• Derek fit quelques pas dans le couloir, prêtant l’oreille à chaque fois qu’il passait devant la salle de bains, résistant à l’envie d’y pénétrer. Après un temps qu’il jugea raisonnable, il frappa à la porte et, n’obtenant aucune réponse, se résolut à la pousser pour y passer la tête. Tout va bien, bébé ? Tu n’as besoin de rien ? demanda-t-il d’une voix forte pour couvrir le bruit de l’eau qui coulait.

    Si tu as un moyen de faire disparaitre instantanément tous ces hématomes, je suis preneuse, répondit Meredith avec amertume.

    Bien que la porte de la douche soit faite d’une vitre opaque, Derek pouvait voir la tache foncée qui ornait le dos de la jeune fille. C’est impressionnant, je sais. Mais c’est comme pour ton visage, ça partira, je te le promets. Il faut juste que tu sois patiente.

    Ça, ce n’est pas mon fort, avoua Meredith en fermant le robinet. Elle entrouvrit la porte vitrée pour y passer la tête et tendre le bras vers la serviette de bains qu’elle avait préparée. Derek se précipita pour la lui donner. Elle sortit de la cabine de douche en serrant la serviette autour de sa poitrine. Je sais que ça va partir avec le temps mais je voudrais qu’ils ne soient déjà plus là, parce qu’à chaque fois que je les vois, je revis ce qu’il m’a fait et c’est insupportable, expliqua Meredith. Comment veux-tu que je passe à autre chose si je n’arrête pas d’y penser ?

    Derek la regarda avec un air compatissant. Je sais que c’est banal, ce que je vais dire, mais je crois qu’il faut laisser du temps au temps. Et peut-être que tu devrais te faire aider.

    Meredith fronça légèrement les sourcils. Par un psy, tu veux dire ?

    Par exemple, dit prudemment Derek. Il existe des services d’assistance aux victimes.

    Meredith s’assit sur le bord de la baignoire en soupirant avec lassitude. Je sais mais… je n’ai pas très envie de parler de ça à des inconnus.

    Derek ne put s’empêcher de sourire. Et c’est toi qui me dis ça ? Si je me souviens bien, tu veux être psy, non ?

    Je n’ai encore rien décidé, répliqua Meredith avec une parfaite mauvaise foi. Et puis, c’est pas pareil.

    Derek s’assit à côté d’elle. Ce sont des professionnels, bébé. Ils savent ce qu’ils font. Je suis persuadé que ça te ferait beaucoup de bien. Elle resta muette, se recroquevillant un peu sur elle-même, regardant obstinément ses pieds. Derek lui prit la main. Regarde-moi, je t’en prie.

    Elle obéit. Je ne sais pas si je pourrais parler de ça à quelqu’un que je ne connais pas. C’est tellement intime.

    Mais parle-moi alors ! s’écria Derek.

    Mais je ne peux pas ! riposta Meredith en élevant également la voix. Est-ce que tu te rends compte à quel point c’est dur pour moi de te parler de ça ? C’est tellement humiliant.

    Et pour moi, pour moi, tu crois que ce n’est pas dur ? La voix de Derek se cassa. Penser à ce que ce type t’a fait… et moi, qui n’ai pas pu l’en empêcher.

    Arrête de dire ça, murmura Meredith. Ce n’est pas de ta faute.

    Tu ne pourras jamais m’empêcher de penser que ça l’est un peu, déclara Derek sur un ton douloureux. Il passa son bras autour des épaules de son amie. On peut surmonter tout ça, bébé.

    Elle le fixa avec des yeux pleins d’espoir. Tu le crois vraiment ou tu dis ça pour m’encourager ?

