• Quand Derek arriva dans la cuisine, il ouvrit de grands yeux en découvrant le petit-déjeuner pantagruélique que Meredith avait préparé. Jus d’orange pressé, muesli, toasts, confiture, sirop d’érable, yaourt, tomates grillées, champignons sautés et bacon frit étaient déjà sur la table, tandis que la jeune fille terminait de cuire des pancakes et des œufs brouillés. Tu as invité les voisins à prendre le p’tit-dej avec nous ? lui demanda Derek sur un ton quelque peu moqueur.

    Non, pas les voisins, mais Mark, lui rappela-t-elle. Je l’avais déjà invité hier et là, je lui ai envoyé un texto pour lui confirmer.

    J'espère qu'il a très faim, vu tout ce que tu as préparé, poursuivit Derek avec la même ironie.

    Il y a Callie aussi, lui fit remarquer son amie.

    Qui est perpétuellement au régime, signala Derek avec un grand sourire.

    Eh bien, elle fera une exception, répliqua Meredith. Avec le temps qu'on va passer à l'aéroport, puis dans l'avion, on ne va peut-être pas pouvoir manger avant longtemps. Alors autant bien se caler avec le petit-déjeuner.

    Derek fut forcé de lui donner raison. C'est vrai. Et ça nous évitera d'aller dans un de ces horribles fast-food que toi et Mark appréciez tellement. Il regarda la nourriture avec un air réjoui. Mmm ça m'a l'air bien bon, tout ça. Je te préviens, je n'attends pas Mark, moi. J'attaque tout de suite, j'ai trop faim. Il s'assit à la table et mit deux tranches de bacon dans son assiette tandis que Meredith lui apportait la poêle avec les œufs brouillés.

    Ils venaient à peine de finir de manger quand la sonnette de l'entrée retentit. Meredith, qui n'avait pas arrêté de regarder sa montre, se leva d’un bond pour aller ouvrir la porte. Enfin ! s'écria-t-elle en sautant au cou de Mark.

    Comment ça, enfin ? Mark la prit par la taille et l’embrassa tendrement sur la joue. Je ne suis pas en retard, pourtant.

    Derek fit son apparition derrière Meredith. Rien ne va assez vite pour elle aujourd'hui. Elle m’a obligé à me lever à six heures, tu te rends compte ?

    Ah on ne fait pas la grasse matinée en vacances ! décréta Meredith. Surtout pas le premier jour. Au contraire, on se lève tôt pour en profiter au maximum. Les deux hommes se regardèrent en souriant. En voyant Meredith si enthousiasmée par leur départ, ils ne pouvaient que se féliciter de leur initiative.

    La voix de Callie se fit entendre dans le dos de Mark. Sloan, tu ne pourrais pas te pousser que je puisse entrer, moi aussi ?

    Oh pardon, je t’avais oubliée. Mark entra dans le hall, débloquant ainsi la porte. Pourtant, tu prends de la place, persifla-t-il. Pour répondre à l'invitation de Meredith et ne pas décevoir celle-ci, il avait obligé Callie à se lever plus tôt que prévu, ce qu'elle n'avait cessé de lui reprocher durant tout le trajet. D'une certaine façon, elle lui avait gâché son début de vacances et il avait envie de le lui faire payer.

    Callie fit son entrée dans la maison. Toujours aussi charmant ! aboya-t-elle, mortifiée que Mark l'ait une fois de plus humiliée en public et surtout que Derek ne se soit pas encore soucié d’elle.

    Ne fais pas attention à lui, lui recommanda Meredith. Il dit n’importe quoi. Elle la prit dans ses bras. Ça me fait plaisir de partir avec toi. Elle était sincère. Elle connaissait mal Callie mais uniquement parce que c'était l'amie de Derek et de Mark, elle l'appréciait et elle était toute disposée à sympathiser avec elle. Elle espérait même que ces vacances les rapprocheraient et leur permettraient de devenir de vraies amies.

