• Quand son ami eut quitté la cafétéria, Mark promena son regard sur les personnes présentes, comme s'il voulait repérer ceux qui auraient le culot de commenter ce qui venait de se passer. Mais tous le connaissaient suffisamment pour savoir que c'était quelque chose à ne pas faire si on ne voulait pas déclencher la seconde phase des représailles. Folle de rage d'avoir été publiquement humiliée, Annabel se rua hors de la salle, rapidement suivie par son groupe d'amies. Quant à Meredith, elle gardait les yeux obstinément baissés sur l'assiette qui contenait les restes du muffin. Pourquoi il a fait ça ? se lamenta-t-elle. Il n'aurait pas dû réagir.

    Mark se tourna vers elle avec un air surpris. Tu déconnes, là ? Tu as entendu ce qu'elle lui a dit ? Il ne pouvait pas laisser passer ça. C'est une question de respect.

    Le respect, ça va dans les deux sens, répliqua Meredith. Vous ne pouvez pas leur dire que votre vie privée ne les regarde pas, alors qu'elles en ont presque toutes fait partie.

    Mark fit une moue désapprobatrice. Faut pas exagérer ! C'est pas parce qu'on a couché avec elles qu'elles font partie de notre vie.

    ça, c'est votre façon de voir les choses, mais pas forcément la leur, estima la jeune fille. Et puis, je vous connais. Ne me dis pas que vous n'avez jamais dragué une infirmière pendant les heures de boulot. Ou que vous n'avez jamais couché avec une d'entre elles dans votre bureau, ou dans une salle quelconque. Le petit sourire de Mark lui indiqua qu'elle avait raison. C'est bien ce que je pensais. Vous n'arrêtez pas de mélanger votre vie privée et votre vie professionnelle, poursuivit-elle. Alors, vous ne pouvez pas leur reprocher après de faire la même chose.

    Mark hocha la tête. Je ne suis pas d'accord. On n'est pas des enfants de chœur, je le sais. Et on n'est pas toujours très correct, je le reconnais aussi bien volontiers. Mais si elles ont quelque chose à nous reprocher, elles doivent le faire en privé, pas devant toute la clique. Et de toute façon, en quoi le fait que j'ai couché avec elle lui donne le droit de s'en prendre à toi et à Derek ? Elle n'a eu que ce qu'elle méritait. Et encore, je l'ai trouvé bien gentil, Derek.

    En attendant, maintenant, tout le monde me déteste, regretta Meredith.

    Oh mais elles t'auraient détestée même sans ça, lui fit remarquer Mark. A partir du moment où tu fais partie de notre cercle…

    Non mais franchement, qu'est-ce que vous leur faites à ces filles, pour qu'elles deviennent comme ça ? demanda Meredith, agacée.

    Je crois que c'est plutôt ce qu'on ne leur fait pas qui pose problème, répondit Mark avec un petit sourire moqueur.

    Est-ce que quelqu'un pense autrement qu'avec son cul dans cette clinique ? bougonna Meredith. Mark éclata de rire, attirant à nouveau sur eux l'attention des gens. Meredith lui lança un regard noir. Arrête de rire ! Ils vont croire qu'on se moque d'eux.

    Et toi, arrête de psychoter ! rétorqua-t-il. Bon, c'est pas tout ça, mais je vais devoir y aller. Je te raccompagne ou tu vas te débrouiller toute seule ?

    Meredith parut soudain effrayée. Non, non, tu me raccompagnes. J'ai eu mon compte de psychodrame pour la journée. Ils se levèrent et elle rassembla leur vaisselle pour l’apporter au point de collecte, comme elle l'avait vu faire par tous ceux qui étaient partis avant eux.

    Galant, Mark la lui prit des mains pour la porter lui-même, alors que d'habitude, il laissait tout trainer sur la table. Alors, qu'est-ce que tu comptes faire cet après-midi ? se renseigna-t-il.

    Meredith soupira en prenant un air un peu dépité. C'est pas comme si j'avais vraiment le choix. Je vais continuer à lire mon bouquin et j'irai sans doute un peu sur le net, aussi. Derek m'a dit que je pouvais, précisa-t-elle.

