• Le jeune homme se tourna vers Derek, avec l’air satisfait de celui qui a fait un travail de première qualité. Ça va pas mal du tout, Docteur. J’avance bien. Il se releva.

    Derek jeta un coup d’œil à la ronde. Je vois ça, oui. Il prit son air le plus innocent. Et tu penses que ce que je t’ai donné va suffire ? Ou bien il va falloir une petite rallonge ?

    Alex grimaça, comme s’il était embêté. Ben, c’est que… finalement, ça prend plus de temps que je n’aurais cru. Et la gamine dehors, elle est gentille, pleine de bonne volonté et tout ça, mais elle n’est pas très douée. Rien que sur la journée d’hier, j’ai un sacré manque à gagner. Alors si ça continue… Il soupira. Je ne pourrai peut-être pas terminer les travaux… ou alors…

    Ou alors il faudrait que je te donne un supplément, conclut Derek, faussement compatissant.

    Ben, oui. Alex fit un geste de la main pour signifier que cela n’avait pas beaucoup d’importance. Mais bon, on reparlera de ça plus tard, Docteur. Je sais que je peux avoir confiance en vous.

    Et moi en toi, n’est-ce pas, Alex ? dit Derek sur un ton doucereux.

    Alex lui fit un grand sourire. Ça, c’est sûr, depuis le temps qu’on se connaît.

    Derek regarda autour de lui. Tiens, c’est bizarre, je ne vois pas mes fleurs. Il reporta son regard perçant sur Alex et remarqua que ce dernier semblait subitement mal à l’aise.

    Euh… non… Izzie a repris le bouquet à la maison, prétendit le jeune homme. Il était tellement énorme. Puis, vous comprenez, avec les travaux, il risquait de s’abîmer.

    Evidemment ! dit Derek, d’un ton convaincu. Evidemment… Enfin, ce qui est bizarre, c’est qu’elle ne m’ait pas remercié. Je m’attendais à un appel ou à un petit mot… et rien. Tu n’as pas oublié de dire que c’était de ma part, n’est-ce pas ? demanda-t-il d’un air candide.

    Alex posa sa main sur son cœur. Non, bien sûr. Mais bon, les femmes, ce sont de drôles d’oiseaux, vous le savez bien.

    C’en fut trop pour Derek. Quant est-ce que tu vas arrêter de me prendre pour un con ? explosa-t-il. Il ferma la porte de l’arrière-boutique pour que Meredith ne puisse pas les entendre.

    Le marchand de journaux, qui connaissait le caractère redoutable du chirurgien, prit peur. Mais… mais… qu’est… ce… que… vous… voulez… dire ? balbutia-t-il.

    Tu as vraiment cru que tu allais pouvoir m’entuber ? cria Derek. Comme Alex prenait l’air bête de celui qui ne comprend rien, il décida de le confondre. Je sais que tu as accepté de l’argent des filles pour les travaux, alors que je t’avais déjà payé, et grassement encore !

    Alex se fit tout petit. Je suis désolé, docteur, mais la vie est dure. C’est pas toujours facile de nouer les deux bouts.

    Et ça t’autorise à escroquer les braves gens ? riposta Derek. Que tu n’aies pas eu de scrupules avec moi, passe encore ! Je gagne bien ma vie et franchement, trois cents dollars de perdus, je n’en ai rien à foutre. Mais la petite, là, dehors ! dit-il en pointant le doigt en direction de la rue. Ça se voit qu’elle ne roule pas sur l’or. Et en plus, tu te fais payer mais tu lui fais faire ton boulot, enragea-t-il.

    Je suis désolé, répéta Alex. Je vais arranger tout ça.

    Et comment ! s’exclama Derek. Déjà, tu vas commencer par la rembourser.

    Alex prit un air catastrophé. Vous voulez que je lui dise pour…

    Derek le regarda avec mépris. Et lâche en plus ! Tu fais comme tu veux mais tu lui rends son pognon. Le mien, tu peux le garder. Alex ne put retenir un soupir d’aise.Derek s’approcha des murs pour les inspecter et repéra immédiatement quelques défauts. Dis donc, mais tu travailles comme un sagouin ! Tu ne crois pas que pour deux cents cinquante dollars, tu pourrais ne pas bâcler? Tu vas me faire le plaisir de rattraper ça.