    Moi aussi, je suis contente que tu viennes avec nous, répondit Callie en lui rendant son étreinte, sous le regard attentif de Derek. Elle aussi était sincère. Grâce à Meredith, Derek avait changé d'avis et décidé de venir à Aspen, ce qui rendait ces vacances beaucoup plus intéressantes pour Callie. Ce serait bien le diable si elle n'arrivait pas à se ménager quelques moments privilégiés avec lui. Et puis, même si elle avait un peu de mal de l'admettre, elle aimait bien Meredith. C'était une vraie gentille et son côté naturel, parfois même un peu enfantin, était attendrissant. De plus, ce ne serait peut-être pas inutile d'avoir une alliée pour se défendre face aux attaques perfides de Mark. C'est bien que vous soyez là, ajouta-t-elle en passant des bras de Meredith à ceux de Derek. Je ne sais pas si j'aurais supporté de passer toute une semaine seule avec cet abruti. Mark ricana.

    Ne me dis pas que tu fais encore attention à ses vacheries, dit Derek. Comme si tu ne le connaissais pas !

    Il y a des vacheries auxquelles on ne s’habitue jamais, répliqua Callie avant de lui passer la main dans les cheveux, dans un geste qui lui était familier. Tu vas bien, toi ? Elle plongea ses yeux dans ceux de son ami, ressentant à nouveau l'émotion qui la prenait à chaque fois qu'il la regardait avec affection.

    Mais oui ! Pourquoi je n'irais pas bien ?

    Inconsciente des sentiments que cette scène, en apparence si innocente, faisait naitre chez Callie, Meredith les regardait en souriant, en pensant à nouveau à la beauté de l'amitié qui unissait le trio de chirurgiens. Par contre, l'attitude de Callie hérissa Mark qui se promit, dès qu'il en aurait l'occasion, de demander à sa camarade d’avoir un peu plus de retenue. Heureusement, Meredith ne se doutait de rien et elle ne semblait pas prendre ombrage de ce qu'elle voyait. Comment aurait-elle pu soupçonner quoi que ce soit ? Elle était si pure qu’elle pensait que le monde entier était comme elle. Mal à l’aise devant l’aparté qui se prolongeait entre les deux autres, il la prit par les épaules. Dis donc, toi, tu ne m’avais pas promis un petit-déjeuner ?


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  • Mais bien sûr, tout est prêt. Je dois juste faire cuire les œufs et les pancakes, indiqua la jeune fille.

    Je vais t'aider, déclara Derek, en se dégageant des bras de Callie.

    Celle-ci allait les suivre dans la cuisine quand elle se sentit tirée en arrière par le capuchon de sa veste. Elle se retrouva face à Mark qui avait manifestement l'air mécontent. Il me semblait avoir été suffisamment clair, l’autre jour, grommela-t-il entre ses dents. Et pourtant, vu ce que je viens de voir, j’ai l’impression que tu n’as pas tout compris.

    Fous-moi la paix ! lui ordonna-t-elle. Elle voulut s'en aller mais il la retint solidement par les poignets. Qu'est-ce qui te prend ? Lâche-moi !

    Laisse-le tranquille ! Oublie-le ! martela-t-il en détachant chaque syllabe de chaque mot. Et cesse de le tripoter comme ça, surtout devant elle.

    La voix de Meredith leur parvint depuis la cuisine. Vos œufs, vous les voulez comment ? Brouillés ou sur le plat ?

    Callie sauta sur cette perche pour ne pas répondre à Mark. Sur le plat pour moi, si ça ne te dérange pas. Elle se dégagea sèchement de l'étreinte de son ami et se dirigea vers la cuisine. C'est vraiment sympa que vous ayez prévu un petit-déjeuner. Comme Mark est venu me chercher plus tôt que prévu, je n'ai pas eu le temps de manger. Mark la suivit en soupirant. Il commençait à craindre pour sa tranquillité. Pourvu qu’il ne doive pas passer la semaine à la surveiller !

