• CHAPITRE 986

    La main sur la clenche de la porte du vestiaire, Mark suivit du regard une infirmière qui passait dans le couloir, les bras chargés de dossiers. Les fesses de la jeune femme se balançaient de gauche à droite, dans un lent déhanchement si gracieux que les yeux du chirurgien se mirent à briller d’un éclat singulier. Il ne se rappelait pas avoir déjà vu cette fille à la clinique mais cela n’avait aucune importance. Maintenant qu’il l’avait remarquée, il allait se débrouiller pour faire sa connaissance le plus rapidement possible. Quoi de mieux qu’une petite partie de jambes en l’air dans une salle de garde pour se consoler d’un deuil éprouvant ? Fort de cette bonne résolution, il ouvrit la porte et découvrit Derek, assis sur un banc, les bras appuyés sur ses genoux et les yeux fixés sur ses poings fermés. Encore sous le charme de sa furtive rencontre, Mark n’y prêta pas vraiment attention. Mec, je viens de croiser une nana ! claironna-t-il d’emblée en pénétrant dans la pièce. Une superbe petite blonde. Elle a un de ces culs ! ajouta-t-il avec enthousiasme. Des petites fesses bien rondes qui ne demandent qu’à être croquées. Il fronça soudain les sourcils. Ils ont embauché dernièrement ? Parce que je ne l’avais encore jamais vue. Il faut absolument que je sache qui c’est. Je vais aller me renseigner à la D.R.H tout à l’heure. Il ouvrit son casier et y suspendit sa veste. Y a trop longtemps que je me suis mis quelque chose sous la dent. J’vais finir par oublier comment on fait, plaisanta-t-il avec un petit rire coquin. Non sérieusement, faut que je baise. Ça va me détendre. Franchement, je ne sais pas comment tu fais pour tenir le coup. Etonné de n’obtenir aucune réaction, il se tourna vers son ami. Celui-ci n’avait pas changé de posture et Mark comprit qu’il ne l’avait pas écouté. Peut-être n’avait-il même pas remarqué sa présence. Légèrement vexé, Mark se mit à parler d’une voix forte en faisant toutes sortes de mimiques.  Bonjour, Mark. Tu vas bien, mon pote ? T’as passé une bonne nuit ? Ça me fait plaisir de te voir. Derek resta inerte et muet. Si je t’emmerde, dis-le, bougonna Mark entre ses dents. Il se faisait l’effet d’être un ingrat, surtout après ce que Derek avait fait pour lui à Santa Rosa, mais il lui en voulait un peu de ne plus être aussi disponible qu’avant. Comme il regrettait l’époque où ils étaient tous les deux libres et sans attaches ! Les soirées télé devant un match de basket ou une course de voitures, les conversations sans fin sur la médecine, les délires à propos des femmes, les confidences sans tabou ni secret, tout cela avait pris fin le jour où Derek avait rencontré Meredith. Bien sûr, Mark était sincèrement heureux qu’il ait enfin trouvé le grand amour. Mais il fallait bien reconnaître que, depuis qu’il s’était épris de la jeune fille, il n’y en avait plus que pour elle et que, de ce fait, Derek était beaucoup moins à l’écoute de son meilleur ami. Totalement indifférent parfois aussi, comme en ce moment. Sans doute pensait-il encore à sa dulcinée. Mark soupira. Ah l’amour, quelle merde ! Ils étaient si bien avant. Mais il ne servait à rien d’être mélancolique. Les choses avaient changé et elles ne redeviendraient jamais ce qu’elles avaient été. Il fallait accepter que dorénavant, la vie de Derek se résumait à un seul prénom. Comment ça s’est passé avec Meredith ? demanda Mark en s’asseyant à côté de son camarade. Vous avez discuté ? En voyant Derek se redresser et opiner lentement de la tête, il eut l’impression d’avoir, en prononçant le nom de la jeune fille, trouvé le code, sorte de sésame ouvre-toi, qui pouvait tirer son ami de sa torpeur.

    Ouais, on a discuté, répondit Derek sans expression particulière. Mark fronça les sourcils. A voir son manque d’enthousiasme, ses traits tirés et son regard absent, le pire était à craindre. L’intéressé desserra un poing, faisant apparaitre les clés du Hummer. Je peux les garder ? Ses bagages sont toujours dans ta voiture. Elle doit passer les prendre en journée.

    Ho ho, s’exclama Mark avec un air coquin. Tu as toujours ses bagages ! Ce qui signifiait donc que Derek n’avait pas raccompagné la jeune fille chez elle et qu’ils avaient passé la nuit ensemble. Finalement, les traits tirés n’étaient peut-être pas un si mauvais signe et la situation loin d’être aussi catastrophique qu’il y paraissait. Je savais que tu y arriverais. Je suis fier de toi, mon vieux !

    Y a pas de quoi pavoiser, tempéra Derek. Ce n’est pas du tout ce que tu crois.

    Oh mais je ne crois rien du tout, moi, affirma Mark, avec un sourire grivois. Je me fie seulement à ce que je vois et ce que je vois, c’est un mec qui a l’air de ne pas avoir fermé l’œil de la nuit.

    Derek haussa légèrement les épaules. Effectivement je n’ai pas dormi mais cela ne signifie pas pour autant que… Désabusé, il baissa à nouveau la tête.

    En le voyant ainsi, Mark se dit que finalement, sa première impression était sans doute la bonne. La réconciliation n’avait pas été au programme de la soirée. Tu veux en parler ?

    Derek laissa échapper un long soupir sonore. C’est fini. On a discuté mais ça n’a servi à rien. C’est fini, répéta-t-il, la mine défaite.

    Comment ça, fini ? dit Mark, incrédule. Mais comment est-ce possible ? Quand elle a décidé de revenir ici avec toi, c’est tout de même parce qu’elle était prête à vous donner une seconde chance, non ?

    Derek approuva en secouant lentement la tête de bas en haut. C’est ce que je croyais aussi.

    Mais qu’est-ce qui s’est passé, alors ? interrogea Mark. Il était curieux de savoir ce qui avait dérapé entre le moment où il avait quitté le couple, qui semblait alors tout disposé à arranger les choses, et ce matin, où il retrouvait son ami ravagé. 

    Elle est au courant pour Callie et moi, lui apprit Derek.

    C’est toi qui le lui as dit ? interrogea Mark, déconcerté. Derek fit signe que non. Mark leva les deux mains en l’air. Hé, je te jure que c’est pas moi qui ai lâché le morceau. Et c’est pas ma grand-mère non plus, elle n’était pas au courant.


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