• Ça suffit ! ordonna Derek en se relevant. Je ne veux plus rien entendre. Il les regarda avec mépris. J'ai tellement honte d'avoir partagé un moment de ma vie, aussi bref qu’il ait été, avec vous. Maintenant, je veux oublier cette énorme erreur. Je veux oublier jusqu’à votre existence.

    Vous n'allez tout de même pas nous virer pour ça ? s'écria Annabel, paniquée.

    On parie ? railla Mark.

    Je n’ai commis aucune faute professionnelle, argumenta Rose, tremblante de peur. Et je veux bien présenter des excuses.

    La ferme ! aboya Laurel. Il est hors de question que je m’abaisse à m’excuser pour quoi que ce soit. Elle se tourna vers Annabel. De toute façon, ils ont déjà décidé de notre sort. Alors, qu'on en finisse et vite ! 

    Enfin une parole sensée ! jugea Mark.

    Derek alla se poster à la fenêtre et regarda la baie envahie par la brume, à travers laquelle le toit de la prison d’Alcatraz commençait à émerger. Vous êtes suspendues dès cet instant pour une durée d'un mois, annonça-t-il sans aucune émotion. Eu égard à vos états de services, vous percevrez votre salaire malgré tout. Un agent de sécurité va vous escorter dans les vestiaires où vous pourrez reprendre vos affaires. Il tourna la tête vers les trois femmes qui étaient abasourdies par la sévérité de la sanction. Mettez ce mois à profit pour trouver un nouvel emploi, leur conseilla-t-il. Inutile de demander des lettres de recommandation, vous n’en aurez pas. Et dans trente jours exactement, vous recevrez la notification de votre licenciement.

    Vous n’avez pas le droit ! On va porter plainte pour harcèlement, se rebella Annabel.

    Oui, harcèlement moral et sexuel, spécifia Laurel, démontée. Parce qu'il y a beaucoup de choses à dire sur la façon dont vous vous comportez avec le personnel féminin de cette clinique. Rose approuva ses camarades en secouant énergiquement la tête.

    Harcèlement, vraiment ? Vous voulez jouer à ce jeu-là ? Derek fit un sourire mauvais tandis que Mark éclatait de rire. Mais ne vous gênez pas pour moi ! Le juge sera certainement très intéressé par la lecture de tous les emails que vous m'avez envoyés. Alors qu'Annabel interrogeait du regard son amie qui devenait blême, Derek rouvrit l'épais dossier que Mark avait consulté précédemment. Voyons, qu'avons-nous là ? Je t'en supplie, donne-moi une chance, lut-il sans expression particulière. Je te ferai l'amour comme on ne te l'a jamais fait. Je ferai tous les trucs que tu aimes. Je te sucerai pendant des heures.

    Ambitieux comme programme, se moqua Mark. Morte de honte, Laurel baissa les yeux sur ses chaussures.

    Derek prit une autre feuille et la parcourut rapidement pour trouver un passage intéressant. Je refuse que tu m'ignores. Tu n'as pas le droit de faire comme si je n'existais pas. Ne me sous-estime pas, j'ai les moyens de gâcher ta vie, de ruiner ta carrière. Et si j'allais tout raconter à Webber ? Si je lui disais que tu m'as obligée à coucher avec toi et Sloan, qu’est-ce qui se passerait ? Il laissa tomber la feuille sur la table. Je me demande lequel de nous deux était le plus harcelé.

    J'y crois pas, murmura Annabel, consternée. T’es complètement cinglée.

    Mark acquiesça d’un signe de tête. Je ne te le fais pas dire !

    Derek s'adressa ensuite à Rose. Quant à vous, je peux produire des dizaines de témoins qui ont assisté aux scènes que vous m'avez faites. Alors si vous voulez me poursuivre en justice, ne vous gênez pas. En attendant de nous retrouver au tribunal, vous pouvez disposer. Il fit un geste de la main pour les inviter à sortir de la salle, comme un seigneur congédie ses domestiques.