    Pendant que ses amis appréciaient le petit-déjeuner qu'elle avait prévu pour eux, se servant copieusement de tout, Meredith regarda sa montre à maintes reprises, trompant son impatience en passant et repassant une lavette humide sur le plan de table qui était pourtant impeccablement propre et frottant énergiquement des taches imaginaires sur la plaque vitrocéramique. Elle en venait à regretter d'avoir préparé tant de choses car Mark et Callie semblaient mettre un point d'honneur à vouloir goûter de tout, prolongeant ainsi ce petit-déjeuner au-delà de ce que la jeune fille trouvait raisonnable, compte tenu des circonstances. Mark s'apprêtait à beurrer son quatrième toast quand il remarqua qu'elle passait d'un côté à l'autre de la cuisine, son chiffon à la main, le regard rivé sur sa montre. Elle semblait fort nerveuse et il devina qu'elle craignait d'arriver en retard à l'aéroport. Il repoussa aussitôt son assiette. Mes enfants, si on ne veut pas rater l'avion, il vaudrait mieux se mettre en route. Meredith se tourna vers lui avec un regard reconnaissant et il eut l'impression d'être le Messie.

    Laisse-moi au moins le temps de finir mon pancake, protesta Callie. Y a pas le feu quand même !

    Je ne veux pas prendre le risque d'être coincé dans les embouteillages, répliqua Mark. De toute façon, tu ne vas pas me dire que tu as encore faim avec tout ce que tu as mangé ! Il ignora le regard sévère que lui lançait Derek. Et si c'est le cas, tu pourras te prendre quelque chose à l'aéroport, conclut-il en apportant son assiette à Meredith.

    Termine ton pancake à ton aise, dit Derek à son amie. Je vais aider Meredith à ranger et à faire la vaisselle pendant que Mark met nos bagages dans la voiture.

    Va plutôt donner un coup de main à Mark, lui conseilla Meredith. Ici, il n'y a plus grand-chose à faire, je peux me débrouiller seule. Moins de dix minutes plus tard, la vaisselle était lavée et rangée et les restes du petit-déjeuner à la poubelle. Quand elle arriva dans le hall, Callie était assise sur les marches de l'escalier, en train de discuter avec les deux hommes qui venaient juste de rentrer.

    Ah la voilà ! s'exclama Mark. On peut partir.

    Tu n'as rien oublié ? demanda Derek à sa petite amie.

    Elle lui jeta un regard catastrophé. Pourquoi tu dis ça ? Tu me fais douter maintenant.

    Oublie ce que j'ai dit, recommanda Derek. On y va.

    De toute façon, même si tu as oublié quelque chose, ce n'est pas un drame, intervint Callie. Il y a plein de chouettes petites boutiques à Aspen. Même quand tu n'as besoin de rien, c'est difficile de résister à la tentation.

    Oh je crois que ce sera assez facile pour moi, vu l'état de mes finances, répondit Meredith sur un ton espiègle.

    Bah ne t'en fais pas pour ça, Derek est là. Offrir des cadeaux, c'est son nouveau dada apparemment, lâcha Callie en observant attentivement sa french manucure pour éviter de croiser le regard désagréablement surpris de Derek qu'elle sentait peser sur elle. En effet, il était interloqué par ce qui ressemblait à une allusion perfide mais il s’abstint de tout commentaire devant Meredith, se promettant toutefois d'en discuter avec Callie dès qu'il le pourrait.

    Meredith ne savait pas non plus comment prendre ce commentaire qui semblait plein de sous-entendus. C'est vrai, Derek est quelqu'un de très généreux mais il est hors de question que j'en profite, se contenta-t-elle de dire, un peu sur la défensive. Ce n'est pas pour ça que je suis avec lui.

    Callie releva les yeux de sa main pour regarder Meredith avec un air narquois. Comme c'est mignon ! susurra-t-elle.

    Avant qu'elle ait eu le temps de réaliser ce qui se passait, elle se retrouva à l'extérieur de la maison, tirée par la poigne solide de Mark. Mesdames, vous parlerez chiffons plus tard. Il est temps de partir. Tenant Callie par le bras, il l'entraina d’un pas vif vers la voiture tandis que Derek, toujours dans l'incompréhension quant à l'attitude de son amie, aidait Meredith à enfiler son manteau.


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  • A quoi tu joues ? grogna Mark, fou de rage, à l'intention de Callie. C’est quoi, ces allusions à la con ? Je te préviens, enchaina-t-il sans lui laisser le temps de se défendre, si tu continues, je te jette sur le bord de la route avant d’arriver à l’aéroport. Et tu sais que je n’hésiterai pas à le faire. Laisse cette fille tranquille, lui commanda-t-il encore. Elle ne t’a rien fait. Et elle n’a pas besoin de ça après ce qu’elle a vécu.