    Alex se courba légèrement. Pas de problèmes, docteur, pas de problèmes. Je ferai comme vous voulez, promit-il. Dites… vous allez en parler au Dr Sloan… de ma bêtise ?

    Derek lui lança un regard plein de suspicion. Pourquoi veux-tu que je lui parle de ça ? Tout à coup, il comprit. Il t’a payé aussi, c’est ça ? Alex baissa la tête. Combien ? Alex se tut. Combien ? gronda Derek, hors de lui.

    Cent dollars… et cinquante pour des fleurs.

    Que tu n’as jamais achetées, je suppose. Derek avisa le pot de tournesol avec désolation. Espèce de crapule ! Rends-moi l’argent de mon ami. Il tendit la main. Alex sortit de sa poche des billets qu’il remit au chirurgien, sans oser le regarder. Tu as deux jours pour tout terminer, décréta Derek. Après, tu dégages ! Je ne veux plus jamais te voir dans le quartier, compris ! Alex fit signe que oui.

    En sortant de la boutique, Derek fut accueilli par une Meredith plus qu’enthousiaste. Il travaille super bien, n’est-ce pas ?

    Il vit son visage enfantin, transfiguré par la joie et l’excitation. Elle en était presque jolie. Il ne se sentit pas capable de détruire ses illusions. Super, oui ! Vous allez avoir le plus joli tea-room de San Francisco et vous en serez la plus charmante vendeuse. Ravie, elle lui sourit. Il ne put soutenir son regard rayonnant. Allez, je file. A la prochaine. Mal à l’aise sans trop savoir pourquoi, il courut plus qu’il ne marcha jusqu’à sa voiture et disparut dans les fumées des gaz d’échappement.


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  • Meredith frappa un coup sec sur le réveil qui venait de la tirer de son sommeil. Un rapide coup d’œil vers le cruel appareil lui confirma qu’il était 5h30 ! Elle soupira. Il lui semblait qu’il y avait une éternité qu’elle n’avait pas dormi plus de cinq heures par nuit. Mais aujourd’hui, il y avait une excellente raison de se lever tôt sans râler. Le jour tant attendu de l’ouverture de Sweet Dream était arrivé. La jeune fille s’étira comme un chat avant de se rallonger sur le côté droit, le dos tourné à la fenêtre. Les yeux fixés sur le mur, elle pensa aux derniers évènements.

    Alex avait terminé les travaux dans la boutique en seulement deux jours. Lorsque Meredith avait voulu le payer, il avait refusé et même, il avait insisté pour lui rendre les cent dollars qu’elle lui avait déjà donnés. Le lendemain, son échoppe était restée fermée, ainsi que les jours suivants. Le marchand de journaux avait disparu, sans que personne ne sache pourquoi ni où il était parti. Cinq jours plus tard, l’échoppe avait rouvert avec un nouveau marchand, un homme d’une cinquantaine d’années prénommé Everett, qui n’avait jamais entendu parler de son prédécesseur. Cependant, Meredith et ses amis n’avaient pas eu le temps de s’appesantir sur cette histoire, compte tenu de tout ce qu’ils avaient eu à faire dans la boutique. Pendant que Cristina et George s’étaient chargés d’aller chercher les meubles choisis par Izzie, ainsi que tout l’électroménager, Meredith et Izzie avaient couru les brocantes pour trouver de quoi décorer la boutique. Ensuite, il avait fallu tout installer, tout défaire et tout réinstaller jusqu’au moment où, enfin, Izzie avait été satisfaite. Les deux derniers jours avaient été consacrés aux courses dans les magasins et marchés afin de réunir toutes les denrées dont elle allait avoir besoin.

