• CHAPITRE 901

    Mark referma le dossier et le tendit à l’infirmière. Très bien. Tu peux diminuer les doses de morphine et demain, on verra ce qu’il en est. Il suivit du regard la jeune femme qui se dirigeait vers la porte et apprécia ses courbes. Quelques mois plus tôt, il avait passé la soirée avec elle et cela s’était terminé dans une chambre d’hôtel. Si ses souvenirs étaient exacts, la fille était plutôt gentille, souriante, délurée, avec un esprit d’initiative assez développé. Alors pourquoi ne pas remettre ça ? Tu fais quelque chose de spécial ce soir ? lui demanda-t-il avec un certain détachement, pour ne pas lui donner l’impression qu’il tenait plus que tout à sortir avec elle, ce qui n’était d’ailleurs pas le cas. Elle ou une autre, quelle importance ?

    Depuis qu’elle était entrée dans le bureau du chirurgien, l’infirmière attendait que ce dernier amène la conversation sur un sujet beaucoup plus personnel. Ce n’est pas pour rien qu’elle s’était échinée à attirer son attention avec des œillades coquines, des sourires éclatants et des ondulations de la croupe à chaque pas. Une autre nuit avec le docteur Chaud-comme-la-Braise, cela faisait des mois qu’elle en rêvait. Elle retint à temps un cri de victoire pour adopter un ton neutre. Pourquoi ? Tu as des projets ?

    Mark allait se lever pour lui donner un aperçu de ce qu’il envisageait pour passer la soirée de façon agréable, lorsque Callie apparut à la porte. Il plissa le front en la voyant. Quelle mouche l’avait donc piquée ? Des cheveux plus longs, vraisemblablement le résultat de la pose d’extensions, avec des mèches blondes qui créaient un contraste étrange avec ses cheveux noirs jais. Le résultat n’était franchement pas des plus heureux. Mark se tourna vers l’infirmière. C’est bon. Tu sais ce que tu as à faire. On se voit plus tard, dit-il pour la congédier. Il remarqua son regard hargneux, preuve qu’elle n’appréciait pas la façon dont il venait de la traiter, et il sut qu’il devrait user de tout son charme pour la ramener à de meilleurs sentiments. Tant mieux ! Cela donnerait un peu plus de piquant à l’affaire. Il attendit qu’elle soit sortie pour s'adresser à son amie. Tu es allée chez le coiffeur, affirma-t-il plus qu’il n’interrogea, l’air goguenard.

    Ravie qu’il ait remarqué son changement de look, Callie bougea la tête de droite à gauche pour faire voler sa chevelure dans les airs. Tu aimes ? minauda-t-elle.

    Mark s’apprêtait à lui donner franchement son avis quand Derek fit irruption dans la pièce. Alors, tu as des nouvelles ? s’enquit-il nerveusement auprès de son ami, sans même accorder un regard à Callie. Dépitée, celle-ci prit place sur un siège dans un coin du bureau.

    Mark soupira. Voilà quatre jours que Derek ne lui laissait aucun répit, le harcelant dès qu’il avait un moment de libre, toujours à propos du même sujet, Meredith, comme si toute sa vie ne se résumait plus qu’à elle. Pas depuis hier, vieux, lui répondit-il avec calme, tout en sachant que Derek ne se contenterait pas de ça. Sous la pression de ce dernier, Mark avait pris l’habitude de téléphoner quotidiennement à Santa Rosa. Il devait ensuite lui faire un rapport détaillé de la conversation. Les deux premiers jours, c’était sa grand-mère qui avait pris l’appel. Elle lui avait raconté que Meredith vivait en recluse dans sa chambre, refusant même de s’alimenter. Derek avait été dévasté de l’apprendre et il avait fallu toute la force de persuasion de Mark pour le dissuader de courir à Santa Rosa. Heureusement, Momsy avait pris les choses en mains. Le troisième jour, elle avait fait irruption dans la chambre de son invitée en décrétant que deux journées passées à écouter les guimauves du hit-parade étaient plus que suffisantes. Maintenant, il fallait s’habiller, sortir, voir du monde et surtout manger ! C’était la jeune fille en personne qui avait raconté la scène à Mark, sans lui cacher qu’au début, elle avait très mal pris que Momsy s’immisce ainsi dans sa vie mais finalement, elle lui en était reconnaissante. Mark avait alors pu annoncer à son ami que Meredith était enfin sortie de son isolement et qu’elle avait recommencé à vivre. Mais c’était mal connaître Derek que de croire qu’il allait se satisfaire de cette information. Maintenant, c’était un autre type de nouvelle qu’il attendait.

    Tu vas l’appeler, hein ? Tu vas l’appeler ? Fébrile, Derek s’assit sur un tabouret pour aussitôt se relever et tourner en rond. Il faut que je sache.

    Mark fit la grimace. Il savait très bien ce qui tracassait autant Derek mais il craignait de ne pouvoir rien faire pour lui, du moins pour le moment. La veille, il avait essayé d’orienter la conversation sur ce que ressentait son ami et la réaction de Meredith ne s’était pas fait attendre. Violente et catégorique, à l’image de celle qu’elle était devenue. Elle avait hurlé qu’elle ne voulait plus entendre parler de ce personnage détestable, qu’elle l’avait rayé de sa vie à tout jamais et que si Mark persistait à vouloir plaider sa cause, ce n’était plus la peine de l’appeler. Le chirurgien avait aussitôt changé de sujet en se promettant de ne plus s’y frotter. Evidemment, il avait caché cet épisode à son complice. Ouais, bien sûr, je vais l’appeler, mais tu sais…

    Elle n’a toujours pas rallumé son téléphone et je ne peux pas l’appeler là-bas, tu sais bien. Derek lui jeta un regard suppliant. Tu es mon seul lien avec elle, Mark. Si tu ne m’aides pas, je suis foutu. Agacée par ce comportement qui ressemblait si peu à cet homme habituellement si fier et orgueilleux, Callie leva les yeux au ciel.

    Je sais et je vais l’appeler, là n’est pas la question. Embarrassé, Mark se gratta la nuque. Mais pour ce qui est de lui parler de toi… c’est pas le moment, vieux. Je crois que tu aurais tout intérêt à te faire un peu oublier, lâcha-t-il enfin.

    Me faire oublier ? Derek secoua vivement la tête. Pour qu’elle pense que je l’ai oubliée justement ? Que je suis déjà passé à autre chose ? Que je m’en fous ? Hors de question.

    Callie, qui était restée silencieuse jusqu’à présent, décida d’intervenir. Si elle pense ça, alors c’est qu’elle n’a rien compris. Elle se leva pour se rapprocher des deux hommes. Ecoute, Derek, qu’elle t’en veuille, oui, peut-être, fit-elle avec une moue dubitative. Elle ne comprenait pas l’acharnement de Meredith. Derek avait couché avec une autre femme, certes, mais c’était elle qu’il aimait. Les sentiments n’étaient-ils pas plus importants que les actes, surtout quand ceux-ci étaient sincèrement regrettés ?


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