• CHAPITRE 862

    L’avion en provenance de Miami venait d'atterrir à San Francisco et Derek attendait impatiemment que sa valise arrive sur le tapis roulant. Il était content d’être de retour. Il n’avait été absent que deux jours mais ceux-ci lui avaient paru une éternité. Pourtant, habituellement, il appréciait ces congrès de médecine parce qu'ils coupaient la routine de son travail à la clinique. Voyager, faire de nouvelles rencontres, échanger des idées, apprendre de nouvelles techniques… Oui, en temps normal, tout cela le passionnait. Mais pas cette fois. Malgré la haute valeur des conférenciers, il n’avait trouvé aucun intérêt aux débats. C’était à peine s’il les avait écoutés d’ailleurs, tout occupé qu’il était à faire le point, se répétant encore et encore tout ce que lui avait dit Jenna. Celle-là, elle pourra se vanter d’avoir foutu le bordel dans ma tête, pensa-t-il. Il avait un peu redouté de la retrouver le lendemain de leur conversation mais, à sa grande surprise, elle n’avait plus du tout évoqué le sujet. Elle avait agi comme si de rien n'était et ils n'avaient plus parlé que de médecine. Sans doute estimait-elle avoir dit tout ce qu’elle avait à dire et que, dorénavant, il était seul juge.

    Après avoir récupéré son bagage, Derek se dirigea vers la station des taxis. Le problème était que maintenant, il se posait encore plus de questions qu’avant. Régler ses comptes ? Il voulait bien mais avec qui ? Abigail ? Le terrible drame familial qui l’avait frappée la mettait définitivement à l’abri. Il n’était pas dans les habitudes de Derek de frapper quelqu’un qui était déjà à terre. Et puis Jenna avait raison, s’il n’y avait eu qu'Abigail en cause, l’histoire serait oubliée depuis bien longtemps. Oh bien sûr, il en avait été amoureux mais il se serait remis de son infidélité si elle avait été commise avec un autre que son père. Sans doute était-ce à ce dernier que Jenna pensait en conseillant à son ami de vider son sac. Mais à quoi cela allait-il servir, douze ans après les faits ? Que pouvait-il espérer d’une confrontation avec son père ? Cet homme était tellement imbu de lui-même qu’il n’imaginait même pas pouvoir commettre des erreurs. De plus, il n’éprouvait pour ses enfants, et son fils unique tout particulièrement, que du mépris. Dans son esprit, il était tout à fait logique qu’une jeune femme brillante et ambitieuse comme Laura l’ait préféré au l'étudiant désinvolte que Derek était alors. Concernant les évènements qui avaient suivi, Christopher Shepherd ne s'était certainement jamais senti responsable. Qu’il reconnaisse ses torts et demande pardon relevait donc du domaine du fantasme. Quant au reste de la famille… A quoi cela servirait-il d’aller remuer toute cette vase ? Les ponts avaient été coupés, de l’eau avait coulé depuis, les années avaient fait que Derek était devenu un étranger pour eux, et réciproquement. Ce n’était pas quelques paroles et quelques excuses, peut-être, qui y changeraient quoi que ce soit.

    Restait le cas de Meredith et ce n’était pas la moindre des interrogations pour Derek. D’une part, il mourait d’envie de courir vers elle, la serrer dans ses bras, l’embrasser et lui faire l’amour. D’autre part, le fait de savoir qu’il ne couperait ni aux explications ni aux excuses le refroidissait. Lui non plus n’était pas très doué pour reconnaître ses fautes. Et même, s’il le faisait, que se passerait-il ensuite ? Le vrai problème était qu’il ne savait toujours pas ce qu’il voulait vraiment. C’est vrai, il était amoureux de la jeune fille, il ne songeait même plus à le nier. Il était vraiment bien avec elle et il était évident maintenant que s’il devait un jour avoir une relation stable, cela ne pourrait être qu’avec elle. Cependant, il n’avait pas l’impression d’être prêt pour cela, sans doute parce qu’il n’en avait pas vraiment envie. Le couple, la famille, il avait vu dans son entourage ce que cela donnait et l'expérience ne le tentait pas. De plus, il y avait toujours cette peur tapie au fond de lui qui lui conseillait de ne pas s’investir plus qu’il ne le faisait. Moins il s’impliquerait dans la relation, moins il souffrirait lorsque celle-ci prendrait fin. Parce que n’en déplaise à Jenna, les amours finissaient mal en général !