    Derek, je t’en prie, implora Rose. Le regard du chirurgien la découragea de continuer. Elle sortit en pleurant à chaudes larmes.

    Mark s’avança vers les deux autres. Allez, allez, on dégage. Vous me donnez la nausée. Il les poussa jusque dans le couloir. Attendez ici. L'agent de sécurité va venir vous chercher.

    Il allait refermer la porte quand Annabel se retourna vers lui. Qui est-ce qui nous a dénoncées ? Harriett ?

    Mark hocha la tête. Je ne te dirai pas qui c'est mais non, ce n'est pas elle. Et justement, j'aimerais bien que tu me dises où je peux la trouver.

    Pourquoi ? Tu veux la foutre à la porte, elle aussi ? s’emporta la jeune femme. Mais elle n’a rien fait, elle. Au contraire, elle a pris la défense de votre copine.

    Je le sais. C'est ce qu'on m'a dit. C'est pour ça que je veux la voir.

    Après l’avoir scruté quelques secondes pour savoir s’il était sincère, Annabel décida de lui donner le renseignement qu’il attendait. Elle travaille au secrétariat de la compta.


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  • Mark rentra dans la salle de réunion où il retrouva Derek, pensif, la tête appuyée sur sa main. Tu ne devais pas aller voir Meredith ?

    Si, si, j’y vais, assura Derek, sans toutefois bouger d’un pouce.

    Ah ouais, ben, on ne dirait pas. Mark vint s’asseoir devant son ami. Qu’est-ce que tu as ? Tu as peur ?

    Derek ne chercha pas à biaiser. Comment tu le sais ?

    Mark sourit. Trente-cinq ans de pratique, mec !

    Derek le regarda avant de passer ses mains sur son visage. Oui, j’ai peur. Après avoir entendu toutes ces horreurs, elle doit avoir une sale opinion de moi, non ?

    Mais non. Mark haussa légèrement les sourcils. Alors, bien sûr, ça ne lui a pas fait plaisir d’apprendre que la moitié des nanas de la ville ont eu ton sexe dans la bouche. Et la partie à trois, ça a du mal à passer, je ne te le cache pas. Je pense qu’elle va t’en parler et évidemment, ce ne sera pas pour t’adresser des félicitations. Mais bon… Elle tient à toi, cette petite. Elle surmontera tout ça, si ce n’est déjà fait. Va la retrouver. Tu n’attends que ça et elle aussi, j’en suis sûr.

    Derek eut un petit sourire. Mark trouvait toujours les mots pour le rassurer. Merci, vieux.

    Et rassure-la. Je pense que c’est de ça dont elle a surtout besoin. Mark se remit debout. Pendant ce temps-là, moi, je vais partir à la recherche de cette chère Harriett.

    Qui est-ce ?

    Si j’ai bien compris, une petite moche au grand cœur. Je te raconterai. File voir ta nana maintenant. Mark quitta la pièce.

    Derek se levait de table pour suivre le conseil de son ami lorsque Laurel rentra dans la salle. Qu’est-ce que tu fais encore ici ? demanda-t-il, surpris et mécontent.

    Il faut que je te parle.

    Il secoua la tête. Je n‘ai rien à te dire. Et je ne changerai pas d’avis.

    Je sais. Laurel le regarda avec un air suppliant. Derek, je voudrais juste savoir…

    Quoi ?

    Elle lutta pour empêcher ses larmes de couler. Elle se moquait bien d’avoir perdu son emploi. Mais ne plus le voir ? Comment allait-elle pouvoir vivre sans lui ? Elle était tombée amoureuse de lui au premier regard et ensuite, elle avait tout fait pour se faire remarquer, en vain. Jusqu'au jour où il avait débarqué dans le bar où elle fêtait son anniversaire. Elle y avait vu un signe du destin et effectivement, ce soir-là, la chance lui avait souri, pour l'abandonner quelques heures plus tard. Après cette soirée, Derek avait agi comme s'il ne s'était jamais rien passé entre eux. Sans doute n'avait-elle pas fait tout ce qu'il fallait. Qu'avait-elle raté ? Même maintenant que tout était fichu, il fallait qu'elle le sache. Qu'est-ce que j'aurais dû faire pour que ça marche entre nous ?

