• Contrairement à son amie, Derek, tourmenté par le souvenir des évènements dramatiques et ses réflexions sur ce qui allait suivre, avait eu beaucoup de mal à trouver le sommeil. Il commençait à s’endormir lorsqu’une petite musique se fit entendre, qui le fit sursauter. Il lui fallut un moment pour réaliser qu’il s’agissait de la sonnerie du téléphone de Meredith et il eut besoin de quelques secondes supplémentaires pour comprendre qu’elle sortait du sac de celle-ci. Il se leva à la hâte pour prendre l’appareil dans le but de l’éteindre mais, après avoir vu l’identité de la personne qui appelait, il sortit dans le couloir pour prendre la communication.

    L’attente, qui avait paru interminable à Cristina, l’avait encore plus énervée. Sa fureur explosa dès qu’elle entendit qu’on avait décroché. Nom de dieu, Meredith ! Tu te fous de la gueule de qui ? vociféra-t-elle. Tu te crois en vacances ou quoi ?

    Ça vous dérangerait d’être polie ? contre-attaqua Derek que les circonstances et le manque de sommeil rendaient encore plus irritable que d’habitude. Pour qui est-ce que vous vous prenez, bon sang, pour oser lui parler de cette façon ? Devinant que la discussion allait être houleuse, il descendit au salon pour ne pas prendre le risque de réveiller Meredith.

    Désolée que mon comportement ne vous plaise pas mais j’en ai rien à foutre, riposta Cristina. Alors, épargnez-moi vos leçons de morale à la noix et passez-la-moi.

    Il n’en est pas question ! répliqua Derek.

    Non mais sérieusement, vous croyez que vous avez tous les droits sur elle ? cria Cristina. Passez-la-moi immédiatement !

    Derek s’assit dans le fauteuil mais, trop nerveux que pour rester immobile, il se releva aussitôt. Je ne peux pas vous la passer. Elle dort et de toute façon, elle n’est pas en état de vous parler.

    Cristina haussa le sourcil. Comment ça, pas en état de me parler ? Pourquoi ? Elle est malade ? Vous avez trop fait la fête hier ?

    Derek ricana. Sacrée fête, oui !

    Izzie ressortit de la salle de bain, un tube de mascara à la main. Meredith n’est pas bien ? Elle a encore fait un malaise ?

    Cristina lui fit comprendre par l’expression de son visage qu’elle n’en savait rien. Quand vous dites qu’elle n’est pas en état, ça veut dire qu’elle ne va pas pouvoir aller travailler ? s’enquit-elle auprès de Derek. Et donc que George va s’occuper tout seul de la boutique ? Cette perspective la catastropha.

    La boutique ! s’exclama Derek, plein de mépris. Vous n’avez vraiment que ce mot-là à la bouche. Ça vous arrive de penser à autre chose ?

    Excusez-moi d’être pragmatique mais j’ai un commerce à faire tourner, moi, riposta la jeune femme. Si on se plante, ça voudra dire, retour au Kentucky et j’ai l’impression que ça ne vous arrangerait pas. Vous devriez y penser quand vous voulez mettre Meredith au repos à chaque fois qu’elle a une petite migraine. 

    Une petite migraine ! tonna Derek. Elle s’est fait agresser, pauvre conne !  

    Les battements du cœur de Cristina s’accélérèrent. Agresser ? répéta-t-elle en faisant signe à Izzie de venir s’asseoir à ses côtés. Attendez, je branche le haut-parleur pour Izzie, indiqua-t-elle avant de poser les questions qui la préoccupaient. Qu’est-ce qui s’est passé ? Un cambriolage ? Meredith n’a pas voulu donner l’argent, elle a résisté ?

    Izzie agrippa le bras de son amie. Elle est blessée ?  

    Non, ce n’est pas un cambriolage, répondit Derek. J’aurais préféré. Cristina fronça les sourcils. Et oui, elle est blessée, poursuivit Derek.

    Mais qu’est-ce qui s’est passé ? insista Cristina. Elle a été blessée comment ?

    Elle a été victime d’une tentative de viol, révéla enfin Derek avec la ferme intention de ne pas donner plus de détails. Ce serait à Meredith de le faire si elle le désirait. Il entendit les exclamations horrifiées des deux jeunes femmes.  

    Co… comment ? balbutia Cristina, en regardant avec effroi Izzie qui semblait tétanisée, la main sur sa bouche ouverte. C’est pas possible. Mais qui… qui a fait ça ?

    Qui ? s’écria Derek en levant les yeux au ciel parce qu’il ne comprenait pas qu’elle puisse lui poser la question, tant la réponse lui semblait évidente. Mais votre super ami d’enfance qui l’a laissée pour morte dans votre saleté de boutique où elle faisait des heures sup’, pendant que vous preniez du bon temps à la campagne.  

    Cristina et Izzie se regardèrent avec un air abasourdi. Ne me dites pas que vous parlez de George, là, dit enfin Cristina après un long silence.

    Pourquoi ? Vous avez d’autres amis capables de faire ce genre de choses ? persifla Derek.

    George ? répéta Cristina, hébétée, tandis qu’Izzie se mettait à pleurer. Notre George ? Mais… mais c’est pas possible, balbutia Cristina. Il a plein de défauts et ces derniers temps, il s’est mal conduit avec Meredith, je l’admets, mais… Elle secoua la tête. Non, il n’a pas pu faire une chose pareille. Elle qui était habituellement si dure, sentit des larmes s’échapper de ses yeux.    

    Qu’elle mette en doute ce qu’il lui disait irrita Derek au plus haut point. Si vous croyez que j’inventerais un truc pareil !


