes qui claquent réveilla Meredith. Elle mit quelques secondes à réaliser qu'elle était dans sa chambre, ce qui l'étonna parce que dans son dernier souvenir, elle était au salon, veillant sur le sommeil de son ami Mark. Elle en déduisit qu'elle s'était endormie, elle aussi, et que Mark l’avait portée jusqu'à son lit avant de rentrer chez lui. Curieusement, elle se sentit un peu désappointée qu’il ne soit plus là. Elle aurait aimé poursuivre leur conversation. Outre le fait qu’elle avait eu l'impression que parler de sa grand-mère avait fait du bien à Mark, comme si évoquer tous les bons moments qu’il avait vécus avec elle la retenait encore un peu sur cette terre, elle appréciait énormément ces moments de complicité où il se confiait à elle. Compte tenu du goût qu'il avait habituellement pour le secret quand il s'agissait de sa vie privée, elle considérait ces rares confidences comme un réel privilège. Mais surtout – et vu le contexte, elle avait un peu honte de se l’avouer – en l’écoutant parler de son enfance, elle avait eu le sentiment de découvrir un peu celle de Derek. Bien sûr, ce n’était pas parce que les deux hommes étaient amis qu’ils avaient vécu les mêmes expériences, mais tout de même, ils avaient grandi ensemble et sur certains points, leurs caractères n’étaient pas si différents, de ce qu’elle pouvait en juger. Alors, de là à imaginer que leur enfance avait été similaire, il y avait un pas qu’elle franchissait allègrement. Pourquoi Derek était-il aussi secret sur tout ce qui le concernait ? Qu’avait-il vécu qui l’avait fait autant souffrir pour que, des années plus tard, il refuse encore d’en parler ? Des quelques rares confidences auxquelles il s’était laissé aller, Meredith en avait conclu qu’il avait vécu des moments difficiles au sein de sa famille. Un drame même probablement, qui l'avait probablement amené à couper tous les ponts avec les siens. Mais quel drame ? Qu’est-ce qui pouvait conduire un homme à prendre une telle décision et, surtout, à ne jamais la regretter ou la remettre en question ? Elle aurait tant aimé en savoir plus. Lui vint soudain l’idée que peut-être, si Derek se retrouvait dans la même situation que Mark, sur le point de perdre l’un des siens, il laisserait tomber sa garde et se confierait à elle. Elle rougit d’avoir eu une si vilaine pensée. Depuis quand souhaitait-elle le malheur des gens pour satisfaire sa curiosité ?

    Elle repoussa sa couette d’un geste brusque et s'assit au bord du lit. C’est alors qu’elle remarqua le bout de papier griffonné que Mark avait déposé sur la table de chevet. Au fur et à mesure qu'elle le lisait, ses lèvres s'étirèrent en un doux sourire. Mark, l’ami fidèle qui, malgré ses problèmes personnels, pensait à elle et ses petites angoisses somme toute assez futiles. Evidemment, sa relation avec Derek n’était pas parfaite mais aucune relation ne l’était. Elle pouvait déjà s'estimer heureuse de ne pas être seule. Elle relut le message de son ami et eut l’impression que ce dernier cherchait à lui faire passer un message. Il lui avait souvent répété qu’il se refusait à parler au nom de Derek. Mais tout de même, pour affirmer avec autant d'assurance que tout se passerait bien avec lui si elle savait attendre, c’est qu’il devait être au courant de certaines choses. Peut-être que Derek avait été plus franc avec Mark qu’avec elle. Elle plia soigneusement le papier et le glissa dans le tiroir de sa table de chevet avant de filer sous la douche où elle resta un long moment comme si l’eau qui coulait sur elle avait le pouvoir d’effacer ses doutes et ses peurs.

    Quand elle fut prête, elle descendit au salon où elle récupéra son téléphone. Elle vérifia immédiatement que Derek n'avait pas cherché à la joindre. Constater qu'il n'y avait aucun message, même pas un texto, angoissa la jeune fille. Se pouvait-il qu'il lui en veuille autant seulement parce qu'elle avait refusé de passer la soirée avec lui ? Va falloir qu'on discute sérieusement, mon coco ! se dit-elle en prenant le chemin de la cuisine où elle retrouva les filles attablées devant leur petit-déjeuner. Le souvenir des moqueries de la veille accentua sa mauvaise humeur et c'est du bout des lèvres qu'elle répondit au salut de ses camarades. Elle sirota son jus d'orange debout, adossée à une armoire, les yeux dans le vide. Le silence était tellement pesant que son estomac se noua à l’idée du voyage en voiture jusqu’à la boutique, qui s’annonçait tout aussi morose. Elle eut envie d'en finir au plus vite parce qu'une fois sur place, elle aurait de quoi s'occuper. Allez, on y va, lança-t-elle sur un ton péremptoire. On a du boulot qui nous attend.

    Cristina et Izzie échangèrent un regard étonné mais la suivirent sans rechigner. Elle a l'air de mauvais poil, chuchota Izzie à sa complice. A mon avis, elle s'est disputée avec Derek.

    Ou avec l'autre, objecta Cristina. C’est que madame se partage maintenant.

    Izzie pouffa de rire. T'es bête ! En tout cas, elle tire une de ces tronches !

    Tant qu’elle ne m’emmerde pas, ni ses toutous non plus, je m’en moque totalement, déclara Cristina en prenant les clés de voiture qui gisaient sur le guéridon du hall.

    Alors, tes études, ça avance ? lança Izzie à l'intention de Meredith qui les attendait déjà à côté de la vieille Ford.

    Ça va, répondit simplement la jeune fille. Elle s'installa sur la banquette arrière en espérant s'y faire oublier jusqu'à ce qu'elles arrivent à destination. Cependant, elle ne put s'empêcher de faire une remarque lorsque Cristina, en manœuvrant pour sortir de son emplacement, percuta légèrement l'arrière de la voiture qui était garée devant la leur. Hé ! Fais attention ! N'oublie pas que c'est la voiture de ma tante, lança-t-elle sur un ton acerbe. En réalité, elle ne s'inquiétait nullement pour l'état du véhicule d'autant que la faiblesse du choc n'avait pas pu causer de grands dégâts. Elle était simplement contente d'avoir une occasion de faire la leçon à Cristina qui ne manquait jamais de la rabaisser quand elle le pouvait.

    Cristina se retourna vivement vers elle. Si t'es pas contente, t'as qu'à conduire toi-même. Elle se frappa la tempe avec le plat de sa main. Ah mais que je suis bête ! C'est pas possible parce que tu ne sais pas conduire. Ça veut aller à l'université et ça n'a même pas été foutue de passer son permis, marmonna-t-elle en faisant marche arrière.

    Effectivement, Meredith n'avait jamais appris à conduire, bien que son grand-père lui ait proposé d’être son moniteur le jour même de ses seize ans. Son manque de confiance en elle et sa peur de l'échec l'avaient amenée à repousser cette offre et toutes celles qui avaient suivi pendant presque cinq ans, déclenchant à chaque fois des disputes homériques entre elle et son aïeul. Oh mais ne t'en fais pas, ça fait partie de mes projets, très bientôt même, répliqua-t-elle sans réfléchir, juste pour le plaisir de damner le pion à sa camarade, avant de réaliser que maintenant, elle allait devoir tenir sa promesse sous peine de passer encore une fois pour une dégonflée.


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