    Mark perçut son manque d'enthousiasme. Effectivement, il y avait des choses plus exaltantes que la perspective de passer toute la journée, enfermée dans un bureau, sans voir âme qui vive, avec pour seule compagnie un bouquin. Malheureusement, il n'avait pas plus de temps à lui consacrer et compte tenu de ce qui s'était passé, il ne pouvait décemment pas l'encourager à poursuivre sa visite du bâtiment. Bah, tu dois juste tenir le coup quelques jours et après, on part pour Aspen, lui rappela-t-il pour lui remonter le moral.

    Un sourire radieux illumina le visage de Meredith. Oui, c'est vrai. J'étais trop contente quand Derek m'en a parlé. ça va être super.

    Mark sourit de la voir tellement heureuse, comme une enfant à qui on vient de promettre le plus merveilleux des cadeaux. Dieu, que cette fille était facile à contenter ! Un vrai charme ! Tu vas voir, tu vas adorer Aspen, lui dit-il en lui ouvrant la porte de la cafétéria.

    Elle l'approuva d'un signe de tête. Oh, ça, j'en suis sûre. Et j'espère que je vais voir au moins une star ou deux.

    Sûrement. Nous, on en voit chaque année, lui apprit Mark. Notamment, une actrice, une petite blonde super bien gaulée, la petite trentaine, mignonne comme tout. Il y a un an ou deux, elle avait joué dans une comédie à la con, avec Owen Wilson, je crois. Il prit à nouveau le chemin des ascenseurs.

    Ah ça doit être Kate Hudson, présuma Meredith. Je sais que c'est une habituée. On la voit chaque année avec sa mère, dans les magazines.

    Oui, eh bien, elle, elle devrait être rapide pour me le demander deux fois, plaisanta Mark.

    C'est étonnant que tu n'aies pas déjà essayé de te la faire entre deux descentes de pistes, ironisa Meredith.

    Je ne crois pas l'avoir jamais vue sur les pistes, déclara Mark avec un air un peu pensif. A mon avis, elle doit être plus axée shopping. Il se tourna à nouveau vers son amie. ça aussi, ça devrait faire ton bonheur.


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  • Meredith ricana légèrement. A Aspen ? Je ne crois pas que ça soit à ma portée. Je me contenterai de faire du lèche-vitrine. Ce sera bien aussi.

    Mark garda pour lui que Derek ne serait certainement pas du même avis. Et ton niveau en ski, c'est quel genre ? s'enquit-il.

    Nul ! confessa Meredith. Je n'en ai jamais fait. Mais Derek m'a dit qu'il m'apprendrait. Elle regarda son ami avec une inquiétude soudaine. Je vais pouvoir skier malgré ce qui m'est arrivé, hein ?

    Tu as encore mal au dos, ou quelque part ? lui demanda-t-il. Elle fit signe que non. Alors, je ne vois pas pourquoi tu ne pourrais pas skier, la rassura-t-il. Et pour ce qui est de ton visage, je pense que je pourrai te retirer les points de suture avant notre départ. Mais pour ça, tu devras être très gentille avec moi.

    Meredith fit semblant de ne pas comprendre. Gentille comment ?

    Devine !

    Elle prit un air supérieur. Pfft ! Alors je demanderai à Derek.

    Mauvaise joueuse ! riposta Mark. Entretemps, ils étaient arrivés devant le bureau de Derek. Eh bien, voilà, tu y es, signala Mark. Meredith regarda la porte en poussant un gros soupir. Mark eut mal au cœur. Depuis qu'ils avaient quitté la cafétéria, une idée lui trottait en tête, qu'il avait repoussée pour ne pas créer plus de problèmes qu'il n'y en avait déjà, mais l'idée de laisser Meredith se morfondre toute seule toute la journée le dérangeait bien plus que le fait de déplaire peut-être à certaines personnes. Je n’sais pas ce que tu vas en penser, mais en marchant, j’ai pensé à un truc. Si ça te dit, j’ai peut-être un petit travail pour toi. 