    J’y crois, j’y crois vraiment. Mû par un élan, Derek se pencha vers elle et prit ses lèvres avec douceur avant de s’écarter à nouveau. Il faut que tu y croies aussi parce que si je suis le seul…

    Meredith ressentit au plus profond d’elle la détresse qui émanait de lui. Depuis qu’il l’avait trouvée à la boutique, il s’était montré fort, laissant à peine transparaitre ses sentiments, pour la soutenir au mieux mais elle réalisait maintenant à quel point il avait peur pour elle et pour leur relation, lui aussi. Tu n’es pas seul, chuchota-t-elle en nouant ses bras autour de son cou. Si tu y crois, j’y crois aussi.  

    Derek fondit sur sa bouche et la posséda dans un baiser où la tendresse se teintait d’un infime soupçon de désir. Mordillant doucement les lèvres de Meredith après les avoir léchées, il les écarta du bout de la langue et parcourut l’intérieur de sa bouche, allant et venant autour de sa langue en une folle sarabande. Il se détacha quand il sentit la jeune fille trembler dans ses bras. Tu as froid. Il lui tendit son peignoir de bain. Passe ça, ta serviette est trempée. Il l’aida à passer ses bras dans les manches et referma le vêtement sur elle. Viens, retournons dans la chambre. Il la prit par la taille pour parcourir les quelques mètres qui séparaient les deux pièces. Ça t’a fait du bien, cette douche ?

    Elle haussa les épaules. Oui, ça va.

    Derek lui ouvrit la porte de la chambre. Elle voulut se diriger directement vers la garde-robe mais il la retint. J’aimerais t’examiner avant que tu ne t’habilles. 

    Elle souffla bruyamment. Encore ! Mais pourquoi ? Y a rien qui a changé depuis hier.

    Laisse-moi en juger, tu veux bien ? dit Derek avec un petit sourire.


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  • Meredith alla s’asseoir au pied du lit avec un air contrarié. Après avoir dénoué nerveusement la ceinture de son peignoir, elle fit tomber celui-ci jusqu’à la taille. Voilà ! Admire l’œuvre d’art, persifla-t-elle. 

    Tu es magnifique et ces hématomes n’y changent rien, affirma Derek. Il s’installa derrière elle. Je vais devoir te palper pour déceler la présence éventuelle de fluides.

    Inquiète, elle tourna légèrement la tête vers lui. Et s’il y en a, c’est bon ou mauvais ?

    Il vaudrait mieux qu’il n’y en ait pas, admit-il. Mais s’il y en a, ce n’est pas dramatique. Ça se soigne très bien. Tu n’as aucune raison d’avoir peur. Il commença à effleurer la peau de Meredith, juste en dessous de la nuque, là où l’hématome commençait. Tu as mal ?

    C’est supportable, répondit-elle. Je me suis regardée dans la salle de bains. C’est normal qu’il soit rouge vif ?

    Oui, tout à fait normal, la rassura Derek. Tu ne dois pas t’inquiéter. Sous ta peau, il y a plein de minuscules vaisseaux sanguins qu’on appelle les capillaires. A cause de l’intensité des coups que tu as reçus, bon nombre d’entre eux ont éclaté. Elle lui jeta un regard apeuré. Il posa une main sur son épaule en souriant. Ce n’est rien, ils sont déjà en train de se réparer. Mais le sang qui s’en est échappé s’est infiltré dans les tissus épidermiques. C’est pour cette raison que ta peau est rouge. Dans les prochains jours, la couleur va s’assombrir.

    Et je vais passer par toutes les couleurs de l’arc-en-ciel, conclut Meredith.

    Derek approuva d’un signe de tête. Oui, exactement. Les couleurs vives d'une ecchymose sont dues aux produits résultant de la dégradation de l'hémoglobine. Il pressa légèrement ses doigts sur la surface du dos qui partait des omoplates jusqu’au creux des reins de son amie. Dans les semaines à venir, ta peau va prendre une couleur rouge fade, puis elle pâlira vers le violet, le noir ou le bleu. Quand tu en arriveras au jaune, cela signifiera que tu es guérie.

    Et ça va prendre beaucoup de temps ? questionna Meredith.

