• CHAPITRE 1125

    Quand tu auras un bébé, tu devras te raisonner, répliqua Anne. Ce n’est pas bon de trop gâter un enfant. Il finit par penser que tout lui est dû et il devient infernal.

    Enervée par les remarques de sa mère, Meredith jeta les yeux au ciel. Y a gâter et gâter. Je veux juste que le mien soit bien habillé.

    Entre bien l’habiller et en faire une gravure de mode, il y a une nuance, estima Anne. Et puis, ça grandit tellement vite, un enfant. Ça ne sert à rien d’avoir des tonnes de vêtements. Il n’a pas le temps de les user.

    Même s’il ne le montrait pas, Derek était sidéré d’entendre ces deux femmes parler de ce bébé – le sien en l’occurrence – comme d’une évidence. Pour un peu, on aurait pu croire qu’il n’allait pas tarder à naître. De plus, elles débattaient de l’éducation de cet enfant sans même demander l’avis du père présumé, le jugeant sans doute superflu. Mais le pire, c’était que, pas une seconde, elles ne semblaient penser qu’il pourrait ne pas avoir envie de procréer, comme si dans leur esprit, tous les êtres humains ne rêvaient que d’une seule chose, se reproduire à l’infini.

    C’est pas un problème, ça ! rétorqua Meredith, très sûre d’elle. Les plus jeunes mettront les vêtements des aînés. Derek tressaillit. Les plus jeunes ? Les aînés ? Depuis quand étaient-ils plusieurs ? Il venait à peine de réaliser qu’il devrait être père un jour qu’il se retrouvait déjà à la tête d’une famille nombreuse.

    De toute façon, tu as encore tout le temps d’y penser, déclara Anne. Puisque tu as décidé d'aller à l'université, tu dois te concentrer sur tes études avant tout. Le reste, on verra après.

    Ça, c’est certain, s’écria Derek avec ferveur. Chaque chose en son temps ! On reparlera de tout ça une fois que tu auras un diplôme en main. Au moins, ça lui laissait quelques années, huit dans le meilleur des cas, pour s’habituer à l’idée de sa future paternité, pour autant que ça soit possible.

    Tandis que Meredith soufflait – qu’est-ce qu’ils pouvaient être rabat-joie ! – Anne remercia Derek d’un sourire. Elle avait craint qu’en raison de son âge, il soit pressé de fonder une famille et qu’il veuille influencer Meredith en ce sens, mais sa réaction venait de prouver le contraire. Manifestement, il semblait tenir tout autant qu’elle à ce que Meredith fasse des études. Question de standing sans doute. Compte tenu du milieu dans lequel il évoluait, il préférait certainement présenter sa compagne comme une étudiante que comme une marchande de donuts. En pour ce qui est de l'université, est-ce que tu as déjà fait ton choix ? demanda-t-elle à sa fille. Yale ou Harvard ?

    Ni l’un ni l’autre, répondit aussitôt Meredith. Ce sera Berkeley.

    Berkeley ? s’étonna Anne. Mais… mais tu m’as toujours dit que si tu allais à l'université un jour, ce serait à Yale ou Harvard parce que c'étaient les meilleures universités pour étudier le droit.

    Oui, c’est vrai, approuva Meredith. Excepté que maintenant, je ne veux plus faire du droit. Enfin, si mais pas en matière principale.

    Anne ouvrit de grands yeux stupéfaits. Ah bon ? Mais pourtant, tu as toujours voulu faire du droit.

    Eh bien, j'ai changé d'avis.

    Et qu'est-ce que tu veux faire maintenant ?

    De la pédopsychologie, proclama fièrement Meredith. Avec ça, je vais pouvoir aider les enfants bien plus concrètement qu’en étudiant des dossiers, derrière un bureau.

    Et donc, tu veux faire ça à Berkeley ? ânonna Anne qui allait de surprise en surprise.

    Meredith prit l’air buté que sa mère lui connaissait si bien et qui signifiait que rien ne pourrait la détourner de la décision qu’elle avait prise. Oui. Ici, j’ai Derek et j’ai des amis aussi, ajouta-t-elle en pensant à Mark, Taylor et Jackson. Je n’ai pas envie de quitter tout ça. Berkeley est juste à côté de la porte et en plus, c'est une excellente université. Et le patron de Derek connait très bien le président et il a promis de me recommander. Vu mon parcours, c'est quelque chose que je ne peux pas me permettre de refuser, et je ne pourrai le faire valoir qu’à Berkeley.

    C’est un atout, c’est certain reconnut Anne. Mais Yale, Harvard… c’était ton rêve.

    Oui, mais ça ne l’est plus, insista Meredith. J’ai d’autres rêves maintenant. Elle n’en avait plus vraiment qu’un, en fait. Réussir sa relation avec Derek, faire en sorte qu’elle devienne un peu plus forte chaque jour. Elle n’y parviendrait jamais à quelques cinq mille kilomètres de distance. Alors, il est hors de question que je m’exile à l’autre bout du pays, asséna-t-elle avant de mordre dans un petit bouquet de chou-fleur avec un air décidé.

    Moi, je pourrais le faire, laissa tomber Derek, devinant qu’il était la seule raison pour laquelle la jeune fille avait changé ses projets. En lisant l’incompréhension dans le regard des deux femmes, il sut qu’il devait être plus précis. M’exiler à l’autre bout du pays. Je pourrais le faire si c’était nécessaire. Si vraiment tu préfères étudier à Yale ou Harvard, fais-le. N’hésite pas. Je te suivrai partout.

    Les yeux de Meredith brillèrent d’émotion. C’est vrai ? Tu ferais ça ?


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