    Il avait raison, Callie le savait parfaitement. Et en soi, elle n'avait rien contre Meredith. Au contraire, elle la trouvait charmante et aimable. S’il n’y avait pas eu Derek entre elles, elles auraient sans doute même pu devenir des amies. Désolée. C'était moche de ma part, reconnut-elle. Je ne sais pas ce qui m’a pris.

    Oh si tu le sais très bien ! rétorqua Mark. Et je le sais aussi. Mais elle, elle ne doit jamais le savoir. OK ?

    Callie soupira. OK. Elle se retourna et vit Derek qui arrivait main dans la main avec Meredith, vêtue d’un magnifique manteau bleu. Elle s'y connaissait suffisamment en mode féminine pour savoir dans quelle gamme de prix se situait le vêtement. Malgré la promesse qu’elle venait de faire, elle ne put s’empêcher d’afficher un petit sourire ironique.

    Mark suivit son regard et, tout en la poussant de force dans la voiture, siffla d’admiration. Mer, tu es splendide ! Ce manteau te va comme un gant.

    Meredith rosit de plaisir. Oh merci, c'est gentil. Il est beau, hein ? C'est Derek qui me l'a offert.

    Oui, il est magnifique et il te va très bien, jugea sincèrement Callie. Mais tu n’as aucun mérite, pensa-t-elle. Tu es le genre de nana qui serait élégante même dans un sac poubelle. Jalouse, elle posa la main sur la manche de Mark, pour attirer son attention. Ce n'est pas pour ça qu'elle est avec lui, hein ! murmura-t-elle pour qu'il soit le seul à l’entendre. Quelle chance ! Sinon, qu’est-ce que ça serait ? Ce pauvre chéri serait ruiné en moins de temps qu’il n’en faut pour le dire.

    Ta gueule ! éructa Mark d’une voix sourde. Il referma la portière en la claquant violemment. Quelques secondes plus tard, Derek s’installait à ses côtés, tandis que Meredith prenait place derrière, avec Callie.

    La voiture avait à peine démarré que Callie, les yeux brillants d’envie, se mettait à caresser la manche du manteau de sa voisine. Oui, vraiment, il est très beau. On voit que c'est de la qualité. Et il doit être agréable à porter.

    Oh oui ! Il est tout doux, tout chaud, confirma Meredith en se pelotonnant dans son vêtement. Quand on sera à Aspen, tu l’essayeras si ça te dit.

    Mark, qui avait placé son rétroviseur de façon à pouvoir surveiller ce qui se passait dans son dos, tendait l’oreille pour également savoir ce qui se disait. En entendant la proposition de Meredith, il ne put s’empêcher de se moquer. Ça ne servira à rien. Elle ne rentrera pas dedans. Il soutint le regard assassin que lui envoya Callie qui avait relevé brusquement la tête. Il voulait qu’elle soit consciente qu’il était prêt à lui pourrir l’existence si elle ne renonçait pas à ses chimères.

    Mark, dit Derek sur un ton légèrement désapprobateur. J’aimerais que les vacances se passent dans une bonne ambiance.

    T’inquiète pas ! J’y veille justement, répliqua Mark.

    Bien que n'appréciant pas la mauvaise plaisanterie de de dernier, Meredith ne fit aucun commentaire, pour ne pas rajouter à l'humiliation que Callie venait de subir. Elle se contenta de prendre la main de cette dernière et de la serrer pour lui faire comprendre qu'elle la soutenait. Ne voulant pas susciter la pitié, Callie retira sa main et haussa les épaules pour faire croire qu'elle n'avait pas été touchée par les propos de son ami. Mais elle appréciait le réconfort que Meredith venait de lui apporter et pour le lui faire comprendre, elle voulut renouer la conversation avec elle sans trop savoir, cependant, quel sujet aborder. A part Derek, qu’avaient-elles en commun ? Et à cause de Mark, c’était devenu un sujet tabou. En désespoir de cause, elle revint sur la mode. Moi, j'aimerais bien avoir un long manteau en mouton retourné. J'en ai toujours rêvé.

    Et tu n'en as jamais trouvé ? demanda Meredith avec intérêt.