    Derek fit une petite mimique pour exprimer son regret. Je te mentirais en disant non. Mais ça se présente bien, bébé, je t’assure. Pour commencer, ta peau est moins enflée qu’hier. Ici, du moins. Il effleura la zone au-dessus de son omoplate gauche. C’est bien, je suis content. Il déposa un baiser sur l’épaule de la jeune fille. Maintenant, je voudrais examiner ton buste. Elle qui, il y a encore deux jours, aurait fait n’importe quoi pour sentir les mains de son amant sur elle, était maintenant affolée à l’idée qu’il la touche. Malgré tout, elle accepta d’un signe de tête. Il vint se mettre face à elle. Bébé, il faut que tu me dises. Est-ce qu’il t’a frappée à la poitrine ? Je veux dire vraiment frappé, à coups de poing ?

    Elle secoua la tête. Non, pas de coups de poings, ni rien de tout ça. Il m’a juste… enfin, il n’a pas été tendre, mais il ne m’a pas frappée à la poitrine. Pourquoi tu me demandes ça ?

    La poitrine est une zone très délicate, lui apprit Derek. Un coup sur la région antérieure peut être la cause d’un cancer. Il croisa le regard horrifié de son amie. Je ne veux rien laisser au hasard, Meredith. Mais, si tu me dis qu’il ne t’a pas frappée à cet endroit…

    Non, non ! Enfin… Elle posa sur lui un regard un peu affolé. Je crois. Ça s’est passé tellement vite et il y a eu tellement de coups. Je ne me souviens pas qu’il m’ait frappée sur les seins. Il les a juste palpés. Très fort. Et il les a empoignés et pincés. Comme ça, tu vois ? Elle prit un sein en main pour faire une démonstration.

    Derek lui saisit la main et la tint dans la sienne. C’est bon, c’est bon, j’ai compris. Tu n’as pas besoin de faire ça.

    Je ne vais pas avoir le cancer alors ? s’enquit-elle sur un ton inquiet.

    Non, bien sûr que non. Derek la serra délicatement contre lui. Excuse-moi, je suis maladroit. Je te fais peur alors que je devrais te rassurer

    Elle se cacha le visage dans le creux de son épaule. Non, tu fais simplement ton métier, tu envisages toutes les possibilités, c’est normal.

    Je crois bien que je fais de l’excès de zèle, là. Derek caressa la chevelure de Meredith avant de la repousser avec douceur. Je voudrais encore vérifier quelque chose. Pour ça, il faut que je palpe tes seins. Tu veux bien ? Elle fit signe que oui. Je serai très délicat, promit-il. Elle hocha la tête encore une fois. Intimidé, et même un peu mal à l’aise, il appuya sur les seins du bout des doigts. C’est douloureux ?  

    Non, pas du tout.

    Je peux continuer ? Comme elle avait marqué son consentement par un clignement d’œil, il dessina le contour de l’aréole du sein gauche avec son index. C’est sensible ?

    Pas du tout, répéta Meredith. C’était tristement vrai. Cet examen médical aurait dû éveiller en elle plein de sensations, compte tenu de l’identité du médecin qui le dispensait, mais ce n’était pas le cas. Elle ne ressentait rien en fait.


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  • Derek, au contraire, était en proie à toutes sortes d’émotions. Il avait beau essayer de se concentrer sur son examen, il n’arrivait pas à faire abstraction de sa patiente. Il s’agissait de la femme qu’il désirait le plus au monde. Et toucher ses seins, même dans un simple effleurement, le troublait au plus haut point. Je vais examiner l’autre maintenant, annonça-t-il. Ça va ? demanda-t-il en entamant le deuxième tour de l’aréole du sein droit.

    Meredith hocha la tête de haut en bas. A sa grande surprise, elle sentit son téton pointer. Cela la perturba. Elle ne ressentait aucun plaisir, alors pour quelle raison son corps indiquait-il le contraire ? Elle eut peur que Derek se méprenne sur ce que cela signifiait, qu’il le voit comme une invitation à aller plus loin et qu’elle soit obligée de le repousser. Je ne comprends pas, murmura-t-elle, les yeux baissés. Je n’ai pas… Je suis désolée.

