• CHAPITRE 1202

    Le temps est vraiment pourri ce matin, se dit Anne en regardant par la fenêtre de la cuisine. Les nuages noirs menaçaient de déverser des trombes d’eau et le vent qui soufflait en rafales secouaient énergiquement les branches du marronnier qui ombrageait le fond du jardin. Temps d’apocalypse, pensa encore Anne avant de remettre le rideau en place. Contrariée parce qu’elle avait espéré pouvoir emmener sa fille en balade, pour lui changer les idées, elle prit trois oranges dans le compotier et les coupa en deux pour en extraire le jus, tout en réfléchissant aux confidences que Meredith lui avait faites la veille. Elle n’avait pas été choquée outre-mesure par les propos de Derek sur le mariage ; compte tenu de son histoire familiale, cela pouvait se comprendre. Ce qui l’inquiétait vraiment, c’était la succession continue de très hauts et de très bas vécus par le couple qui, de son point de vue, ne pouvait que détruire leur relation à long terme. Elle s’apprêtait à sortir le presse-fruits de l’armoire lorsqu’un coup de sonnette impérieux la fit sursauter. Elle se dépêcha d’aller ouvrir la porte et se retrouva face à Derek dont l’air particulièrement angoissé lui fit craindre le pire. 

    Anne, désolé de débarquer chez vous aussi tôt et sans prévenir mais il fallait absolument que je vienne. Je suppose que vous m’en voulez à cause de tout ce qui s’est passé ce week-end et je ne peux pas vous donner tort. Vous avez toutes les raisons de me détester parce que je me suis conduit comme un abruti, encore une fois, lâcha-t-il tout d’une traite. Mais… 

    Derek ? Qu’est ce qui se passe ? 

    En entendant la voix de Meredith, Derek tourna la tête dans sa direction et découvrit la jeune fille en pyjama, au milieu de l’escalier. Sous les yeux un peu ahuris d’Anne, il entra dans la maison pour se précipiter vers sa compagne dont il prit les mains dans les siennes. Bébé, je suis désolé, tellement désolé. Je me suis comporté comme un con…

    Elle lui coupa la parole. Comment va ton père ?

    Interloqué par cette question à laquelle il ne s’attendait pas, Derek grimaça légèrement. Il a été opéré. Je l’ai opéré. Je n’ai pas eu le choix, ajouta-t-il immédiatement pour se justifier.

    En voyant à quel point il était stressé par la façon dont elle pouvait réagir face à cet aveu, Meredith sourit. Je sais, Mark m’a appelée pour me prévenir.

    Ah bon ?

    Oui, juste avant l’intervention, lui apprit-elle. Il savait que ça risquait de durer longtemps et il n’a pas voulu que je m’inquiète de ne pas avoir de tes nouvelles. Touché par la délicatesse de son meilleur ami, Derek afficha un sourire ému. Meredith l’entraina vers la salle de séjour. Viens, on va dans le salon. On sera mieux pour discuter.

    Il la suivit, le cœur plus léger, parce qu’il s’attendait à devoir batailler ferme pour qu’elle accepte de lui parler alors qu’en fait, elle semblait ouverte au dialogue et même tout à fait disposée à lui pardonner encore une fois, ce qui était vraiment inespéré. Tu sais, à propos de mon père…

    Elle l’interrompit encore une fois. Je suis allée lui rendre visite hier, lui avoua-t-elle tout de go en s’installant dans le canapé.

    Il s’assit à côté d’elle. Je sais, il me l’a dit.

    Tu n’es pas fâché ?

    Non. Plus maintenant, précisa-t-il avec un petit sourire. Il redevint aussitôt sérieux. Et toi, tu ne m’en veux pas de l’avoir opéré ? Je n’ai pas eu le choix, bébé, se défendit-il sans laisser à la jeune fille le temps d’objecter quoi que ce soit. Je venais de lui dire que je ne voulais pas l’opérer, à cause de toi, mais il a commencé à convulser et… 

    Je sais, je comprends. Comment va-t-il maintenant ? s’enquit Meredith avec sollicitude. Tu as réussi à enlever la tumeur ?

    Oui, j’ai réussi, répondit Derek sans pouvoir cacher qu’il en éprouvait une certaine fierté. J’ai pu la retirer totalement. Et lui, il est vivant. Mais il faut attendre son réveil pour voir s’il aura des séquelles.

    Je suis sûre qu’il n’en aura aucune, déclara Meredith avec conviction et une fois de plus, Derek fut frappé par la confiance aveugle qu’elle avait en lui, dans tous les domaines.

    Anne, qui s’était réfugiée dans sa cuisine dès les premiers mots qu’il avait adressés à Meredith, réapparut. Désolée de vous interrompre, mais Derek, vous voulez prendre un petit-déjeuner ?

    Non merci, je n’ai pas faim. Trop stressé, expliqua-t-il avec un petit regard en coin vers Meredith. Même s’il était un peu rassuré sur ses intentions à son égard, il ne pouvait s’empêcher de redouter l’issue de leur discussion, qui déciderait du reste de sa vie. En revanche, si vous avez du café…

    Je vais en faire. Anne fit demi-tour avant de se raviser. Je voulais vous dire, je ne vous déteste pas. Au contraire, je vous apprécie. La plupart du temps. Ce serait vraiment bien si vous pouviez faire en sorte que ça devienne permanent, conclut-elle avec un léger sourire moqueur. Derek inclina la tête pour marquer son accord.

    Maman ! geignit Meredith, gênée que sa mère se soit permis d’interférer dans son couple. Anne quitta la pièce sans faire d’autres commentaires. Je suis désolée, dit Meredith à son compagnon.

    Il lui posa une main sur le genou et l’étreignit légèrement. Tu ne dois pas. Ta mère a raison. J’ai encore beaucoup de progrès à faire.

    Peut-être mais ça ne la regarde pas. Elle n’a pas à se mêler de nos affaires, s’entêta Meredith, avec une moue boudeuse.


  • Commentaires

    1
    Valerie
    Mardi 13 Octobre 2020 à 10:22

    "Même s'il était un peu rassuré sur ses intentions à son égard, il ne pouvait s'empêcher de redouter l'issue de leur discussion, qui déciderait du reste de sa vie"

    Je ne crois pas qu'il y ait lieu de s'inquiéter, Meredith est une jeune femme intelligente, follement amoureuse de lui, elle connait quasiment tout de lui, de son passé, de ses peurs....

    Je ne vois pas de dispute ou quoi que ce soit d'autre, au contraire, c'est une discussion qui part sur de bonnes bases, où chacun y met du sien, donc je suis zen pour la suite !

    2
    Butterfly
    Mardi 13 Octobre 2020 à 13:52

    Ah maman Grey a encore frappé ! ^^  Mais ce n'est pas méchant, elle rappelle Derek à l'ordre et ça n'a pas l'air de le déranger, il sait qu'elle a raison, que leur relation doit se stabiliser

    Je suis aussi très optimiste sur la suite de la conversation, Meredith n'a aucune envie de quitter Derek et réciproquement

    3
    Emy
    Mardi 13 Octobre 2020 à 20:39
    Derek m’inquiète, pourquoi avoir peur d’une éventuelle dispute? Normalement tout va bien se passer
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