    Les yeux de Meredith se mirent à briller d’espoir. Du travail ? Ici, à la clinique ?

    Oui, oui, du travail pour moi, précisa Mark. Dans mon bureau. Mais bon, ne te fais pas trop d’illusions. C’est pas très intéressant comme boulot, avoua-t-il pour tempérer l’enthousiasme de la jeune fille. C’est simplement du classement et un peu de saisie de données.

    Oh mais c’est déjà super, se réjouit Meredith en entrant dans le bureau de Derek pour prendre son sac. Je suis prête à tout pour ne pas rester enfermée dans ce bureau à ne rien faire.

    Mark la regarda avec un air malicieux. Prête à tout ? Vraiment ?

    Elle leva les yeux au ciel en souriant. A tout sauf à ce que tu penses ! répliqua-t-elle. Alors, ne rêve pas ! Elle sortit du bureau et passa son bras sous celui de son ami. On y va ? Je suis pressée de commencer à travailler.

    J’espère que tu ne comptes pas être payée, blagua Mark qui était ravi de l'effet que sa proposition avait eu sur la jeune fille. Ou alors, il faudra que je me dévoue pour te payer en nature.

    Non, merci sans façon ! Vive le bénévolat ! clama-t-elle.

    Mark souffla bruyamment pour exprimer sa prétendue désapprobation. Continue comme ça et tu vas te retrouver au chômage avant même d’avoir commencé. Meredith éclata de rire.

    C’est dans cet état d’esprit enjoué qu’ils arrivèrent au bureau de Mark. En pénétrant dans la pièce, Meredith fut surprise de voir le contraste qui existait entre le bureau de Derek, où tout était méthodiquement rangé, et celui de Mark qui était un véritable foutoir. En dehors du bureau, qui était encombré par des revues médicales et des journaux, il y avait, dans un coin de la pièce, une grande table jonchée de dossiers entassés pêle-mêle et surmontés par de gros classeurs. La jeune fille se tourna vers le chirurgien avec une lueur d’appréhension dans le regard. Je suppose que c’est ça, mon travail.

    Comme à chaque fois qu’il était embarrassé, Mark se gratta le haut du crâne en grimaçant. Ouais, je sais, c’est beaucoup. Mais t’es pas obligée. Si t’as plus envie…

    Non, non, ça va, s’empressa de dire Meredith même si elle était un peu effrayée par l’ampleur de la tâche. Il faut simplement que tu m’expliques ce que je dois faire.

    Mark avança jusqu'à la table. Ça, ce sont les dossiers des patients. Meredith s’approcha. Et là - Mark tapota les classeurs - ce sont des notes, des résultats d’analyses, des scanners, enfin, bref, tout ce qui doit être inséré dans les dossiers. Il passa ensuite derrière son bureau pour ouvrir un tiroir dont il sortit un appareil qui ressemblait à un téléphone portable, ainsi qu’un tas de minuscules cassettes. Et là-dedans, il y a les comptes-rendus d’interventions et les notes post-op’ qui doivent être encore retranscrits.

    Eh bien, dis donc ! Meredith fit un petit sourire moqueur. Ça doit être chaud quand tu veux consulter le dossier d’un patient avant une opération. Le temps que tu aies rassemblé toutes les pièces, le gars est mort.

    Mes dossiers sont très bien tenus, protesta Mark, vexé qu’elle le prenne pour un jean-foutre. Mais pour le moment, ma secrétaire est malade. Au début, c’était juste pour deux ou trois jours, mais après, elle a prolongé. Ils m'ont envoyé quelqu'un d'autre pour faire le boulot mais elle était trop conne, alors je l'ai virée. C'est elle qui a tout sorti et tout étalé. Voilà pourquoi c'est le bordel. Moi, je n’ai pas le temps de ranger et de classer. Et encore moins la patience, je l'avoue. Il regarda Meredith avec un air penaud.

    Il semblait tellement misérable qu'elle eut pitié de lui. Ne t'en fais pas, super Meredith va t'arranger ça. Tu vas pouvoir retourner à tes implants mammaires et autres joyeusetés.