    Derek retira aussitôt sa main. Pourquoi ? C’est une réaction physique tout à fait normale. Je suis très content d’ailleurs. Ça prouve que tes seins ont gardé leur sensibilité, qu’il n’y a pas de dommage majeur. C’est bien.

    Meredith lui fut reconnaissante d’agir comme si sa réaction était tout à fait normale. D’une certaine façon, elle était surprise de le découvrir aussi délicat. Il aurait pu la questionner, la pousser dans ses retranchements pour savoir ce qu’elle ressentait vraiment, lui faire la morale, lui dispenser des conseils, mais rien de tout ça. Pour qu’elle se sente à l’aise, l’amant s’était effacé devant le médecin. Combien de temps allait-il accepter ça ? Qu’allait-il advenir d’eux si elle ne retrouvait pas le goût du sexe ? Ce serait la fin, elle le savait bien. Cette perspective fit monter les larmes dans ses yeux.

    Derek devina ce qui la tourmentait. C’était à peu près la même chose pour toutes les femmes qui subissaient ce type d’agression. Je sais ce que tu ressens, lui dit-il en serrant ses mains dans les siennes. Je ne veux pas que tu te mettes des idées en tête. Je ne veux pas de zones d’ombre entre nous. Au moment voulu, il faudra que nous en discutions, calmement, sans tabou.

    Il n’y a pas grand-chose à discuter, rétorqua Meredith.

    Maintenant, non, j’en suis conscient. C’est pour ça que j’ai dit au moment voulu. Derek l’empêcha de remettre son peignoir. Hier, j’ai vu que tu avais de grosses ecchymoses sur les cuisses. J’aimerais les examiner si ça ne te dérange pas.

    Meredith hésita quelques secondes, le temps de se raisonner. En ce moment, Derek n’agissait qu’en tant que médecin, pas en tant que petit ami. Et quand bien même ? Il n’avait rien en commun avec George. Elle n’avait rien à craindre. D’accord, dit-elle en ouvrant les pans de son peignoir.

    Derek comprit à quel point c’était dur pour elle d’exposer son intimité à son regard, fut-il professionnel quand il vit qu’elle regardait le plafond. Meredith, si c’est si difficile pour toi…

    Elle lui coupa la parole. Non, vas-y. Fais ce que tu as à faire.

    Alors, allonge-toi au moins, lui suggéra-t-il. Ce sera plus confortable pour toi. Elle se laissa aller en arrière. Tu veux vraiment que je continue ? insista Derek. Elle lui répondit par un grognement. Alors, il posa délicatement la main sur son genou. Je suis vraiment désolé d’avoir à te demander ça mais il faudrait que tu desserres un peu les cuisses, pour que je puisse voir leur face intérieure. Meredith écarta les jambes en serrant les poings.

    La mâchoire du chirurgien se contracta et ses yeux s’assombrirent à la vue de la peau marbrée de noir et de rouge. Bordel ! Qu’est-ce qu’il lui a fait subir pour la marquer à ce point ? pensa-t-il. Et dire qu’il fallait s’estimer heureux qu’elle ne soit pas plus gravement blessée ! Derek se rendit compte que son silence prolongé pouvait sembler inquiétant. On dirait que ça évolue tout à fait normalement, déclara-t-il. Mais pour en être sûr, il faut que je te palpe. Tu veux bien ? Meredith opina de la tête mais se raidit dès qu’il posa les doigts sur l’intérieur de sa cuisse. Tu as mal ? demanda-t-il en retirant précipitamment sa main

    Non, non. Ta main est un peu froide. J’ai été surprise, c’est tout, prétendit Meredith pour ne pas le blesser davantage.