    Meredith fronça le nez. Une délicieuse odeur de pâtisserie venait d’arriver à ses narines, signe qu’Izzie devait déjà être à pied d’œuvre depuis un bon moment. Cela voulait dire aussi qu’il était grand temps de se lever. Exceptionnellement, elle dérogea à son habitude de commencer sa journée en contemplant la ville de sa fenêtre, pour passer directement à la salle de bains. Mais elle compensa en restant longtemps sous l’eau chaude, profitant de ce moment privilégié pour penser à celui qui commençait à l’obséder. Après l’incident avec le client pornographe, le Dr Shepherd était passé tous les jours à la boutique, jetant un petit coup d’œil aux travaux, prenant des nouvelles de la santé de Meredith, la gourmandant de temps en temps quand il estimait qu’elle en faisait trop, le tout accompagné de quelques sourires éblouissants qui mettaient la jeune fille dans tous ses états. Mais petit à petit, la tendre sollicitude des débuts avait fait place à une indifférence presque totale. Par contre, le chirurgien avait commencé à faire preuve d’un grand empressement auprès d’Izzie. Il n’avait pas fallu longtemps pour que Meredith comprenne que ses visites n’avaient qu’un seul but, séduire la jolie blonde. Elle en avait éprouvé une grande tristesse mais aucune amertume. Izzie était tellement parfaite. Quel homme aurait pu rester de marbre devant elle ?

    C’est en grelottant un peu que Meredith sortit de la salle de bain. Elle se planta devant sa penderie et examina ses vêtements. Evidemment, ce n’était pas avec ses vieux jeans et ses tee-shirts beaucoup trop larges qu’elle pouvait prétendre rivaliser avec son amie. Mais de toute façon, ce n’était pas une jolie robe qui aurait changé quoi que ce soit à la situation. Comparée à Izzie, elle n’était rien et jamais elle ne pourrait séduire un homme comme le Dr Shepherd. Chassant ce dernier de ses pensées, elle sauta dans un pantalon, enfila un pull un peu plus présentable que les autres et noua ses cheveux avec une pince. Elle descendit l’escalier en courant et trouva ses amis en pleine effervescence. Izzie, encore plus éblouissante que d’habitude, disposait des gâteaux sur un plateau tout en faisant ses dernières recommandations. George, tu portes ce plateau dans la voiture. Et tu fais attention ! J’ai passé la moitié de la nuit à confectionner ces muffins à la myrtille. Cristina, tu as bien tous les prospectus ? Oui ? Bon, très bien, alors, je crois qu’on va pouvoir y aller.

    Le trajet jusqu’à Marina Boulevard se fit dans une ambiance plus que tendue. Ils étaient tous morts de peur à l’idée que leur entreprise pourrait n’avoir aucun succès. Un échec impliquerait un retour définitif à Crestwood et ça, aucun des quatre ne voulait ni ne pouvait l’envisager. Lorsque la voiture s’arrêta devant la boutique, personne ne descendit. Izzie, qui était assise à la place du passager avant, se tourna vers ses camarades. Voilà… C’est le grand jour, murmura-t-elle. Avant qu’on commence, je voulais vous remercier d’avoir accepté de m’aider dans cette aventure. Vous m’avez fait confiance et ça signifie beaucoup pour moi. J’’espère que cette boutique va marcher mais si ce n’est pas le cas, ce ne sera pas grave, parce que je sais que je vous aurai toujours dans ma vie. Vous serez toujours mes meilleurs amis.

    Les yeux embués de larmes, Meredith se pencha vers l’avant pour saisir la main d’Izzie et la serrer dans la sienne, tandis que George, dont le sourire était mal assuré, posait sa main sur l’épaule de sa cousine. Si on pouvait éviter la scène de pleurs collectifs, ce serait sympa, ronchonna Cristina, qui n’appréciait pas ces démonstrations d’amitié. Ils descendirent du véhicule et commencèrent à décharger le coffre. Izzie et Meredith s’occupèrent ensuite de disposer les différents gâteaux dans le présentoir et dans les vitrines, pendant que Cristina et George sortaient la terrasse. Lorsque tout fut prêt, Cristina décida de mettre à profit l’heure qui leur restait avant l’ouverture, pour discuter du déroulement des opérations. Ce matin, Izzie et moi, on va rester ici pour accueillir les clients, les servir et aussi regarnir le présentoir au fur et à mesure. Et pour vous deux… - Cristina fit un grand sourire à Meredith et George – j’ai pensé à quelque chose cette nuit. Notre clientèle, ça va être quoi ? Les gens du quartier bien sûr, les profs de l’école Montessori, le personnel du bureau de poste, mais surtout, ça. Elle pointa le doigt en direction du Golden Health Center. Est-ce que vous vous rendez compte de l’énorme potentiel que cette clinique représente pour nous ?  