    Derek la regarda durement. Tu espères vraiment que je vais te répondre ?  

    Mais qu'est-ce qu'elle a de plus que moi, merde ? cria-t-elle, désespérée.

    Tout, dit froidement Derek. Elle est tout ce que tu n’es pas, tout ce que tu ne seras jamais. Elle est pure. Elle est digne. Jamais elle ne s'abaisserait à faire ce que tu es en train de faire. Laurel ouvrit la bouche pour intervenir mais il l’en empêcha d d’un hochement de tête. Elle n’exigerait pas d’explication, elle ne me supplierait pas de la reprendre, elle ne ferait pas n'importe quoi pour coucher avec moi. Elle n'écrirait pas des messages pathétiques comme ceux que tu m'as envoyés. Elle ne réunirait pas ses copines dans les toilettes pour leur raconter notre vie sexuelle. Ne supportant plus la vision de l'infirmière, il se retourna et pensa à Meredith qui l’attendait. Mon Dieu comme elle lui manquait ! Mais surtout, surtout, je sais qu’elle est avec moi pour moi, dit-il d’une voix plus douce. Pas pour mon statut, mon argent, ma bagnole ou les hôtels dans lesquels je peux l’emmener.

    Mais moi non plus ! protesta Laurel. J’en avais rien à faire de l’hôtel ou de ta voiture. Elle vint se mettre face à lui pour qu’il soit obligé de la regarder. Moi, je voulais être avec toi, peu importe où. J’aurais fait, non, j’ai fait n’importe quoi pour toi, Derek. Putain, j'ai couché avec Mark pour te faire plaisir ! Tu t’en rends compte de ça ? Elle éclata en sanglots.

    Derek ne fut nullement ému par ses larmes. Voilà toute la différence ! Meredith ne ferait pas n’importe quoi pour moi, pas si c’était contraire à ses principes. Si je lui demandais de coucher avec Mark, je la perdrais sur-le-champ. Il commença à rassembler ses dossiers et sa voix se fit plus métallique. Vous l’avez insultée alors que vous n’êtes même pas digne de cirer ses chaussures. Il ressentit soudain le besoin urgent et impérieux de voir son amie. Il fallait qu’elle le rassure, qu’il soit sûr que rien n’avait changé entre eux. Il partit précipitamment sans faire attention à Laurel qui s'écroulait sur une chaise.


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  • Suite à cette réunion qu'il avait trouvée fort divertissante, Mark était de très bonne humeur. Aussi, lorsqu’il croisa, à l'étage des services administratifs, un employé qui sortait d'un bureau, il l’apostropha avec beaucoup plus de bonhommie que d’habitude. Dis, mon garçon, tu connais une certaine Harriett qui travaille à la comptabilité ?

    Une lueur d’étonnement traversa les yeux du jeune homme. Quelle mouche avait piqué Mark Sloan pour qu’il se décide à être enfin aimable ? L'employé tourna le buste et désigna une jeune femme qui était en train de photocopier des documents. C'est elle.

    Mark reconnut immédiatement l’empotée à laquelle il s’en était pris le matin même. Avec le recul, il s’en voulut de l’avoir traitée si durement, alors qu'elle avait pris la défense de Meredith. Il marcha jusqu'à elle. Harriett ? dit-il d'une voix douce. Elle ne s'attendait pas à lui et sursauta en le découvrant à ses côtés. La surprise céda aussitôt la place à la panique. Contre toute logique, la jeune femme imagina que le chirurgien était là pour lui reprocher son attitude du matin. Peut-être avait-elle mal reclassé un document dans un dossier et cela avait-il eu des conséquences sur le traitement d'un patient. Incapable de prononcer un mot, elle hocha la tête pour confirmer son identité. En voyant sa réaction, Mark comprit qu'elle avait peur de lui. D'habitude, c'était le genre de situation qui lui plaisait mais là, il eut pitié de la jeune femme. Il lui sourit gentiment. Je peux vous parler un instant ? A moins que votre travail ne soit très urgent.