    Je vais faire vite, ne t’en fais pas. Il n’était pas dupe. Ce n’était pas la fraîcheur de ses mains qui indisposait la jeune fille, mais leur contact en lui-même. Très bien, pas de fluides ici non plus, constata-t-il avec satisfaction. Son regard remonta jusqu’au pubis qui était de la même couleur sombre que les cuisses. Il effleura la zone aussi délicatement que possible, essayant de faire abstraction des sensations qu’il ressentait à l’idée de ce que la jeune fille avait enduré et aussi, dans une moindre mesure, parce que ce sexe dont il s’était délecté était devenu par la force des choses un endroit tabou pour lui.

    Et là, ça se présente comment ? se renseigna Meredith.

    C’est impressionnant, reconnut Derek. Ça me fait vraiment comprendre ce que tu as vécu, la violence à laquelle tu as dû faire face. Le salopard, tonna-t-il soudain d’une voix sourde, ne pouvant plus contenir sa rage. Le salaud d’enfant de putain ! Il prit une grande inspiration. Excuse-moi, ça ne sert à rien ce que je fais là, ça ne t’aide pas.

    Meredith sourit légèrement. Si ça peut te soulager, ne te gêne pas pour moi.

    Oui mais le but, ce n’est pas que je me sente mieux. Derek ramassa le peignoir qui était tombé sur le sol et aida son amie à l’enfiler. Voilà, j’ai terminé. Il reprit le plateau du petit-déjeuner. Je vais descendre avec ça. Pendant ce temps-là, tu peux peut-être t’habiller. A moins que tu préfères que je reste avec toi ?

    Non, ça va aller. Je vais me débrouiller, affirma Meredith avec une assurance qu’elle était loin d’avoir. Il faut que je commence à prendre sur moi, de toute façon.


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  • Derek était occupé à ranger la cuisine lorsque la sonnette de l’entrée retentit. Il alla ouvrir et se trouva face à Mark. C’est l’agence immobilière qui m’envoie, claironna celui-ci, avec un grand sourire.

    T’es con ! répliqua Derek en souriant aussi.

    Je sais mais c’est ce qui fait mon charme. Mark haussa légèrement les sourcils en remarquant la tenue de son ami. Encore en pyjama ?

    Si tu crois que j’ai eu le temps de me pomponner, bougonna Derek.

    Des soucis avec Meredith ? s’inquiéta Mark en pénétrant dans la maison.

    Derek le précéda pour retourner dans la cuisine. Elle passe d’une phase de cynisme à une phase de désespoir, déplora-t-il. Elle est pleine de colère et d’appréhension aussi. Elle a très peur pour son apparence.

    Encore ? s’exclama Mark. Pourtant, je lui ai bien expliqué qu’elle n’aurait pas de séquelles.

    Derek soupira. J’ai peur que tu ne doives recommencer. Et n’aie pas peur de forcer le trait surtout. Il jeta un regard en coin à son ami. Du moins si tu es sûr de ton coup.

    Ah non ! Tu ne vas pas t’y mettre, toi aussi ! s’indigna Mark.

    Qu’est-ce qu’il a encore fait ? demanda Meredith qui venait d’apparaitre à l’entrée de la pièce.

    Les deux hommes se tournèrent vers elle et Derek eut un petit mouvement de sursaut en voyant qu’elle était habillée d’un jean et d’une chemise d’homme. Il s’était évertué à lui choisir des tenues sympas mais néanmoins élégantes et sexy et au lieu de ça, elle avait préféré prendre une chemise qui non seulement ne lui appartenait pas mais qui, en plus, était trois fois trop grande pour elle. Ce n’était pas tant qu’elle ait snobé ses choix qui le contrariait, mais plutôt le sentiment qu’elle avait voulu dissimuler sa féminité sous des vêtements larges, ce qui était le comportement typique des victimes d’agression sexuelle. Pourquoi tu as pris cette chemise ? se renseigna-t-il avec un air un peu grognon. Je t’ai rapporté des vêtements.

    Envie de changer de style, lança la jeune fille avant de se tourner vers Mark. Elle est à toi, je suppose ?