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  • Je n'en attendais pas moins de toi, s'exclama Mark en se frottant les mains. Il retourna à la table et prit un dossier qu'il ouvrit. Bon alors, je t’explique. Ici, tu as un numéro, c’est l’identifiant du patient. Tu retrouves ce numéro sur tous les documents qui concernent cette personne. Il suffit de…

    Un petit sourire ironique sur les lèvres, Meredith l'interrompit. De rassembler dans le même dossier tous les documents qui portent le même identifiant, j'ai compris.  

    Alors, pour le dictaphone, tu sais comment ça fonctionne ?

    Je trouverai bien, ne t'inquiète pas.

    Mark prit le stylo qui se trouvait dans la poche poitrine de sa blouse. Je vais te laisser le numéro de mon bipeur, prévint-il tout en écrivant sur un bloc-notes. Et aussi le mot de passe de mon ordinateur.

    D'accord.

    Avec le dictaphone, c'est possible que tu ne comprennes pas tout ce que je dis, mentionna encore Mark. C'est pas grave, écris comme tu l'entends, on verra ensemble après. Meredith opina de la tête en souriant mais elle commença à le pousser vers la porte. Il se mit à parler de plus en plus vite, comme s’il avait peur de ne pas avoir le temps de tout lui dire. Si jamais, tu tombes sur un truc qui te pose problème, tu le mets de côté, ou alors…

    Ou alors, j'improviserai, conclut Meredith. Elle l'embrassa sur la joue avant d'ouvrir la porte. Je vais me débrouiller, ne t'inquiète pas. Maintenant, va travailler. Et préviens Derek pour qu'il sache où me trouver. Elle referma la porte derrière le chirurgien.

    Ce dernier aperçut Callie qui venait vers lui d'un pas rapide et décidé. Il avança lentement à sa rencontre. Tu es au courant ? l'apostropha-t-elle alors qu'elle était encore à quelques mètres de lui. Derek a amené sa gamine à la clinique ?

    Furieux, il la prit par le bras pour l'emmener à une distance respectable de son bureau, pour être sûr que Meredith ne puisse pas les entendre. Elle avait déjà subi assez d'affronts que pour ne pas en subir un autre, de Callie qui plus est. La gamine s’appelle Meredith, au cas où tu ne le saurais pas, lui rappela-t-il sur un ton peu amène.

    Callie s’arrêta au milieu du couloir et se dégagea sèchement de l'étreinte de son ami. Oh ça va ! Epargne-moi tes leçons de bonne conduite. Elle le dévisagea avec dureté. Alors, c’est quoi, cette histoire ? Je n’entends parler que de ça depuis ce matin.

    Mark haussa les épaules. Quelle histoire ? Il n’y a pas d’histoire. Après ce qu’elle a vécu, il n’a pas eu envie de la laisser seule. Je ne vois pas où est le problème. 

    Callie prit un air dédaigneux, presque hautain. Si tu le dis ! N’empêche que tout l’hôpital cancane.

    Mais laisse-les donc cancaner, recommanda Mark, agacé. Depuis quand tu t’occupes des commérages du personnel ?

    Depuis que Derek est devenu la risée de ce même personnel ! s’écria Callie. Il a perdu toute autorité à s’afficher comme ça avec cette fille.

    N’importe quoi !

    Enervée de constater que son ami ne la soutenait pas, Callie pinça les lèvres. En tout cas, vivement que cette affaire soit finie ! Qu’elle rentre chez elle et qu’on retrouve nos habitudes !

    Ben, ça, si tu veux mon avis, c’est pas près d’arriver, ironisa Mark qui ne pouvait s’empêcher d’être déçu par le comportement de son amie. Il y avait bien longtemps qu’il avait deviné chez elle une certaine jalousie envers Meredith. Mais aujourd’hui, elle dépassait les bornes. Pour se venger, il décida de lui porter l’estocade finale. D'ailleurs, j’ai oublié de te dire quelque chose. Derek et Meredith viennent avec nous à Aspen, lui annonça-t-il avec un grand sourire.

    Mais il nous avait dit que ça ne l'intéressait pas de venir à Aspen, cette année, objecta Callie, désarçonnée par la nouvelle.