    Autant de courtoisie surprit Harriett. Le chirurgien n’était pas réputé pour être poli, et encore moins gentil, avec le personnel. Alors pourquoi l'était-il avec elle ? Et que dire de son sourire et de ce regard doux dont il l'enveloppait ? Elle se demanda, sans trop oser y croire, si passé le premier mouvement de colère, il s'était rendu compte qu'elle n'était pas si mal que ça. Emotionnée, elle lui sourit timidement. Pas du tout, Docteur. Je suis à vous. Le double sens involontaire de sa phrase la fit devenir écarlate.

    Encore une qui craque pour moi, se rengorgea Mark. Il lui prit la main. Je voulais vous remercier, Hattie. Il se retint de sourire en la sentant trembler, sans doute à cause de ce petit nom dont il venait de l’affubler, à dessein. Il adorait troubler les filles.

    Me… me re… me remercier ? Mais… mais pour… pourquoi ? bégaya Harriett.

    Mark redevint sérieux. Ce matin, vous avez participé à une conversation, disons, un peu particulière. Dans les toilettes pour dames du service de neuro.

    Harriett devint livide. Comment était-il au courant ? Avait-on placé des caméras et des micros dans les moindres recoins de la clinique sans que le personnel en ait été averti ? Elle se sentit mal en se souvenant de la curiosité malsaine qu’elle avait manifestée à l’égard des ébats amoureux de ses camarades. Que devait-il penser d’elle maintenant ? Qu'elle était une pauvre fille un peu perverse ? Je suis désolée. Je ne voulais pas. Son menton se mit à trembloter, signe annonciateur d’une crise de larmes.

    Mark était là pour la remercier, pas pour lui faire peur. Il posa la main sur l’épaule de la jeune femme. Non, non, il ne faut pas. Vous n’avez rien à vous reprocher. Il sourit devant son air ébahi. Des quatre personnes qui étaient présentes, vous avez été la seule à ne pas avoir critiqué Meredith. L’amie du Dr Shepherd. Qui est mon amie aussi. Mais pas de la même façon, précisa-t-il aussitôt pour couper court à toute ambiguïté.

    Harriett oublia sa timidité. Mais comment le savez-vous ? Je veux dire, comment savez-vous ce que j’ai dit ?

    Meredith était là. Elle a tout entendu, lui révéla Mark.

    Harriett mit une main devant sa bouche. Oh mon dieu, la pauvre, s’exclama-t-elle, avec un accent de sincérité qui toucha Mark. Je ne savais pas. Les autres non plus.

    Je sais. C’est ce qui rend votre attitude d’autant plus appréciable. Vous avez pris sa défense en toute innocence, ce qui prouve que vous étiez sincère. Et sans le savoir, vous l’avez soutenue. Elle avait besoin que quelqu’un soit de son côté. Vous êtes une brave fille, Harriett, conclut-il en lui décochant un sourire qui manqua la faire défaillir.

    Merci, Docteur. Harriett trouva enfin le courage de le regarder dans les yeux. Vous savez, on s’est souvent moqué de moi – elle haussa les épaules - que je sois là ou pas, d’ailleurs. Je sais que ce n’est pas agréable. Alors… Elle eut un petit sourire que Mark trouva charmant. Je la trouve très jolie. Et elle a l’air très gentille aussi. Elle ne mérite sûrement pas qu’on la traite de cette façon. Dites-le-lui de ma part, si vous voulez bien.  