    2 commentaires
  • Non, évidemment non ! Ce n’est pas ce que je veux dire, protesta Cristina en essuyant ses yeux. Mais comprenez-moi, c’est tellement incroyable. Elle prit la main d’Izzie. Et Meredith, comment elle va ?

    Derek se radoucit un peu en percevant, dans l’intonation de la jeune femme, qu’elle était réellement heurtée par ce qu’elle venait d’apprendre. Comment voulez-vous qu’elle aille après ça ? Mal, bien sûr. Ce salaud ne l’a pas ratée. La gorge serrée, il commença à énumérer les séquelles des sévices qu’avait subis Meredith. Elle a de multiples contusions sur le corps et des hématomes assez sérieux au niveau de la poitrine et du dos. Tout en parlant, des images du corps meurtri de son amie lui revenaient en mémoire et il dut faire un effort pour continuer. Le plus impressionnant, c’est son visage. Arcade sourcilière fendue, pommette éclatée, plusieurs plaies ouvertes, des griffes…

    Izzie et Cristina écoutèrent avec stupéfaction le chirurgien dresser la liste impressionnante des blessures de Meredith. Comment est-ce possible ? fit Cristina d’une voix à peine audible.

    Il l’a battue, indiqua Derek, la mâchoire contractée. Elle ne s’est pas laissé faire alors, il le lui a fait payer.

    Cristina avala sa salive avec difficulté. Excusez-moi de vous demander ça, mais… vous avez dit qu’elle avait été victime d’une tentative de viol. Ça veut dire qu’il n’a pas… qu’il n’a pas réussi ?

    Pas comme il l’aurait voulu en tout cas, répondit Derek. A un moment, elle a pu prendre un couteau et elle l’a menacé, alors il s’est enfui.

    Tant mieux, se réjouit Cristina.

    Mais… et maintenant ? Ca va ? s’enquit Izzie. Elle n’est pas en danger, n’est-ce pas ?

    Non, non, elle n’est absolument pas en danger, la rassura Derek. Sur le plan physique, dans quelques semaines, il n’y aura plus de traces de ce qu’elle a subi. Quant au reste… Elle est bouleversée, bien sûr. Elle ne comprend pas. Sa voix se cassa mais il se reprit rapidement. Il va lui falloir du temps pour se reconstruire. Mais elle va s’en sortir, j’en suis sûr.

    J’en suis sûre aussi. C’est une battante, notre Meredith ! affirma Cristina.

    Et… et lui ? se renseigna timidement Izzie qui était partagée entre le dégoût pour ce que son cousin avait fait à leur amie et l’attachement qu’elle éprouvait pour lui malgré tout.

    Il a réussi à s’échapper et j’espère pour lui qu’il est parti vraiment très loin parce que si jamais je le recroise un jour… Derek laissa sa phrase en suspens.

    Moi aussi, bon sang ! Quel salaud ! lança Cristina sur un ton rageur.

    Je ne sais pas quoi dire, gémit Izzie. C’est épouvantable. Quand je pense que c’est mon cousin… Je suis tellement désolée, si vous saviez.

    Ce n’est pas de votre faute, dit Derek pour la réconforter. On ne choisit pas sa famille malheureusement.

    Mais ses amis, oui, rétorqua Cristina, le regard déterminé. Et en ce qui me concerne, le choix est fait. Ce salaud est mort pour moi. En tout cas, dites à Meredith qu’on pense à elle et que… que… Elle laissa échapper un sanglot étouffé. Qu’est-ce qu’on peut dire dans ces cas-là ?

    Derek soupira. Je vous avoue que je ne le sais pas trop moi-même. C’est dur de trouver les mots justes.

    Dites-lui qu’elle peut compter sur nous, pour quoi que ce soit, déclara Izzie.

    Oui. On sera de retour dans la journée, ajouta Cristina. Le temps de faire la route.

    On va laisser la clé de la boutique à la clinique, lui apprit Derek. Vous n’aurez qu’à la demander à l’accueil. Et il y aura l’argent de la caisse aussi. J’ai préféré le reprendre parce que votre copain avait manifestement des vues dessus.

    En plus ! s’exclama Cristina. L’enfoiré ! Vous avez bien fait. Merci. La conversation prit fin après les salutations d’usage. Atterrées, les deux amies restèrent silencieuses un long moment. Cristina fut la première à se ressaisir. J’arrive pas à y croire, dit-elle avec un air incrédule. Je n’ai jamais eu beaucoup d’estime pour ton cousin mais je ne l’aurais jamais cru capable d’un truc pareil. 

    Izzie hocha la tête. Moi non plus. Et pourtant, il n’y a pas de doute à avoir. Si Meredith le dit… La pauvre, j’arrive même pas à imaginer ce qu’elle doit ressentir.   

    Ça doit être terrible, jugea Cristina. Elle qui est si confiante… Je n’aurais jamais pensé dire ça mais c’est bien qu’elle ait eu Derek pour s’occuper d’elle quand c’est arrivé.

    Oui. Il a l’air de vraiment tenir à elle, souligna Izzie en se levant pour aller passer de l’eau fraiche sur son visage. Qu’est-ce qu’on va faire maintenant ?

    On va rentrer, décréta Cristina. Je ne veux pas laisser la clé et notre argent à la clinique, on ne sait jamais. Une fois qu’on les aura récupérés, on passera à la boutique pour constater les dégâts. Il faudra faire changer la serrure, et à la maison aussi. Comme ça, ton cousin ne pourra plus venir se servir. Et on va foutre tout son barda à la poubelle. Je ne veux plus jamais avoir affaire à lui. Honteuse, Izzie acquiesça d’un signe de tête avant de se remettre à pleurer. C’est dans une ambiance sinistre que les jeunes femmes firent leurs bagages.


    4 commentaires