    Eh bien, il a changé d'avis, rétorqua Mark. Il s'est dit que l'air de la montagne ferait beaucoup de bien à la petite.

    Callie s'indigna. On aurait pu me demander mon avis, tout de même ! Aspen, ça a toujours été nous trois. On n’a jamais amené personne avec nous.

    Ouais, mais Meredith, c’est différent, dit Mark en notant avec amusement qu’il employait l’expression fétiche de Derek.

    Callie lui jeta un regard plein de suspicion. Elle est de toi, cette riche idée, j’imagine.

    Mark fit une moue moqueuse. Hmm… un peu, je l’avoue. Je suis un génie, je sais, ajouta-t-il pour narguer son amie.

    Si tu espères te la faire, tu vas être déçu, c’est moi qui te le dis, persifla-t-elle.

    Dis ce que tu veux, j’en ai franchement rien à foutre ! Mark lui tourna le dos et commença à avancer. Et si tu as un problème avec Aspen, t’as qu’à aller trouver Derek, lança-t-il sans même se retourner. Je pense que tu seras bien accueillie. Callie le regarda s’éloigner avec la sensation d’être piégée. Il avait raison, jamais elle n’obtiendrait gain de cause auprès de Derek. Elle soupira longuement. Elle n’avait rien à reprocher à Meredith, qu’elle trouvait charmante au demeurant. Et elle compatissait réellement au drame que la jeune fille venait de vivre. Mais la place qu’elle commençait à prendre dans la vie de Derek, et même de Mark, menaçait le statut d’amie-amante de Callie. Et ça, celle-ci n’était pas encore prête à l’accepter.


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  • En sortant de la salle d'opération presque trois heures plus tard, Derek vit Mark qui s'apprêtait à entrer dans la salle voisine. Il le héla. Hé là-bas ! Mark se retourna et Derek avança vers lui avec un grand sourire. Alors, voyou, tu te décides enfin à bosser un peu?

    Mark feignit d'être fâché. Ah c'est l'hôpital qui se fout de la charité ! M'emmerde pas sinon je ne te dis pas où est Meredith !

    Derek fronça les sourcils. Comment ça, où elle est ? Elle n’est plus dans mon bureau ?

    Non, elle est dans le mien, lui apprit Mark. Elle a décidé de changer de mec.

    Derek s'esclaffa. Mais oui, c’est ça ! Les poules auront des dents le jour où ça arrivera.

    Son assurance qui confinait presque à de la prétention aurait pu irriter son ami s’il n'avait pas été question de Meredith. Mais parce qu'il s'agissait d'elle, Mark savait que Derek avait raison. Il n'y avait vraiment aucun risque que Meredith laisse tomber son amant pour un autre. Elle travaille pour moi, expliqua-t-il. Elle déprimait à l'idée de passer la journée à lire, alors je lui ai donné un petit travail de classement.

    Ah génial ! s'exclama Derek. C’est vrai que ça ne doit pas être agréable de rester enfermée, à ne rien faire. Il regarda son ami avec reconnaissance. Merci, c'est sympa.

    De rien. Mais maintenant, laisse-moi bosser, ajouta Mark sur un ton bourru. Et toi, va la retrouver, tu en crèves d'envie. Derek ne se fit pas prier. Après avoir salué son ami d'un clin d'œil, il partit d'un pas pressé. Mark soupira avant de rentrer dans la salle de bains attenante à la salle d’opération.

    Derek prit les escaliers pour aller plus vite. Arrivé devant le bureau de Mark, il en poussa doucement la porte et trouva Meredith, assise par terre au milieu des dossiers. Totalement concentrée sur sa tâche, au point qu'elle n'entendit pas la porte s'ouvrir ni se refermer, pas plus qu'elle ne remarqua que Derek l'observait, elle se parlait à elle-même en murmurant. ça, c’est fait. ça, ça va là. Celui-là, il va ici, dit-elle en insérant un document dans un dossier. Et celui-ci… celui-ci, il doit être dans ce dossier-là. Parfait !

    Tu t’en sors ? demanda Derek.