    Eh bien, vous devriez le lui dire vous-même, estima Mark. A l'occasion, venez donc lui rendre visite, dans mon bureau. Elle travaille pour moi. Vous êtes la bienvenue.

    Merci, Docteur, dit Harriett en sachant qu'elle n'oserait jamais débarquer dans le bureau du chirurgien pour se présenter à une inconnue, surtout après avoir commenté les performances sexuelles de l'amoureux de ladite inconnue.

    Meredith sera heureuse de faire votre connaissance, insista Mark. Elle est un peu isolée ici. Elle ne connait personne et les gens n'osent pas aller vers elle, à cause de nous, j'en suis conscient. Et nous, on n'est pas souvent disponible. Ce serait bien si elle pouvait nouer quelques liens. Alors, je ne veux pas vous obliger, bien sûr, mais si pouviez passer de temps en temps pour discuter avec elle, ce serait sympa. Et pourquoi pas lui présenter quelques personnes, suggéra-t-il encore. Elle gagne à être connue, vous savez. Et je suis certain que vous vous entendrez bien. C'est une chouette fille, tout comme vous.

    Harriett rosit de plaisir. C’est gentil. Merci Docteur.

    Mark la regarda plus attentivement. Pas très grande, un peu boulotte, des cheveux châtain foncé qui lui tombaient sur les épaules, en jean et tee-shirt et une paire de lunettes en écaille sur le nez, elle n’était pas laide, juste un peu godiche et mal fagotée. Comme Meredith au début, songea-t-il soudain. Il repensa à ce que celle-ci lui avait dit au sujet de la gentille fille avec qui il pourrait partager des moments heureux ailleurs que dans un lit. L’idée était peut-être à creuser. Je me disais, quand vous aurez fait la connaissance de Meredith, on pourrait peut-être se faire un petit diner à quatre, un de ces jours.

    A quatre ? Avec vous et le Dr Shepherd ? couina Harriett sous le coup de l’émotion. Conscient de l'effet qu'avait eu son invitation, Mark acquiesça en souriant. Harriett eut l'impression d'avoir été intronisée dans un club très sélect. Ah oui. Oui. Oh oui. Vraiment. Ça me ferait très plaisir. Elle avait maintenant la meilleure des motivations pour surmonter sa timidité afin de faire la connaissance de Meredith.

    Eh bien, à bientôt alors, dit Mark en faisant demi-tour, après lui avoir adressé un dernier sourire charmeur.


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  • Derek arriva en courant à son bureau mais au moment d'ouvrir la porte, sa main resta figée sur la poignée. En dépit de tout ce que Mark lui avait dit pour le rassurer, il redoutait la réaction de Meredith. Certes, elle était revenue mais dans quel état d'esprit ? Compte tenu de ce que son ami lui avait raconté au sujet de la conversation qui s’était déroulée dans les toilettes, et de la nature des souvenirs échangés, Derek ne voyait pas comment la jeune fille pourrait ne pas lui en vouloir. Ou tout du moins ne pas avoir une moins bonne opinion de lui, ou moins de respect. Il avait l'impression que jusqu'à présent, elle l'avait un peu idéalisé et que, peut-être inconsciemment d'ailleurs, il avait tout fait pour correspondre au mieux à l'image qu'elle avait de lui. Après avoir entendu les histoires racontées par les infirmières, et qu'il ne pouvait pas nier – il pourrait peut-être tout au plus prétendre que certaines choses étaient exagérées – combien de temps allait-elle mettre pour réaliser qu'elle n'avait rien à faire avec lui ? L'angoisse chevillée au corps, il fut tenté de remettre à plus tard la discussion qu'elle ne manquerait pas de provoquer et ainsi, d’une certaine façon, retarder la fatale échéance, mais l'apparition de Darlene dans le couloir et le regard intrigué qu'elle lui lança l'obligèrent à pousser la porte.

