• CHAPITRE 810

    En entrant dans Marina Boulevard, la Porsche ralentit son allure et roula lentement jusqu’à ce qu’elle arrive devant le Sweet Dream. Tu es certaine de ce que tu fais ? demanda Derek en coupant le moteur. Il se pencha pour regarder la devanture de la boutique, le regard mauvais comme s’il s’agissait d’un rival. C’est vraiment ce que tu veux ?

    C’est ce que je dois faire, répondit la jeune fille avec une voix mal assurée. J’ai l’impression que ce n’est que comme ça que je pourrai laisser cette histoire derrière moi.

    Tu sais ce que j’en pense, répliqua Derek, l'air buté. Pour moi, c’est trop tôt. Beaucoup trop tôt !

    Je ne changerai pas d'avis, Derek, déclara Meredith sur un ton las. J'ai envie de laisser cette histoire derrière moi, d'aller de l'avant, et je vais le faire à ma façon, que tu sois d'accord ou pas. Mais ce sera plus facile si j'ai ton soutien.

    Evidemment que tu as mon soutien ! assura Derek en lui prenant la main. C'est juste que je m'inquiète pour toi. Maintenant, je ne pourrai plus veiller sur toi comme je le faisais quand on passait nos journées ensemble. Alors, promets-moi que si jamais il se passe quoi que ce soit…

    Meredith lui coupa la parole. Il ne se passera rien. Mais au cas où, je t'appellerai immédiatement, c'est promis.

    Il lui fit un petit sourire qui n’était animé par aucune joie, avant de jeter un nouveau coup d’œil à la boutique. Tu veux que je vienne avec toi ? proposa-t-il, déjà prêt à sortir de la voiture. Il redoutait l’effet que ces retrouvailles auraient sur la jeune fille. En l’accompagnant le matin même chez sa tante, pour y déposer ses bagages, il avait espéré rencontrer les deux harpies pour pouvoir mettre les choses au point. Mais elles n'étaient déjà plus là lorsqu’ils étaient arrivés.

    Non. Je ne veux pas leur donner l'impression que j'ai peur de revenir. En plus, je sais comment tu es. Si tu viens avec moi, tu vas être en mode protecteur et tu vas les mettre en garde sur tout un tas de trucs, elles vont se braquer et ça va partir en sucette, prédit la jeune fille. Il vaut mieux que j'y aille seule.

    Derek soupira. Comme tu veux. Il la prit par la nuque et l'attira vers lui pour déposer un tendre baiser sur ses lèvres. On se voit ce soir ? Ses yeux se firent implorants. Je pourrais venir te chercher directement après ton service et on irait manger un bout en ville. Qu'en dis-tu ?

    Meredith prit un air désolé. J'adorerais mais ça fait des semaines que Tante Ellis ne m'a plus vue. Je pense que c'est mieux si je passe ma première soirée à la maison, avec elle. Tu comprends ? Derek opina de la tête, même s'il ne comprenait pas pourquoi elle le sacrifiait au profit d'une personne qui ne se rendrait peut-être même pas compte de sa présence. Il faut que j'y aille maintenant, murmura Meredith, pleine de regret. Elle se serra une dernière fois contre lui. Je t’appelle dès que je peux. Elle sortit du véhicule et lui fit un dernier signe de la main avant qu'il ne redémarre en direction de la clinique. Elle suivit la Porsche des yeux jusqu'à ce qu'elle disparaisse et elle eut alors la sensation d'être seule, abandonnée sur le seuil d'un monde hostile. C'est toi qui l'as voulu, se dit-elle en se tournant vers la vitrine de la boutique. Résistant à l'envie de partir en courant pour rejoindre son amant, elle poussa la porte de la boutique, dont la sonnette la fit légèrement sursauter. Un jeune homme, qu'elle eut le sentiment d'avoir déjà vu, sans savoir où, sortit de l'arrière-boutique, tout sourire.

    Bon sang ! Joli p’tit lot, fut la première pensée du garçon à la vue de cette créature de rêve. C’est qu’on n’en voyait pas souvent, des pareilles, dans le quartier. Bon, évidemment, une des deux patronnes était plutôt pas mal, c’était vrai, même très bien roulée, il fallait le dire, mais rien de comparable avec ce qui venait d’entrer. Ça, c’est la classe supérieure, mon Alex, se dit-il à lui-même. C’est une gonzesse comme ça qu’il te faut. Une vraie beauté et en plus, elle est blindée de fric, déduisit-il en considérant l’allure et les vêtements de Meredith. Avec une femme comme ça, tu pourrais enfin sortir de la mouise. Effectivement, la vie n’avait pas été simple pour le marchand de journaux, depuis qu’il avait été chassé du quartier par ces deux salopards de chirurgiens, comme il se plaisait à les appeler toutes les fois où il évoquait leur souvenir. Il avait commencé par déplacer son échoppe à quelques rues de là mais la concurrence était rude et il n’avait pas réussi à se refaire une clientèle, de sorte que son commerce avait périclité en quelques semaines. Il avait alors essayé de se reconvertir dans la vente de hot-dogs, puis de glaces, sans plus de succès. Pour survivre, il avait tout fait, même quelques mauvais coups, jusqu’au jour récent où il avait lu cette annonce qui proposait un travail dans une boutique de Marina Boulevard. En voyant l’adresse, il avait tout de suite compris qu’il s’agissait du Sweet Dream mais ça ne l’avait pas refroidi. Il était quasiment certain que ses deux ennemis n’avaient rien dit de ses combines aux filles, cela aurait été dévoiler leur propre plan de drague. De toute façon, connaissant les habitudes des deux gaillards, il était certain qu'ils étaient passés à autre chose depuis le temps. Quant à la pensée des représailles qu’ils pourraient exercer sur lui, s’il revenait, elle n’avait effleuré Alex qu’un instant. Il fallait bien bouffer. Et après tout, que pouvaient-ils lui reprocher ? De les avoir escroqués de quelques centaines de dollars, eux dont les poches débordaient des billets verts qu’ils exigeaient pour rendre la santé à leurs patients malades ? Alors, qui était le plus salaud entre eux et lui ? Alex n’avait absolument pas le sentiment d’avoir mal agi. Il avait fait ce qu’il avait fait parce que les temps étaient durs pour les gars comme lui et que tous les moyens étaient bons pour s’en sortir.

    Alex avança vers la belle inconnue avec, sur les lèvres, un sourire qui se voulait ravageur mais dont l’effet était compromis par le chewing-gum qu’il mâchait avec énergie. Mademoiselle… Il s’arrêta à quelques pas et, les pouces accrochés à sa ceinture, la tête légèrement penchée, il darda sur elle un regard qui se voulait conquérant. Que puis-je pour votre service ?

    Bonjour. Toujours préoccupée par l’impression que ce jeune homme ne lui était pas inconnu, Meredith le regarda attentivement en plissant légèrement le front. On se connait, non ?


  • Commentaires

    1
    Nolcéline 97234
    Dimanche 30 Décembre 2018 à 16:00

    Bonsoir à tous merci pour ce numéro 810,

    Oui, 

    Elles ont embauché quelqu'un sans en parler au préalable à Meredith ben dis donc c'est sympa ça commence mal pour des retrouvailles. Bon dernier dimanche de l'année 2018 à tous.

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