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  • Entre le personnel, les familles des patients et les visiteurs, il y a beaucoup d’argent à se faire, poursuivit Cristina.

    Oui mais le personnel a déjà ses habitudes ailleurs, intervint Meredith. Et notamment, dans la boutique qui est un peu plus bas dans la rue, "Chez Miranda". Ils défilent tous là-bas, à l’heure du déjeuner.

    Je sais, je suis déjà au courant, répliqua Cristina. C’est la raison pour laquelle on va devoir faire quelque chose pour nous faire connaitre et surtout pour nous distinguer de nos concurrents. Donc, j’ai pensé que toi et George pourriezaller à la clinique vers 11h pour offrir un échantillon de pâtisseries à tous ceux qui passent par là. Bonne idée, non ?

    Super, murmura Meredith, qui n’avait pas du tout envie de croiser le Dr Shepherd alors qu’elle porterait des plateaux de pâtisseries, c’est-à-dire une fois encore quand elle serait à son désavantage.

    Et toi, George, en attendant, tu iras distribuer les prospectus dans les boites aux lettres du quartier, ordonna Cristina. Et tu en donneras aussi à toutes les personnes que tu croiseras. Elle se leva, signifiant ainsi la fin de la pause. Bon, au boulot tout le monde !

    Ils ne virent pas le temps passer. La curiosité, mais surtout la possibilité de déguster gratuitement les douceurs proposées, attirèrent les gens en nombre, grâce aux feuillets publicitaires distribués par George. Meredith et Cristina passèrent une bonne partie de la matinée à réapprovisionner les présentoirs. Quant à Izzie, éblouissante dans une robe en soie grenat et les cheveux noués en un chignon strict, elle arpenta le trottoir devant la boutique pour présenter aux passants des muffins aux myrtilles et des cookies aux noix et aux pépites de chocolat.

    Vers 11h, Cristina rappela à Meredith et George la mission spéciale dont elle les avait chargés. C’est avec des pieds de plomb que les deux camarades se rendirent à la clinique, chacun portant un plateau présentant un assortiment des meilleures spécialités de leur amie. Meredith avait à peine passé la porte qu’elle regardait autour d’elle dans l’espoir d’apercevoir celui qui était devenu l’objet de toutes ses pensées, ou presque. Elle tressaillit en le voyant en haut d’un escalier roulant. Vêtu d’une blouse blanche, il discutait avec le Dr Sloan. Trop occupée à l’observer, Meredith ne fit pas attention au paillasson dont un des coins était légèrement replié. Elle se prit les pieds dedans et trébucha. Si elle réussit à rester debout, son plateau, par contre, vola sur le sol dans un terrible fracas. Tétanisée à l’idée que tous les regards devaient très certainement être tournés vers elle, Meredith resta immobile quelques secondes jusqu’à ce que George commence à ramasser les pâtisseries qui étaient éparpillées, en morceaux pour certaines. Rouge comme une pivoine, elle s’agenouilla à côté de son camarade pour l’aider. Elle aurait voulu pouvoir disparaître sous terre. Une fois encore, elle s’était donnée en spectacle de la façon la plus ridicule qui soit devant l’homme à qui elle aurait tant aimé plaire.

    Effectivement, le bruit assourdissant du plateau tombant par terre avait attiré l’attention de Derek et de Mark. Tiens, voilà ta petite protégée qui vient encore de se casser la gueule, ironisa ce dernier. Qu’est-ce que tu attends pour courir à son secours ?

    Arrête avec ça, grogna Derek, agacé. Les meilleures plaisanteries sont les plus courtes.

    Ah mais je ne plaisante pas, assura Mark. Cette godiche ne tient pas sur ses jambes. Si ça se trouve, elle a un problème. Il tapota plusieurs fois de suite son index contre sa tempe. Tu devrais peut-être l’opérer pour essayer d’arranger ça. 

    Derek haussa une épaule tout en jetant légèrement ses yeux au ciel. Elle a renversé un plateau. Ça peut arriver à tout le monde.