    Meredith, qui était en train de travailler sur le PC, tourna la tête vers lui. Il avait l'air contrarié et elle eut peur de ce qu'il allait lui dire. Sans doute était-il mécontent qu'elle ait encore pris la fuite pour quelque chose qu'à coup sûr il trouvait insignifiant. Il allait certainement lui reprocher d'avoir abandonné son travail, et le fait qu'à cause d'elle, Mark avait dû faire de même pour jouer les apprentis détectives. Combien de temps encore allait-il tolérer ses comportements puérils ? Bien sûr, Mark lui avait certifié que Derek tenait à elle et qu'il la soutiendrait mais elle n'arrivait pas à oublier le postulat de départ de leur relation : pas de contraintes, pas de problèmes. Or, des problèmes, elle n'arrêtait pas d'en avoir et d'en créer, même si ce n'était pas volontaire. Qu'y aurait-il de surprenant à ce que Derek veuille mettre fin à une histoire qui devenait par trop compliquée ?

    Il était resté sur le seuil de son bureau, hésitant encore à entrer, et le silence de la jeune fille ne faisait que renforcer son anxiété. Il réalisa qu'il avait vraiment peur de la perdre. Je suis désolé, dit-il enfin en se décidant à faire un pas vers elle.

    Moi aussi, s'écria-t-elle en se levant pour courir vers lui.

    Il se précipita à sa rencontre et la prit dans ses bras. J’ai eu si peur, si peur, avoua-t-il.

    Je suis désolée, répéta Meredith, les yeux plongés dans ceux de son amant. Je sais que je n'aurais pas dû partir comme ça, sans te prévenir.

    Ce n'est pas pour ça que j'ai eu peur, lui confia-t-il. Enfin, si, un peu, parce que je ne savais pas où tu étais. Mais ce qui m'a fait le plus peur, c’est l'idée qu'elles avaient tout gâché. Sa voix s'érailla. Que j'allais te perdre.

    Meredith passa les mains autour de son cou. Il n'a jamais été question de ça. Je suis partie parce que j'avais peur que tu me trouves dans l'état où j'étais, et aussi parce que je voulais être seule. Mais je n'ai pas pensé un instant à te quitter, certifia-t-elle. Moi non plus, je ne veux pas te perdre.

    Derek lui prit le visage entre ses mains et dans un gémissement sourd, il fondit sur ses lèvres pour les embrasser avec une tendresse infinie. Ses derniers doutes s’évanouirent lorsque la bouche de la jeune fille s’ouvrit pour venir goûter la sienne, en laissant leurs langues se réunir une fois encore. Le baiser dura longtemps, tandis que leurs mains partaient à l’aventure sur leurs visages et dans leurs cheveux. C’est haletants et décoiffés qu’ils s’écartèrent pour se sourire avec émotion. Il la prit par la main pour la ramener derrière le bureau, où il s'assit dans son fauteuil avec elle sur les genoux. Je suis vraiment désolé pour tout ce qui s'est passé. Déjà, pour le GHB, je regrette que tu l'aies appris comme ça. J’aurais dû te le dire.

    Elle se blottit contre lui, la tête posée sur son épaule. C'est rien. Je sais que tu as fait ça pour me ménager. Mais sur le moment, je t'en ai voulu, c'est vrai, reconnut-elle en suivant du bout de l'index le liseré de sa blouse de chirurgien. Je me suis dit que si tu m'avais fait part plus clairement de tes soupçons au sujet des médicaments qu’il me donnait, j'aurais été plus vigilante. Je me serais plus méfiée de lui.

    Si tu savais comme je m'en veux de ne pas l'avoir fait ! murmura Derek. Je croyais que je te protégeais en agissant comme ça mais en fait, c'était tout le contraire.

    Tu ne pouvais pas savoir, déclara Meredith. Elle se redressa pour le voir en face. Il faut que tu cesses de t'en vouloir pour ça.

    Il hocha la tête. Je ne crois pas que je pourrai, en tout cas pas tant que tu n'iras pas mieux.

    Mais je vais mieux, attesta Meredith.

