• Lorsqu’il avait quitté l’hôtel, Derek était monté dans sa voiture et avait fait le tour de la ville avant de s’arrêter sur les hauteurs pour observer les ferry-boats dans le port. Il s’était abîmé dans leur contemplation tellement longtemps qu’il aurait été incapable de dire combien de temps il était resté là.

    L’aube commençait à poindre lorsqu’il revint chez lui. Il n’en crut pas ses yeux quand il vit la voiture de Meredith stationnée légèrement en contrebas de la caravane. Il descendit de son véhicule et aperçut la jeune femme assise sur la terrasse. Elle le regarda s’approcher mais détourna les yeux quand il fut près d’elle. Tu voulais discuter ? Je suis venue pour ça, dit-elle, d’un ton las.

    Tu m’attends depuis longtemps ? s’enquit Derek. Elle fit signe que non. Tu veux entrer ? proposa-t-il. A nouveau, elle secoua la tête. Tu n’as pas froid ? Ta robe…

    Elle releva brusquement la tête vers lui et lui lança un regard qui ressemblait à un défi. Il paraît qu’elle ne te plait pas ?

    Elle est magnifique. Tu es magnifique. C’est juste que… Derek s’assit à côté de Meredith mais à une distance respectable, pour ne pas la contrarier. Je ne t’ai pas reconnue ce soir. Ton attitude, cette robe, ce n’est pas toi. Elle est… elle est trop…

    C’est un achat de dernière minute. Je me suis dit qu’en portant cette robe, je te ferais oublier Rose, lui avoua-t-elle.

    Ce n’était pas nécessaire, assura-t-il. Je n’ai pas besoin de l’oublier parce qu’elle n’a jamais compté pour moi.

    Je voulais te faire mal aussi, que tu crèves de jalousie… comme moi, précisa Meredith dans un murmure.

    Alors tu as réussi ton coup. J’ai préféré m’en aller d’ailleurs.

    Pourquoi tu as fait ça ?

    Je ne voulais pas te voir avec tous ces…

    Non, l’interrompit-elle. Je veux savoir pourquoi tu as embrassé Rose.

    Derek haussa légèrement les épaules. Je te l’ai dit. Ça s’est fait comme ça. Il y a eu cette intervention. C’était difficile. D’une certaine façon, Rose m’a soutenu. L’adrénaline a fait le reste. Mais c’était une pulsion, rien de plus.

    Tu aurais dû m’en parler, lui reprocha Meredith.

    Ça ne m’a pas semblé utile. Ça n’avait été qu’un baiser sans importance, insista-t-il. Et puis, je savais que tu en ferais une affaire d’état, alors j’ai préféré me taire. J’ai été lâche, reconnut-il.

    Mais pourquoi elle ? Tu la trouves plus jolie que moi ? demanda Meredith en essayant de trouver une explication logique à ce qui ne l’était pas.

    Ne sois pas stupide ! Bon sang, Meredith, je t’aime ! s’exclama Derek avec fougue. Et Rose… Rose, ce n’est qu’un malheureux concours de circonstances, en fait. Quand je l’ai rencontrée, j’étais déçu et frustré par ton attitude et elle, elle sait ce qu’elle veut. Et puis, il y a toujours une telle atmosphère de drame autour de toi, se lamenta-t-il. Tout prend des allures de tragédie. C’est parfois lourd à gérer. Rose est toujours gaie et positive. Elle ne se pose pas trop de questions. Avec elle, tout m’a semblé plus facile. Voilà, c’est tout.

    Meredith soupira. Je ne comprends toujours pas comment on a pu en arriver là. A Hawaii, tout était si simple et ici… Comment est-ce possible ?

    Derek s’enhardit à prendre sa main et fut heureux qu’elle ne la lui retire pas. Justement à Hawaii, on était si bien que j’ai cru que ça allait continuer. Là-bas, on vivait ensemble 24 heures sur 24 et tu semblais aimer ça. Mais quand on est revenu, tu as repris tes distances. Tu t’es accrochée à ta maison et à tes habitudes et moi, j’ai eu l’impression que tu me rejetais.

    Rose…

    Il lui coupa la parole. Rose n’est pas le problème, Meredith. Elle n’a pas compté pour moi, répéta-t-il. C’est juste qu’à un moment, j’ai cru que… j’ai cru que je devais me libérer de toi et qu’elle allait m’y aider mais j’ai compris que ce n’était pas ce que je voulais.

    Les yeux de Meredith s’écarquillèrent. Te libérer de moi ? Tu te vois comme un prisonnier quand tu es avec moi?

    Derek serra la main de la jeune femme un peu plus fort. Non, non bien sûr mais… avec toi, je subis les évènements. Attendre que tu sois prête, faire passer mes rêves au second plan, toujours… Ça ne me ressemble pas. C’est dur.

    Elle resta silencieuse un long moment et il n’osa interrompre sa réflexion, espérant que celle-ci leur serait favorable. En fait, il n’en doutait pas vraiment. Ils s’aimaient tellement ! Il n’était pas possible qu’un baiser anodin les sépare. Perdu dans ses pensées, il sursauta légèrement quand Meredith recommença à parler. Tu te souviens ? Quand j’ai failli exploser avec la bombe… le soir, tu es venu à la maison. Il fit signe que oui. La seule chose qui me tracassait ce jour-là, c’était les circonstances de notre dernier baiser, lui rappela-t-elle. J’avais tout oublié. C’est toi qui me les as rappelées, tu t’en souviens ?

    Oui, répondit-il, ému.

    Elle s’approcha de lui et l’embrassa fougueusement. D’abord surpris, il resta passif mais très vite, il répondit à son baiser. Leurs bouches s’entrouvrirent. Leurs langues se touchèrent et s’emmêlèrent, s’enfonçant à la conquête l’une de l’autre. Derek passa sa main dans la longue chevelure de son amie puis s’aventura prudemment en-dessous de la veste pour saisir un sein qu’il pressa délicatement. Meredith le laissa faire. Il gémit de bonheur et sa caresse se fit plus forte. Il aurait aimé que cela ne cesse jamais. Mais déjà, elle se détachait de lui. Il la regarda, éperdu d’amour. Elle se leva et de grosses larmes se mirent à couler sur ses joues. C’était notre dernier baiser, Derek. Celui-là, je ne l’oublierai jamais. Elle s’éloigna rapidement et monta dans sa voiture qui démarra au quart de tour. Interdit, il la regarda s’en aller sans chercher à la retenir.


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