    Il demanda au chauffeur de taxi de le conduire à la clinique. Il n’avait pas envie de rentrer directement à la péniche. Ces derniers temps, la solitude le poussait à l’introspection et on ne pouvait pas dire que cela avait eu des effets très positifs. Alors, il préférait reculer le moment de se retrouver seul chez lui. Il regarda sa montre et se dit qu’avec un peu de chance, Mark serait encore à la clinique. Ils pourraient peut-être aller boire un verre dans un endroit sympa et essayer de remettre à flot leur amitié qui avait été quelque peu malmenée depuis Aspen. Pendant le trajet, Derek pensa à cette relation qui durait depuis qu’il était né ou quasiment et à laquelle il tenait énormément, quoiqu’il se serait fait arracher la langue plutôt que de le reconnaître. Mark était le seul qui sache tout de lui de A à Z, qui connaissait ses zones d’ombre et il y en avait beaucoup. C’est à ce titre qu’il pouvait se permettre de tout lui dire. Derek savait qu’il avait besoin d’une personne comme cela dans sa vie. Il était conscient de son ego parfois surdimensionné, de son arrogance et de ses trop grandes certitudes. Il fallait que quelqu’un le mette de temps en temps face à ses erreurs.

    Après avoir jeté sa valise dans le coffre de sa Porsche, il pénétra dans la clinique laquelle, en cette heure tardive, était presque déserte. Ne restait que le personnel de garde. On lui indiqua que Mark avait quitté les lieux une heure plus tôt. La messagerie de son ami lui apprit qu’il ne fallait pas espérer le joindre avant le lendemain matin. Evidemment, Derek aurait pu le faire biper en urgence mais il s’en abstint. Si Mark avait coupé son téléphone, c’était qu’il ne voulait pas être dérangé. Il serait encore temps le lendemain de lui raconter les retrouvailles avec Jenna Wise et ce qu’il était ressorti de leurs discussions.

    Après avoir consulté son planning qui était assez léger pour le lendemain, Derek regagna le parking pour reprendre sa voiture, hésitant sur ce qu’il allait faire. La sagesse aurait voulu qu’il rentre chez lui, défasse ses valises, s’installe devant la télévision pour regarder un de ces programmes sans intérêt avant d’aller dormir. Mais ce qui était sage n’était pas fait pour lui. Surtout pas en ce moment. Il décida donc d’aller en ville pour finir la nuit dans un bar. L’alcool, au moins, lui ferait oublier ses tourments. Du moins l’espérait-il.

    En passant dans Lombard Street, il aperçut l’enseigne d’un pub qu’il ne connaissait pas. Il était vrai que cela faisait quelque temps maintenant qu’il n’était plus passé par là. De petits groupes se pressaient pour entrer dans cet établissement baptisé "Gravity". Vu de l’extérieur, l’endroit présentait bien. Derek décida de s’y arrêter pour se forger sa propre opinion. Se saouler ici ou ailleurs, de toute façon, quelle importance ?


  • Commentaires

    1
    Butterfly
    Samedi 9 Février 2019 à 18:57

    En espérant qu'il ne va faire que se saouler erf

    2
    Nolcéline 97234
    Dimanche 18 Août 2019 à 18:32
    Bonsoir à tous,
    Qui est Laura?

    Sinon est-ce la solution Derek?
    Imaginons qu'il y rencontre le petit groupe sait-on jamais? Bon dernier jour de la semaine et merci.
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