    Derek la regarda avec un air dubitatif. Tellement mieux que tu as pris la fuite à l'autre bout de la ville.

    Ça, ça n'a rien à voir avec ce que j'ai lu dans mon dossier, objecta-t-elle avec une moue contrariée.

    Je sais. Mark m'a mis au courant, lui apprit Derek. Tu veux qu'on en parle ?

    Meredith haussa les épaules. C'est toujours le même truc. Malgré tout ce que Mark m'a dit, j'ai peur de garder des marques et comme je n'ai jamais eu confiance en moi, quand j'entends des gens me critiquer, ça me déstabilise totalement. Et avec ce que ces filles ont dit…

    Derek l'interrompit. C’est n’importe quoi. Elles ont dit n'importe quoi ! asséna-t-il avec force. Tu es plus jeune et plus belle qu'elles, et tu vaux tellement mieux. Elles sont jalouses tout simplement. Tout ce qu'elles ont dit n'était qu'un amas de conneries !

    Non, pas tout, murmura-t-elle en posant sur lui un regard éperdu de détresse.


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  • Derek n’essaya même pas de mentir ou d’atténuer la vérité. Non, pas tout, tu as raison. Il fit un petit sourire empli de regret. Je suis désolé. J’aurais préféré que tu n’apprennes pas tout ça mais maintenant que tu es au courant, je ne peux pas te dire que c’est faux. Il posa son front contre celui de la jeune fille. Mais c’est le passé, bébé.

    Je sais, je sais, et je ne vais rien te reprocher, s'empressa-t-elle de répondre. C'est normal que tu aies vécu avant moi et de toute façon, tu n'as aucun compte à me rendre. C'est juste que ça n'a pas été agréable d'entendre cette Rose raconter comment tu l’avais draguée.

    Derek lui coupa la parole encore une fois. Je ne l’ai pas draguée. Je lui ai juste dit ce qu’elle voulait entendre. Et ça a suffi pour…

    Pour qu’elle te fasse une fellation, je sais. Au Westin St Francis. Meredith quitta les genoux de son amant pour aller jusqu'à la fenêtre. Le plus bel hôtel de la ville.

    Meredith…

    Il se leva pour la rejoindre mais elle lui fit signe de rester où il était. Ne va pas croire que je suis jalouse du fait que tu l'aies emmenée dans un palace. Je m'en fous. Mais tu m'as menti. Ne comprenant pas ce dont elle l'accusait, il fronça les sourcils. Un jour, au début qu'on était ensemble, tu m'as dit que tu n'investissais rien dans tes relations, lui rappela-t-elle. Ni de ta personne, ni de l'argent. Que tu ne faisais jamais de cadeau, qu'il n'y avait pas de restaurant ni de belles chambres d'hôtel. Mais elle, tu l'as emmenée dans un cinq étoiles.

    Et alors ? ça ne veut rien dire, assura Derek. Alors ne va pas t'imaginer je ne sais quoi. Cette femme n'a jamais rien représenté à mes yeux, si ce n'est un défi, une bataille à remporter, expliqua-t-il pour répondre au regard interrogateur de Meredith. Je savais que je lui plaisais et qu'elle voulait coucher avec moi, mais elle faisait sa mijaurée, alors j'ai fait ce qu'il fallait pour qu'elle me cède. L'hôtel, c'était juste pour ça, pour qu'elle pense qu'elle comptait pour moi. Mais ça n'était pas le cas, insista-t-il.

    Le plus moche, ça a été de l'entendre raconter ce que tu lui avais dit pour la draguer, poursuivit tristement Meredith. A quelques mots près, tu m'as dit la même chose.

