• CHAPITRE 945

    Meredith secoua la tête. Il y a une grande différence entre hériter d’une bague ou d’un livre, et une telle somme. Deux cent cinquante mille dollars, Mark ! Est-ce que tu te rends compte de ce que ça représente ? Bien sûr que non, il ne s'en rendait pas compte, comme en attestait son petit sourire amusé. Comment aurait-il pu, lui qui était né avec une cuiller en argent dans la bouche ? Mais elle qui avait toujours connu sa mère aux prises avec des difficultés financières, elle connaissait la valeur de l’argent. De plus, elle avait été élevée dans l’idée qu’il ne fallait compter que sur soi et sur son travail pour gagner sa vie. Alors, cette somme astronomique qui lui tombait du ciel, sans qu’elle n’ait rien fait pour la mériter, la mettait mal à l’aise. Il y a trois semaines, je ne connaissais même pas ta grand-mère. Je me suis imposée dans sa maison, j’ai vécu à ses crochets. Elle fit abstraction d’un bruyant soupir que Derek venait de pousser pour manifester son énervement. Elle a déjà été d’une telle générosité pour moi que je ne peux plus rien accepter. Et puis, si je prenais cet argent, j’aurais l’impression de te voler.

    Me voler ? s’exclama Mark avant de pouffer de rire. T’en fais pas pour ça, va. Premièrement, ma grand-mère m’a demandé ce que j’en pensais et je lui ai dit que c’était une excellente idée. Et puis… Je vais sans doute te paraitre prétentieux mais deux cent cinquante mille dollars de plus ou de moins, je ne verrai même pas la différence.

    Meredith savait qu’il avait raison. Elle avait compris, à la lecture du testament, par l’énoncé de tous les biens que sa grand-mère lui laissait, que Mark était désormais à la tête d’une fortune considérable. Sans doute même, son salaire de chirurgien lui tiendrait-il lieu dorénavant d’argent de poche. Pourtant, elle ne changerait pas d’avis. Il était hors de question qu’on lui fasse la charité. Eh bien, alors, tu n’as qu’à prendre ces deux cent cinquante mille dollars et les offrir à une association, bougonna-t-elle.

    Tu dis des bêtises. Mark saisit la main de son amie et la serra dans la sienne. Momsy t’aimait, Mer. Elle t’aimait comme sa propre petite-fille et elle voulait que tu le saches. C’est sa façon de te le dire.

    Cet aveu fit monter les larmes aux yeux de la jeune fille. Je l’aimais aussi. Mais ne m’oblige pas à le prouver en acceptant son argent, Mark. De toute façon, deux cent cinquante mille dollars, c’est beaucoup trop, même pour des études universitaires.

    Tout dépend de l’université, objecta Mark. Momsy voulait que tu puisses faire ton choix sans te préoccuper de ce que ça coûterait.

    C’est adorable mais je ne peux pas accepter, s’entêta Meredith.

    Très bien, décréta Derek qui était sur des charbons ardents depuis le début de la conversation. Refuse cet héritage puisqu’il te gêne tant. Tu as raison. Mark lui jeta un regard stupéfait. Il espérait compter sur son appui pour convaincre Meredith et le voilà qui torpillait tous ses efforts. En revanche, Meredith se tourna vers son ex-amant, pleine d’espérance mais de méfiance aussi. Avait-il compris sa motivation ou voulait-il seulement rentrer dans ses bonnes grâces ?

    Mais… et ses études ? objecta Mark, désarçonné. Comment elle va faire pour aller à l’université sans cet argent ?

    Presque enthousiaste, Meredith lui posa une main sur le bras. Il y a les banques. Je peux toujours faire un prêt. Elle foudroya du regard Derek qui ricanait.

    Et te coller des dettes pendant des années ? C'est justement ce que tu ne voulais pas faire, lui rappela Mark. En plus, avec la crise financière, les banques n’octroient plus si facilement ce genre de prêt. Si tu n’as pas de contrepartie à donner, tu ne l’obtiendras pas.

    Mais il y a cette nouvelle mesure prise par le gouvernement, argua Meredith. Je me suis renseignée. Maintenant, à cause de la crise justement, tu peux demander un prêt directement au Département de l’Education et les intérêts sont beaucoup plus intéressants.

    Mark fit une grimace. Je sais, Mer. Mais ça représente des démarches à n’en plus finir.

    Je me débrouillerai, répondit précipitamment Meredith. De toute façon…

    Derek lui coupa la parole. De toute façon, si ce n’est pas l’argent de Momsy qui finance tes études, ce sera le mien. Il défia Meredith du regard. Fin de la discussion ! Enervé, il se leva et alla au frigo prendre deux bières pour lui et Mark. Tu veux quelque chose ? demanda-t-il à Meredith, tout en se préparant à la riposte. Il la connaissait assez pour savoir qu’elle n’adhérerait pas à son initiative.

    Non ! cria-t-elle. Et la discussion n’est pas finie. Il est hors de question que j’accepte ton argent.

    C’est ce qu’on verra ! Derek revint s’asseoir et ouvrit sa bouteille, les yeux pleins de hargne. Il vida la moitié de sa bière en une gorgée. En ce moment, il était tellement irrité qu’il ne pensait plus à ménager la susceptibilité de la jeune fille. Il ne réfléchissait pas au fait que sa franchise risquait de compromettre définitivement les maigres chances qui lui restaient de se réconcilier avec elle. Depuis qu’il était là, il avait forcé sa nature en surveillant le moindre de ses gestes, la moindre de ses paroles. Mais la diplomatie ne faisait pas partie de ses vertus premières et, ses efforts n’ayant pas payé, il en avait assez de louvoyer.

    Meredith ouvrit de grands yeux scandalisés. C’est tout vu ! Et à quel titre je devrais accepter ton argent d’ailleurs ?


  • Commentaires

    1
    Butterfly
    Mardi 4 Juin 2019 à 22:24

    C'était à prévoir que Meredith refuserait l'argent de Momsy. En revanche je n'avais pas prévu que Derek proposerait de financer ses études, vu le contexte. Je pense qu'il va avoir du mal de lui faire accepter cette idée 

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