• CHAPITRE 1126

    Bien sûr. Se moquant cette fois de la présence d’Anne et de ce qu’elle pourrait penser, Derek prit la main de Meredith dans la sienne. Ici ou ailleurs, ça n’a pas d’importance pour moi, du moment qu’on est ensemble.

    Mais… et ton travail ? La clinique ? balbutia la jeune fille, touchée autant qu’ébahie par cette proposition à laquelle elle ne s’attendait pas du tout. Tu quitterais tout ça pour moi ?

    Derek haussa légèrement les épaules. Pourquoi pas ? Je peux opérer n’importe où. Et je n’aurais aucun mal à trouver du travail ailleurs. Il n’y a pas un hôpital dans ce pays qui ne serait pas heureux de m’engager. Le raisonnement pouvait paraitre vaniteux mais il était réaliste. Derek savait que son talent et sa renommée lui ouvriraient toutes les portes, où qu’il aille. Je pourrais même m’offrir le luxe de poser mes conditions. Il posa sur Meredith un regard empli d’amour et lui sourit. Alors, si tu dois partir, je partirai avec toi, promit-il avant de porter la main de sa petite amie à ses lèvres pour y poser un baiser.

    Oooooh tu es merveilleux, s’écria-t-elle en se jetant dans ses bras. Elle pressa sa bouche contre celle de son amant et tourna ensuite la tête vers sa mère. N’est-ce pas qu’il est merveilleux ? Tu en connais beaucoup d’hommes, toi, qui quitteraient tout pour suivre leur copine ? Sa question n’en étant pas vraiment une, elle ne laissa pas le temps à Anne de répondre. Mais ce ne sera pas nécessaire. Je suis décidée. J’irai à Berkeley. La fac’ de psycho est réputée, d’après ce que j’ai lu. Derek confirma d’un signe de tête.

    La psychologie ! répéta Anne qui n’en revenait pas de la volte-face de sa fille. Est-ce que tu es vraiment sûre de ce que tu fais ? A mon avis, tu auras beaucoup de cours de sciences et ce n’est pas ta matière de prédilection.

    Je sais, mais j’aurai un prof à domicile, le meilleur qui soit en plus ! déclara Meredith avec un regard autant admiratif qu’énamouré envers l’intéressé. D’ailleurs, il a déjà commencé à me faire réviser la biologie pour le SAT. Evidemment, elle ne dit pas à sa mère qu’après un quart d’heure, la première et unique leçon s’était transformée en une séance d’anatomie qui n’avait rien de scientifique.

    Oui, c’est un énorme avantage, admit Anne. Mais tu ne dois pas oublier que Derek a un métier très exigeant et qu’il ne pourra peut-être pas être toujours aussi disponible que tu le voudrais. Et toi, je te connais, rappela-t-elle sur un ton plein d’une tendre indulgence. Au lycée, quand tu devais étudier les matières que tu n’aimais pas, tu trouvais toujours un prétexte pour faire autre chose

    Oui mais là, je suis hyper motivée. C’est vraiment ce que je veux faire, maman.

    L’entrée d’Ellis interrompit la conversation. La malade posa sur leur trio un regard vide et, comme si elle ne se rendait pas compte de leur présence, traversa la pièce pour aller s’asseoir sur une chaise, ses yeux fixant un point devant elle. Anne se leva pour lui apporter le verre de thé glacé qu’elle lui avait servi un peu plus tôt. Derek profita du fait qu’elle leur tournait le dos pour envoyer un baiser du bout des lèvres à Meredith, qui le lui rendit de la même façon. Ignorée par sa belle-sœur, Anne revint près d’eux. Tu sais à quoi tu t’exposes avec ce métier ? reprit-elle à l’intention de sa fille. Comme tu l’as dit, tu seras dans le concret. Parfois, tu vas rencontrer des enfants qui vivent des situations épouvantables. Ce sera dur, très dur, surtout pour toi qui es tellement sensible.

    Meredith hocha doucement la tête. Je sais. Derek m’a déjà mise en garde. Mais je crois que je peux y arriver.

    Et que comptes-tu faire une fois que tu auras ton diplôme ? Ouvrir ton propre cabinet ? interrogea Anne, intriguée par la toute nouvelle vocation de sa fille.

    Je ne crois pas. C’est difficile de dire ça maintenant, évidemment, mais je pense que je m’orienterais plutôt vers un travail avec les services sociaux.

    Tu pourrais aussi travailler en milieu hospitalier, intervint Derek. La perspective d’avoir un jour Meredith comme collègue n’était pas pour lui déplaire. Non seulement il pourrait être avec elle plus souvent mais en plus, il pourrait garder un œil sur elle et son entourage.

    Meredith grimaça. Non, ça, franchement, ça ne me tente pas trop. Être toute la journée avec des gosses malades…

    Ce n’est pas pire que de les écouter raconter les coups qu’ils reçoivent ou les viols qu’ils subissent, lui fit remarquer Derek.  

    Pour moi, oui. A ceux-là, tu peux donner l’espoir qu’ils s’en sortiront un jour, objecta-t-elle. Dans un hôpital, tu n’es parfois là que pour les accompagner dans la mort.

    Ça arrive, oui, concéda Derek. Mais ce ne sont pas les cas les plus fréquents, dieu merci. Il y a tous les autres, qu’il faut simplement aider à comprendre leur maladie, à l’accepter aussi.

    Mais vous côtoyez tout de même la mort tous les jours. Ça doit être terriblement éprouvant, déclara Anne. 

    L’intonation de Derek se fit plus grave. Ce n’est pas la côtoyer qui est le plus éprouvant mais ne pas arriver à la vaincre.

    Et vous vous y êtes fait ? l’interrogea la mère de Meredith.


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