    Avoue qu’elle fait pitié, tout de même ! laissa tomber Mark sur un ton méprisant. Derek regarda quelques secondes la jeune fille à genoux pour ramasser les morceaux de gâteaux. Mark n’avait pas tort. Elle faisait pitié. Un oiseau pour le chat…

    Une fois que les restes de pâtisserie furent récupérés, Meredith se releva en évitant soigneusement de regarder en direction de l’escalier roulant. Elle ne voulait pas voir le chirurgien se moquer d’elle avec son ami. Pressée de quitter au plus vite cet endroit, elle se précipita vers la sortie, sans réaliser que la porte en verre était fermée. Elle fonça dedans, la tête la première. Son visage heurta violemment le battant dans un bruit sourd. Elle entendit un rire tonitruant qui résonnait dans tout le hall et fut certaine que c’était celui du Dr Shepherd. Malgré la douleur et la honte, Meredith resta stoïque. Elle ouvrit la porte et sortit, avec George sur ses talons.

    En fait, l’éclat de rire était celui de Mark. Ah elle est trop forte, celle-là ! s’exclama ce dernier en frappant sa main sur sa cuisse. C’est à se demander si elle ne le fait pas exprès. Un vrai numéro de caméra cachée…

    Derek hocha la tête avec un air désapprobateur. Ce n’est pas la compassion qui t’étouffe. Elle a dû se faire sacrément mal.

    Mark haussa les épaules. Et après ? Qu’est-ce que tu veux que j’y fasse ? Et depuis quand on est compatissant avec les cruches ? Derek ne répondit pas. Parce que, putain, elle est cruche, celle-là ! insista Mark en ricanant. Il se tourna brusquement vers son camarade, puis regarda l’endroit où avait eu lieu l’incident, avant de revenir sur Derek. Un petit sourire naquit sur ses lèvres. Dis-moi, tu as déjà trouvé ta cavalière pour le gala ?


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  • Si tu crois que j’ai eu le temps de penser à ça ! s’écria Derek, que la ténacité de son ami en la matière commençait à contrarier sérieusement.

    Mark fit un mouvement de la tête, menton en avant, en direction de la porte que venait de franchir Meredith. C’est elle.

    Derek fronça les sourcils. Quoi, c’est elle ?

    Ta cavalière, c’est elle ! Miss Catastrophe, précisa Mark devant la mine interrogative de Derek

    Celui-ci le regarda avec un air incrédule, comme s’il n’était pas certain d’avoir bien compris. Meredith ?

    Ben, qui veux-tu ? Mark s’esclaffa. Pas le toquard qui l’accompagnait ! Quoique… si on lui colle une perruque et des faux seins, il pourrait faire l’affaire. Il fut à nouveau agité de soubresauts de rire en imaginant la scène. Derek lui lança un regard mauvais. Bon, ça va, je ne vais pas te demander de changer de bord, promit Mark, hilare. Surtout pas avec un abruti pareil. Non, pour le gala, l’assistante pâtissière fera très bien l’affaire.

    Et pourquoi elle ? s’enquit Derek, le regard sombre.

    Mark fit semblant d’être scandalisé. Tu oses demander pourquoi ? Il ferma son poing avant d’en sortir le pouce. Premièrement, la candidate doit être moche. Tu ne peux pas nier qu’elle le soit ! Il dressa son index en l’air. Deuxièmement, elle est conne. Bref, elle est parfaite. Tu vas te taper la honte de ta vie, conclut-il avec un grand sourire de satisfaction.

    J’aurai surtout l’impression de me taper ma petite sœur, objecta Derek, bougon. C’est encore qu’une gamine !

    Elle a le même âge qu’Izzie dont le jeune âge n’a jamais semblé te déranger jusqu’à présent, lui fit remarquer Mark. Et je ne vois pas ce que ta petite sœur vient faire dans cette histoire, elle est plus âgée que cette fille. Il pointa son index vers son ami. N’essaie pas de te trouver des excuses, ça ne marchera pas.