    Derek se dit que la conversation prenait un mauvais tour. Malheureusement, il n'y avait rien à faire pour l'éviter. Enervé, il fit quelques pas dans la pièce. Bébé, tu sais bien comment j’étais quand on s'est rencontré. Bon sang, il y a eu l’histoire du pari, s’emporta-t-il soudain. Et je voulais te filmer en train de faire l'amour. Alors, ne me dis pas que tu es surprise ! En plus, je ne t'ai jamais caché comment j'étais. Dès le début, je t’ai dit que j’étais un salaud. Mais je me suis attaché à toi et j'ai changé. Il voulut la rejoindre mais elle lui échappa à nouveau en trouvant refuge derrière le bureau.

    Mais elles te plaisaient, ces filles ? lui demanda-t-elle avec un air incrédule. Parce que quand je les entendais parler, je me demandais ce que tu avais bien pu leur trouver.

    Mais rien, absolument rien, affirma-t-il catégoriquement. Pour la plupart d’entre elles, je ne me souviens même plus de leur nom. Il y en a même certaines pour lesquelles je ne l’ai jamais su.

    Génial ! C'est censé me rassurer ?

    Derek leva les yeux au ciel. Que veux-tu que je te dise ? Elles étaient là, elles étaient disponibles, c’est tout. Aucune n’a jamais compté pour moi, répéta-t-il.

    Meredith eut la désagréable impression que non seulement il cherchait à minimiser la bassesse de son comportement mais aussi qu'il éludait ses questions. Cela l'agaça. Tu te rends compte de l'effet que ça m'a fait d'entendre ces femmes discuter de tes prouesses au lit ? l'interrogea-t-elle d'une voix un peu plus aigüe. Sans parler de leurs comparaisons entre ton anatomie et celle de Mark. Il y en avait une qui disait quelque chose et une autre qui rajoutait un détail. Elle modifia sa voix, comme si elle imitait une autre personne Son sexe est large. Oh oui, on le sent passer, dit-elle en changeant encore de tonalité.

    Bébé, ce ne sont que des détails sordides, plaida Derek. C’est tellement vulgaire. Tu ne dois pas y accorder plus d'importance que ça n'en a. Bien qu'il se rende compte que ses arguments de défense étaient assez pitoyables, il ne voyait pas ce qu'il pouvait dire d'autre.

    C'est facile à dire pour toi, ça, répliqua Meredith. Moi, je n'apprécie pas tellement l'idée que toutes les femmes de cette clinique se retrouvent entre elles pour échanger leurs impressions sur les capacités sexuelles de mon petit ami. D'autant plus quand leurs histoires sont précises comme celles que j'ai entendues ce matin. Tu as fait jouir Laurel comme jamais. Tu es fan des fellations mais tu n'es pas doué pour les préliminaires. J'ai l'air de quoi, moi ?  

    C’est des conneries tout ça, des commérages de nanas frustrées ! argua Derek avec hargne, dans l’espoir de la faire arrêter. Il n’avait pas envie de la voir continuer à se torturer en se remémorant tout ce qu'elle avait entendu et surtout, il craignait que leur discussion dégénère et que la jeune fille décide de rompre.

    Mais non, c'est pas des commérages ! protesta Meredith. Vu la haine qu'elle a envers moi, c'est clair que tu as dû lui faire des sacrés trucs, à la Laurel. Tu n'agis pas comme ça si le mec ne t'a pas fait prendre un pied d'enfer. Et pour ce qui est des fellations, je le sais bien que c'est vrai. Qu'on te sent passer parce que tu as un gros sexe, je ne peux pas dire non plus que c'est faux. En fait, le seul moment où je ne t'ai pas reconnu, c'est quand elles ont parlé de ce truc des préliminaires et qu'elles ont dit que tu n'en avais rien à faire de leur plaisir, que tu étais égoïste. Tu n'es pas du tout comme ça avec moi, conclut-elle avec un air chagrin.  

    En la voyant faire sa moue de petite fille boudeuse, Derek se sentit fondre de tendresse pour elle. Eh bien, tu vois. Il s’approcha d’elle et la prit contre lui, les deux mains posées sur ses hanches. Je ne suis pas du tout avec toi comme j’étais avec elles. Nous deux, c’est différent, bébé.


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