    Exact ! Mark s’avança vers elle. Salut, poupée. Il se pencha et lui posa un baiser sonore sur la joue. Elle te va beaucoup mieux qu’à moi, murmura-t-il à son oreille. Garde-la.

    Meredith lui sourit. Merci. Et merci pour la maison aussi. C’est très gentil de ta part de nous la prêter. Derek m’a dit que la vue était superbe On voit le Golden Gate, il parait.

    Marc acquiesça d’un signe de tête. Ouais, c’est un endroit sympa. Mais bon, tu verras, c’est rien d’extraordinaire. Juste une vieille petite bicoque, pas très loin d’ici. Mais je crois que vous y serez bien.

    A propos, il faudrait que je passe chez moi pour prendre quelques affaires, intervint Derek. Il sollicita son ami du regard. Ça ne te dérange pas de rester avec Meredith, le temps que je fasse l’aller-retour ?

    Non, penses-tu ! Mark posa sa main sur la frêle épaule de la jeune femme. J’en profiterai pour l’examiner et m’auto-congratuler pour mon immense talent. Il se tourna vers Meredith et feignit d’être fâché. Parce que si je dois attendre après toi…

    Je ne veux pas être désagréable mais jusqu’à présent, je n’ai rien vu de concluant, répliqua-t-elle en soutenant le regard sévère de Mark.

    Bon, je vais vous laisser vous chamailler, annonça Derek sur un ton où perçait un léger amusement. Je monte prendre une douche et m’habiller. En passant à côté de son amie, il l’embrassa dans le cou avant de grimper l’escalier, deux marches par deux.

    Bon, à nous deux ! Mark tendit la main à Meredith. Viens par ici, toi. Il l’amena à la table et la fit asseoir, le visage tourné vers la lumière du jour. Il s’assit face à elle, le front plissé. Alors, on continue à douter de moi ? Elle fit une moue en haussant un peu les épaules. Il va falloir que je te le dise en chinois pour que tu admettes que je ne me trompe jamais ? grommela Mark. Tu mériterais que je reprenne ma chemise.

    C’est pas que je doute de toi, déclara Meredith. Je veux te croire mais quand je vois mon visage, les blessures, les hématomes… je ne dis pas que je vais être défigurée mais j’ai du mal de croire que je vais retrouver le visage que j’avais avant.

    Bon écoute, petite, je suis un gentil gars mais j’ai un gros défaut, je n’aime pas me répéter, dit Mark sur un ton menaçant. Et là, tu commences vraiment à m’énerver. Il la vit froncer les sourcils, prête à riposter, et se mit à rire. Tu ne marches pas, tu cours. C’est trop facile avec toi. Elle leva les yeux au ciel sans pouvoir s’empêcher de sourire. Il hocha la tête en la regardant avec un air attendri. Ah toi ! Tu pourras dire que tu m’en as fait voir. Il lui tapota la main. Je comprends que tu aies des doutes mais ça ira. Fais-moi confiance. Ça ira. D’ici quelques semaines, tu auras le nouveau le même joli petit minois, je te le promets.

    D’accord, dit-elle sans vraiment croire ce qu’il lui disait. Mais il était tellement gentil qu’elle ne voulait pas le vexer.

    Bien. Laisse-moi te regarder maintenant.


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  • Mark prit le menton de Meredith entre deux doigts pour lui faire tourner la figure de droite à gauche. Bien. Très bien même. Lève la tête vers le plafond. Il plissa les yeux en examinant la plaie qu’elle avait au maxillaire inférieur. Joli. Très joli. Superbe.

    Magnifique même ! persifla Meredith. Je ne me suis jamais sentie aussi jolie que maintenant.

    Tais-toi, tu n’y connais rien, grogna Mark. Il passa le doigt sur la blessure qu’il avait suturée par des points. Splendide, du travail d’orfèvre. Il se recula pour pouvoir regarder Meredith dans les yeux. Tu permettrais que je prenne des photos ?

    Elle parut interloquée. Des photos ? De qui ? De moi ?