    Pas comme je veux. Le problème, c'est que j'ai une idée bien précise en tête, lui confia Callie.

    On pourrait faire les boutiques à Aspen, proposa Meredith. Peut-être que là, tu trouveras ce que tu cherches. Callie acquiesça d'un signe de tête.

    Mark ricana. Un manteau en mouton retourné ! Tu n’as pas peur du ridicule. Dans le genre brebis obèse, tu vas te poser là, ma pauvre ! Il haussa les épaules pour répondre au regard lourd de reproches que lui lança Derek. Mais il ne put s’empêcher de se sentir coupable en voyant les yeux de Callie se remplir de larmes. Il connaissait mieux que quiconque les complexes qu’elle avait au sujet de son embonpoint et le combat acharné qu’elle lui livrait depuis toujours. Mais tant pis ! Elle n’avait qu’à ne pas le provoquer. Elle l’avait cherché, elle l’avait trouvé !

    Cette fois, Meredith ne put rester muette. Ça suffit maintenant ! explosa-t-elle. Qu'est-ce qui te prend ? Tu n'arrêtes pas de l'attaquer sur son physique depuis que vous êtes arrivés. C'est horrible pour elle et nous, ça nous met mal à l'aise. Et c'est ridicule en plus, parce que je crois savoir que tu t'accommodes assez bien de ses rondeurs, en temps normal. Elle reprit la main de Callie qui la remercia avec un sourire triste. Ne l'écoute pas, il ne dit que des conneries. Moi, je te trouve parfaite comme tu es, et vraiment très attirante. Elle demanda l'approbation de son amant pour donner plus de poids à ce qu'elle venait de dire. Tu ne trouves pas, Derek ?


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  • Oui, sans doute, répondit prudemment l'intéressé, embarrassé.

    Meredith fronça les sourcils. Comment ça, sans doute ? Tu ne sais pas si tu la trouves attirante ?

    On est ami, se défendit maladroitement Derek. On ne regarde pas ses amis de la même façon que les autres personnes.

    Mais l'amitié ne te rend pas aveugle quand même, répliqua Meredith avec un accent moqueur. Je considère Mark comme un ami mais ça ne m'empêche pas de trouver que c'est un bel homme, et si je n'étais pas avec toi, je pourrais sans doute être attirée par lui, ajouta-t-elle sans se rendre compte que ses propos étaient comme un couteau qui s'enfonçait dans le cœur de Mark. Alors, imagine que nous ne sommes pas ensemble et que Callie n’est pas ton amie, et que tu la rencontres pour la première fois. Tu n'aurais pas envie de sortir avec elle ?

    Derek sentit peser sur lui le regard ironique de Mark, tout comme celui, subitement intéressé, de Callie. Il tenta une fois encore de noyer le poisson. Tu es la seule femme avec qui j'ai envie de sortir, tu le sais quand même. Et puis, j'ai du mal de me projeter dans quelque chose qui n'est pas réel. Callie, ce n'est pas une femme pour moi, c'est mon pote. Je n'arrive pas à imaginer qu'il se passe quoi que ce soit d'autre que de l'amitié entre nous. Il se détesta pour ce mensonge, mais que pouvait-il dire d’autre ? Il commença à penser que partir en vacances avec sa petite amie et sa maîtresse occasionnelle, n’était peut-être pas la meilleure idée qu’il ait eue.

    Callie tourna la tête vers l’extérieur pour cacher les larmes qui affluaient à nouveau dans ses yeux. Elle comprenait qu'en présence de Meredith, Derek ait voulu sauver la face mais ce qu'il avait dit n’en était pas moins douloureux à entendre. Jamais encore, il n’avait renié cet aspect de leur relation. Mais là, en quelques mots, il venait d’anéantir ce qu’elle s’obstinait à prendre, depuis des années, pour une forme très particulière d’amour.