    Derek tourna la tête vers la porte par laquelle Meredith avait disparu quelques minutes auparavant. Après tout, pourquoi pas ? Parce que, si Meredith était sans conteste maladroite, naïve, peu élégante et loin des canons de beauté qui leur étaient chers, elle n’était certainement pas aussi bête et laide que ce que Mark disait. Derek réalisa que, finalement, la soirée risquait d’être bien plus agréable que ce à quoi il aurait pu s’attendre. Non seulement il allait coucher avec une jeunesse de vingt ans, ce qui allait lui permettre accessoirement de gagner sept mille dollars, mais en plus il aurait l’extrême satisfaction de faire de Mark le dindon de la farce. Oui, le soir du gala, il allait gagner sur tous les tableaux. Il soupira en prenant un air accablé. Très bien… si tu insistes, je vais l’honorer, ton foutu pari. Je vais m’afficher avec elle au gala…

    Et coucher avec elle ! lui rappela Mark.

    Il le faut vraiment ? demanda Derek, au comble de l’hypocrisie.

    Et comment ! s’exclama Mark. Et n’oublie pas, je veux des preuves. N’oublie pas ta caméra, Steven Spielberg. Cette plaisanterie déclencha un nouveau fou rire chez le chirurgien.

    Amusé par la bêtise de son ami, Derek secoua la tête. Je me demande ce que penseraient tes patients s’ils t’entendaient parfois… Et toi, tu seras accompagné par qui, à cette merde de soirée ?

    Par Izzie, qui veux-tu d’autre ? répondit Mark sur un ton suffisant. Je passe aujourd’hui à la boutique pour l’inviter.

    Tu es encore sur ce coup-là ? Derek ricana. Mais mon pauvre vieux, tu n’as pas encore compris que c’était mort pour toi ? Que veux-tu faire face à moi ?

    Je viens de te mettre hors concours, mec ! répliqua Mark. Pendant que tu escorteras la fée Carabosse, moi, je danserai avec la Belle au Bois Dormant. Je te jure bien qu’avant la fin de la nuit, j’aurai couché avec elle. J’en fais une affaire personnelle.

    Tu crois franchement qu’aller au gala avec Meredith va m’empêcher d’avoir Izzie ? demanda Derek avec un sourire narquois. Tu vas devoir continuer à compter avec moi, mon ami. Dès aujourd’hui, je vais aller déjeuner chez elle et je vais faire d’une pierre deux coups. J’emballe Meredith et je tiens Izzie au chaud. Plein d’assurance, il tapota l’épaule de son ami avant de s’éloigner.

    Dépité, Mark le regarda partir. Derek allait disparaître dans l’ascenseur quand il lui cria, Rendez-vous là-bas, alors ! Parce que, même si je dois bouffer tous les gâteaux de la boutique et prendre dix kilos, je te jure bien que je vais me la faire et que tu vas rester sur le carreau. Seul le rire moqueur de son ami lui répondit.


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  • Les joues dégoulinantes de larmes, Meredith redescendit Marina Boulevard pour rejoindre la boutique. Le rire de Derek résonnait encore à ses oreilles. Il y avait tant de moquerie, de mépris même, dans ce rire là. Si jamais elle avait eu la moindre chance avec le médecin, ce qu’elle ne croyait pas, elle venait de l’anéantir à tout jamais. Personne ne voudra jamais de toi, de toute façon. Tu es trop nulle, se dit-elle. Désespérée, elle baissa la tête.

    Ça va ? s’inquiéta George, qui marchait à côté d’elle, en portant les deux plateaux, empilés l’un sur l’autre, sur lesquels les gâteaux intacts se mélangeaient aux restes de ceux qui étaient tombés par terre.

    Meredith fit signe que oui. En relevant la tête, son regard tomba sur les gâteaux. Qu’est-ce qu’on va dire à Cristina ? gémit-elle.

    Rien du tout ! George avisa une poubelle publique et y déversa tous les gâteaux. Elle n’a pas besoin de savoir. On va lui dire que tout est parti et puis, c’est tout !

    Mais c’est un mensonge, lui fit timidement remarquer la jeune fille.

    Non, c’est de la légitime défense, objecta George. Si on lui dit la vérité, elle va encore nous traiter de tous les noms. C’est ce que tu veux ? Moi, non plus, dit-il sans lui laisser le temps de répondre. Alors la question est réglée. Le regard plein de reconnaissance qu’elle lui lança lui donna l’impression d’être un héros.