    Mark prit un air faussement excédé. Ben oui, évidemment. Pas de la voisine. Elle est moche en plus. Alors, tu serais d’accord ?

    Mais pourquoi tu veux me photographier ? demanda Meredith que l’idée ne tentait pas vraiment.

    Tu sais bien, les photos avant-après. L’œil pratiquement collé au visage de Meredith, Mark continua d’examiner son travail avec satisfaction. Je pourrais être amené à les publier dans un prochain traité sur…

    Meredith lui coupa la parole en secouant vigoureusement la tête. Il n’en est pas question ! Tu ne peux pas imaginer sérieusement que je vais accepter que mon visage apparaisse comme il est dans un bouquin qui va être lu par des tas de personnes ?

    Pas des personnes, des médecins, rectifia Mark.

    Même ! couina Meredith. J’ai pas envie qu’on me voie comme ça.

    Pfft ! Tu ne mérites pas que je m’occupe de toi, maugréa Mark. C’est comme donner du caviar à un ado qui est habitué à bouffer la merde de Burger King !

    Mais c’est très bon, Burger King, rétorqua Meredith avec un air provocant. J’aime bien manger chez eux.

    Ma pauvre fille, tu ne sais pas ce qui est bon, riposta Mark qui était heureux de constater qu’elle semblait avoir récupéré un peu de son mordant. Je me demande ce que Derek peut bien te trouver.

    L’attitude de Meredith changea du tout au tout. Moi aussi, avoua-t-elle tristement. Je me posais déjà la question avant, alors maintenant… Je ne sais vraiment pas ce qu’il fait avec moi.

    En voyant ses yeux qui se remplissaient de larmes, Mak eut envie de se donner des claques. Hé mais qu’est-ce que tu… Il se tut en voyant Derek entrer dans la pièce.

    Alors, tout va bien ? Toujours content de ton travail ? lui demanda ce dernier. Meredith tourna brusquement la tête pour qu’il ne la voie pas pleurer.

    Content de mon travail et de ma patiente ! s’exclama Mark en traversant la pièce pour obliger son ami à le suivre du regard, et laisser ainsi à la jeune fille la possibilité de recomposer son attitude. Les mêmes points de suture sur une peau de crocodile ne donneraient pas le même résultat. Mais on a de la chance, ta copine n’est pas un crocodile.

    Meredith émit un petit rire à travers ses larmes. Je suppose que c’est un compliment, alors, merci.

    Derek entendit à sa voix qu’il y avait quelque chose qui n’allait pas. Il allait se précipiter vers elle quand Mark l’arrêta d’un signe de tête, accompagné d’un froncement des sourcils. Derek stoppa net mais interrogea son ami du regard. Pas grave, mima Mark avec les lèvres. Coup de mou. Normal. Il connaissait son ami. Avec sa tendance à dramatiser, il ne ferait qu’aggraver la situation. Bon, alors, tu vas chez toi pour prendre des fringues ? reprit-il à voix haute. Si tu veux, pendant ce temps-là, je peux amener Meredith à la maison.

    Ça ne te dérange pas ? s’enquit Derek en ne quittant pas son amie du regard.

    Si ça me dérangeait, je ne te l’aurais pas proposé, fit remarquer Mark.

    Meredith s’était retournée. Derek s’adressa à elle en faisant semblant de ne pas voir qu’elle avait pleuré. Tu es d’accord ?

    En entendant qu’il allait s’absenter pendant un moment, et donc la laisser seule, elle avait senti l’angoisse l’étreindre mais elle n’osa pas le dire. Oui, murmura-t-elle. Mais tu nous rejoins directement après, n’est-ce pas ?

    Mais oui, bien sûr ! Derek alla près d’elle pour la prendre dans ses bras. Le temps que vous fassiez la route et que Mark te fasse visiter, et je serai là. Et puis, m’attendre ici ou là-bas, quelle différence ?

    C’est vrai, admit Meredith en se serrant contre lui.


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