    Meredith jeta un regard en coin à Callie et supposa qu'elle était blessée. Elle s'en voulut d'avoir tellement insisté pour obtenir une réponse de Derek lequel, selon toute vraisemblance, ne trouvait pas du tout les courbes généreuses de Callie attirantes. Mais c'est à lui qu'elle en voulait surtout, parce qu'il n'avait pas eu la présence d'esprit ou l'envie de dire ce qu'il aurait fallu pour atténuer la dureté des attaques de Mark. En quoi était-ce si difficile de dire à une très bonne amie qu'elle était belle, même si on ne le pensait pas vraiment ? Eh bien, désolée de vous le dire mais vous n'avez pas aucun goût ! Parce que quand je pense aux filles que vous vous êtes tapés, les Laurel et les Annabel, ou ta Linda Love, ajouta-t-elle à l'intention de Mark qu'elle regardait à travers le rétroviseur, y a pas photo ! Callie est de loin bien plus belle que ces filles-là. D'ailleurs, moi, si j'étais un homme, je ferais tout pour sortir avec elle et je vous jure bien que je ne la laisserais pas partir, parce qu'en plus d'être jolie, elle est intelligente.

    Merci, murmura Callie avec gratitude. Elle était d'autant plus touchée par ce plaidoyer qu'elle le sentait totalement sincère. Oui, décidément, c'était difficile de ne pas apprécier cette fille. Elle se promit de faire l'effort d'apprendre à la connaitre et surtout de de ne plus rien tenter avec Derek tant qu'il serait avec elle. Quant à Mark, s’il comptait sur elle pour agrémenter son séjour, il se faisait des illusions. Puisqu'il s'était moqué de ses rondeurs, il pourrait faire une croix dessus. Cette année, elle en ferait profiter les moniteurs de ski.

    Comprenant qu'il avait déplu à Meredith qui, manifestement, évitait maintenant de croiser son regard dans le rétroviseur, Mark décida de s'amender pour rentrer dans ses bonnes grâces. Je suis désolé. Mais, Callie et moi, on est un peu à couteaux tirés, ces derniers temps.

    Oui, ça, on s'en est rendu compte, déclara sèchement la jeune fille. Mais ce n'est pas une raison pour lui parler comme tu l'as fait. Moi, je sais ce que c'est que d'être jugée sur son apparence. J'ai vécu ça toute ma vie et je peux te dire que ça fait très mal. Alors, quand ça vient d'un ami, en plus !  

    En entendant ces mots, Mark se sentit vraiment mal. Il s’en était pris avec véhémence aux filles de la clinique pour ce qu’elles avaient fait à Meredith et, pourtant, à peu de choses près, il venait de faire subir le même affront à Callie, qui était une amie fidèle en plus. Il lui jeta un regard plein de repentir. Je te demande pardon, Cal. Je ne voulais pas te blesser. Il lui fit un de ces sourires charmeurs dont il avait le secret. Mais tu sais que je les aime bien, tes rondeurs. Au moins, on a quelque chose à se mettre sous la dent.  

    Derek s'esclaffa tandis que Callie ne pouvait s'empêcher de sourire. Je suppose que je dois le prendre comme un compliment ? demanda-t-elle.

    Mais c'en est un ! assura Mark. Il se sentit fondre en surprenant, dans le rétroviseur, le sourire tendre qui étirait les lèvres de Meredith, alors qu’elle le gratifiait d’un clignement des yeux en guise d’approbation. Il eut l’impression de voir en elle une mère bienveillante qui pardonne à son enfant la faute qu’il a commise. C’était un peu le monde à l’envers. Mais, ces derniers temps, le monde de Mark était bouleversé alors, il s’en étonna à peine. Il se sentit tout revigoré. Allez, on fait table rase de tous ces bazars et on repart sur de bonnes bases. Et, en ce qui me concerne – il se retourna rapidement vers Callie – j’oublie ce qui s’est passé.

    Meredith et Callie se regardèrent, stupéfaites et amusées en même temps. Alors, ça, je n’y crois pas, dit la première.

    C'est ce qu'on appelle avoir du culot, ajouta la seconde.

    Derek apporta la conclusion qui s’imposait. Tu aggraves ton cas, mon vieux ! Le quatuor éclata de rire. Derek se retourna pour échanger un regard complice avec Meredith. Il était maintenant convaincu que la semaine se déroulerait sans encombre. Il avait la chance d’avoir des amis sincères et dévoués sur qui il pouvait compter, et une petite amie adorable qui se contentait de ce qu’il était prêt à lui donner. Oui, vraiment, ce séjour à Aspen s’annonçait sous les meilleurs auspices.


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