    Arrivés à proximité de la boutique, ils remarquèrent que toutes les tables de la terrasse étaient occupées. En s’approchant, ils réalisèrent que c’était la même chose à l’intérieur. Ils échangèrent un regard satisfait. Le succès de cette boutique, c’était la garantie de rester à San Francisco. En les apercevant, Cristina, qui était en train de construire une petite pyramide en brownies sur le comptoir, leur fit signe de la rejoindre. Alors ? dit-elle quand ils furent près d’elle.

    Alors quoi ? demanda Meredith, mal à l’aise.

    Ben, à la clinique, ça s’est bien passé ? se renseigna Cristina, en rattrapant de justesse un brownie qui lui avait échappé.

    Super ! s’empressa de répondre George. Ils ont adoré ! Regarde. Il lui montra les deux plateaux vides. Il ne reste plus rien.

    Très bien ! En relevant la tête vers ses camarades, Cristina eut l’impression que le visage de Meredith était quelque peu différent. Elle le regarda plus attentivement et constata que le nez et la joue gauche étaient rouges et un peu enflés. Eh bien, qu’est-ce qui t’est arrivé ?

    Une fois encore, c’est George qui prit la parole à la place de Meredith. Figure-toi qu’on allait quitter la clinique quand un gamin s’est jeté dans ses jambes. Elle a trébuché et elle s’est cognée contre une vitre. 

    Heureusement, il y a eu plus de peur que de mal, murmura Meredith.

    Une chance ! s’exclama Cristina. C’est pas le moment de se blesser ou de tomber malade. Mais bon, y a quand même qu’à toi que ça arrive, ma pauvre Mer, conclut-elle avec un peu de condescendance. Ne sachant que dire, Meredith se contenta de sourire. Allez, fini de flemmarder ! Y a du boulot, rappela Cristina. George, tu pourrais…

    Bande de malhonnêtes ! cria une voix féminine qui les fit tous sursauter, clients y compris. Tout le monde se tourna vers celle qui venait de rentrer dans la boutique et Meredith reconnut immédiatement Miranda, la patronne de la boutique concurrente.  

    Cristina et Izzie vinrent se placer devant l’intruse. Ça vous prend souvent d’insulter les gens que vous ne connaissez pas ? lança la première.

    Quel est le problème, Madame ? s’enquit beaucoup plus civilement la seconde.

    Le problème ? couina Miranda. Le problème, c’est vous et les méthodes que vous employez pour promouvoir votre boutique. C’est bien vous qui avez inondé le quartier avec cette saleté ? Miranda brandit un des feuillets que George avait distribués quelques heures auparavant. C’est honteux ! Elle le lut à haute voix. Sweet Dream… Délicieuses tourtes à l’ancienne… Quiches variées… Délicates douceurs… Découvrez-nous aujourd’hui grâce à une dégustation gratuite… Sweet Dream, bien meilleur et bien moins cher que toutes les autres boutiques du quartier! Elle lança un regard assassin aux deux femmes qui lui faisaient face.

    Cristina avait passé des heures à écrire cette publicité. Elle n’appréciait donc pas qu’on critique sa prose. Et alors ? aboya-t-elle. Qu’est-ce qui ne vous plait pas là-dedans ?

    Ce qui ne plait pas là-dedans, piailla Miranda, c’est que je suis la seule boutique du même genre dans le quartier ! C’est donc moi que vous visez ! Et en plus, je viens d’apprendre que vous avez distribué gratuitement  des gâteaux à la clinique, qui est mon principal client. J’appelle ça de la concurrence déloyale ! s’époumona-t-elle, folle de rage.

    Cristina la toisa avec tout le mépris dont elle était capable. Tout est permis en commerce ! répliqua-t-elle. Izzie l’approuva d’un signe de tête tandis que Meredith remerciait le ciel que Miranda n’ait pas été mise au courant de sa mésaventure.

    Si notre présence et nos méthodes vous gênent, vous n’avez qu’à déménager, lança George qui ne voulait pas être en reste. Après tout, n’était-il pas l’homme de la maison ?

    Miranda bondit d’indignation. N’y comptez pas ! Vous voulez la guerre, vous allez l’avoir ! Je vais me battre,c’est moi qui vous le dis ! Elle sortit de la boutique, bousculant au passage Mark Sloan qui venait d’arriver. 


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