• CHAPITRE 918

    Comment est-ce possible ? s’étonna Meredith. Elle ne parvenait pas à comprendre qu’une mère puisse abandonner son enfant, pour quelque raison que ce soit et certainement pas pour plaire à un homme.

    Elle était folle de son mari. C’en était même malsain. Elle était comme possédée. Il aurait pu lui faire faire n’importe quoi et d’une certaine façon, c’est ce qu’elle a fait. Elle a eu deux filles après Derek. Elles, elles ont eu un peu plus de chance. Leur père n'a pas eu le même comportement envers elles qu'envers Derek. Le pauvre petit, il a été élevé à la dure.

    Vous voulez bien me raconter ? demanda timidement Meredith. Depuis le début, je sens qu’il y a des secrets dans sa vie. J’ai essayé de cuisiner Mark mais il n’a pas été très bavard. Quant à Derek, j’avoue que je n’ai jamais vraiment osé le questionner à ce sujet. Encore un point négatif de leur relation, une preuve supplémentaire du gros problème de communication qui existait entre eux. Normalement, elle aurait dû pouvoir évoquer tous les sujets avec lui, sans crainte de s’attirer ses foudres

    Momsy nota avec plaisir que Meredith n’essayait plus de faire croire que son ex petit-ami lui était devenu indifférent et qu’elle ne cachait pas son désir d’en apprendre plus sur lui. Eh bien, vois-tu, le père de Derek était un sacré coureur de jupons.

    Tel fils, tel père, pensa Meredith avec amertume.

    Je crois bien qu’il a sauté à peu près tout ce qui portait jupon dans San Francisco. Ma belle-fille, par exemple. Je les ai surpris ensemble un jour. L’expression de Momsy se durcit. Dans la propre maison de mon fils, les salopards ! L’expression de Meredith prouva, si c’était besoin, qu’elle était choquée par cette révélation. Momsy lui prit la main et la serra fortement. Les garçons ne le savent pas et ils ne doivent jamais l’apprendre. Ils ont déjà une assez piètre image de leurs parents pour ne pas en rajouter. Alors, je compte sur ta discrétion.

    Bien sûr. Vous pouvez être certaine que je ne leur dirai jamais rien, promit Meredith. 

    Merci, mon enfant. J’ai confiance en toi. Derek, il a toujours eu un sacré caractère, tu sais, reprit Momsy. Déjà tout petit. Il était fier, entier, un peu rétif à l'autorité. Meredith le voyait sur les photos. Même tout petit, l’enfant avait dans les yeux un éclat qui prouvait à quel point il savait ce qu’il voulait et qu’il ne laisserait rien ni personne se mettre au travers de sa route. Et impossible de l’empêcher de dire ce qu’il pensait, insista Momsy. Il a vu certaines choses, il en a entendu d’autres. Comme il était loin d’être bête, il a vite compris ce qui se passait. Il était encore tout jeune mais ça ne l’a pas empêché de se confronter à son père. Quand il a su que sa mère était au courant et qu’elle l’acceptait… Elle soupira. Il lui en a beaucoup voulu, je pense. Mais il n’y avait pas que ça. Petit à petit, le fils a fait de l’ombre au père. Elle eut un sourire débordant de tendresse. En grandissant, Derek a commencé à avoir du succès avec les filles. Il était très beau, solitaire, mystérieux, insaisissable. Donc, il plaisait. Il plaisait énormément. De plus, il était brillant. Ses résultats scolaires étaient excellents et tous ses professeurs lui prédisaient un grand avenir. Shepherd ne supportait pas de ne pas être le premier en tout. Il est devenu encore plus jaloux de son fils. Alors, il a commencé à lui mettre des bâtons dans les roues. C’était parfois assez violent. A l’époque, Momsy avait été le témoin indirect du calvaire de Derek. Par après, avec les évènements qui avaient suivi, elle s’était maintes fois reprochée de ne pas l’avoir aidé autrement qu’en lui témoignant son affection ou en lui prodiguant quelques conseils.

    Et sa mère n’a jamais rien dit ? Elle n’a jamais rien fait pour empêcher ça ? Cette conversation n’en finissait pas de stupéfier Meredith. Elle avait bien deviné, à quelques conversations, que Derek n’avait pas eu une enfance des plus roses, cependant elle n’aurait pas pu imaginer que c’était à ce point.

    Momsy secoua la tête. Non, rien. Elle était folle de son mari, je te l’ai dit. Et puis, quand il était contrarié, ce qui arrivait très souvent à cause de Derek, c'était sur elle qu'il se défoulait. Il l'accusait de ne pas être capable d'élever correctement son fils. Alors, elle a commencé à en vouloir à Derek. A partir de là… Il a vécu un enfer. Momsy ne parvenait toujours pas à comprendre comment Carolyn Shepherd, tout aussi désaxée qu'elle fût, avait pu prendre ainsi en grippe celui qui se battait autant pour elle.

    Meredith recommença à tourner en silence les pages de l’album. Au fil des photos, Derek et Mark devenaient des petits garçons, puis des adolescents et enfin des jeunes hommes. Leur complicité éclatait à chaque image, leur tristesse aussi. Elle eut la certitude que Momsy n’avait rien exagéré. Ces deux-là n’avaient pas été des enfants heureux. Momsy, qu’est-ce qui s’est passé il y a douze ans ? demanda-t-elle soudain. Elle vit que son interlocutrice était surprise par sa question. Dans son message, Derek m’a dit qu’il s'est passé quelque chose il y a douze ans, quelque chose de grave qui l’a changé. Il n’a pas voulu m’en parler au téléphone et moi… Je ne suis pas prête à le revoir ni à lui parler mais j’ai besoin de savoir.

    Momsy n’hésita pas. Cette jeune fille devait savoir la vérité. Cela l’aiderait peut-être à pardonner. Il y a douze ans, commença-t-elle avant de laisser échapper un gros soupir. Il y a douze ans, Derek sortait avec une étudiante. Abigail qu'elle s'appelait. Un beau brin de fille mais… Elle fit une grimace. Mark ne l’aimait pas beaucoup. Il me disait toujours, je ne la sens pas Momsy, je ne sais pas ce qui cloche chez elle mais je ne la sens pas. Mais comme Derek en était amoureux – elle haussa légèrement les épaules - il a fait contre mauvaise fortune bon cœur. Un jour, une rumeur a commencé à courir sur le campus. Mark a fouillé un peu et il s’est avéré que la rumeur n’en était pas une. Il m’en a parlé et je lui ai dit qu’il devait la vérité à son ami. Elle regarda Meredith avec désolation. Cela fait douze ans que je me demande si nous avons pris la bonne décision, ce jour-là. Au fond de moi, je sais bien que oui. Derek avait le droit de savoir, mais quand je pense à tout ce que ça a déclenché…

    Mais il avait le droit de savoir quoi ? interrogea Meredith, haletant légèrement tellement elle était impatiente de savoir.


  • Commentaires

    1
    Mdbailey
    Jeudi 25 Avril 2019 à 21:30
    Ohhh elle va enfin savoir .
      • Butterfly
        Jeudi 25 Avril 2019 à 22:34

        Et nous aussi ! J'ai trop hâte de savoir si ce que j'ai imaginé correspond à ce qui s'est vraiment passé

      • Mdbailey
        Jeudi 25 Avril 2019 à 23:03
        Moi aussi car la seule chose qu'on sait c'est que son père lui a pris Abigail mais le reste...
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