    La jeune fille sursauta et mit la main sur sa poitrine, au niveau du cœur. Oh la la ! Tu m'as fait une de ces peurs !

    Excuse-moi. Derek s'assit à côté d'elle et après lui avoir donné un petit baiser sur la joue, il regarda les dossiers qui étaient ouverts devant eux. Tu m'as l'air très occupée.

    Je n'ai pas arrêté une minute, lui confia-t-elle. Il y avait tellement de documents à interclasser. J’ai même cru que je n’arriverais jamais au bout mais finalement, j’ai réussi, s’enorgueillit-elle. Et aussi, j’en ai profité pour changer un petit truc. Oh c’est pas grand-chose mais je crois que ça va faciliter le travail de la personne qui classe. Enfin, j’espère. Elle regarda Derek avec un peu d’appréhension. Tu veux bien me donner ton avis ?

    Oui, bien sûr. Il était ravi de la voir aussi enthousiaste et surtout que ce travail, pourtant assez peu intéressant, lui ait permis de ne pas s’ennuyer et certainement, de ne plus penser à ses problèmes pendant quelques heures.

    Alors, regarde, sur la couverture de chaque dossier, il y a une étiquette avec seulement le nom du patient et sa date de naissance, et donc je suppose qu’on classe les dossiers par ordre alphabétique. Par contre, tous les documents qui sont dedans portent un numéro qui est l’identifiant du patient, selon ce que m’a dit Mark, expliqua Meredith. J’ai remarqué que ce numéro commence par la date de naissance du patient. Donc, ça veut dire que quand tu dois classer les documents, tu dois soit ouvrir les dossiers pour trouver l’identifiant du patient, soit chercher la similitude entre la date de naissance et l’identifiant. Ça prend un temps fou et surtout, ce n’est pas logique. Alors, je me suis dit que ce serait beaucoup plus facile si l’identifiant apparaissait aussi sur la couverture – elle prit un dossier pour le montrer à Derek – et je l’ai écrit sur la couverture, juste au-dessus de l’étiquette.

    Derek approuva son initiative d’un signe de tête. Ça me semble très logique.

    Et puis – Meredith ouvrit le dossier – j’ai remarqué que certains de vos patients avaient eu affaire à plusieurs chirurgiens de la clinique.

    Oui, bien sûr, ça arrive, confirma Derek.

    Seulement, dans les dossiers, tout est classé par type de document, les résultats d’analyse dans des sous-chemises bleues, les comptes-rendus d’opération dans les vertes, les notes dans les rouges, exposa Meredith. Et finalement, si tu veux retrouver tout ce qui a un rapport avec une opération qui a été faite par toi, par exemple, tu dois commencer à fouiller là-dedans pour rassembler les documents dont tu as besoin. Alors, je me suis dit que ce serait mieux de tout classer par ordre chronologique. Et une fois que j’ai fait ça, j’ai pensé que ce serait bien de faire un classement par chirurgien. Alors, j’ai réorganisé les sous-chemises en attribuant une couleur à chaque médecin. Pour toi, c’est le bleu ; Mark, le vert ; Callie, le rouge, et ainsi de suite. Alors qu’est-ce que tu en penses ? J’espère que j’ai bien fait. Elle attendit le verdict de son amant avec un peu d’appréhension au fond des yeux. 


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  • Avant que Meredith lui en parle, Derek n’avait aucune idée de la méthode de classement appliquée dans l’hôpital. Chaque matin, quand il arrivait dans son bureau, les documents dont il avait besoin étaient déjà à sa disposition grâce aux bons soins de sa secrétaire. Et si jamais il en voulait d’autres, il lui suffisait de demander qu’on les lui apporte. Si les employés du service des archives lui avaient fait part de leurs éventuelles difficultés, il y aurait été sans doute indifférent. Mais parce que c’était Meredith qui lui en parlait, il prit la peine de se pencher sur le problème. Il prit un dossier et regarda l'étiquette collée sur la couverture avant d'examiner les références reprises sur les documents. Ensuite, il ouvrit une sous-chemise bleue et feuilleta rapidement les documents qu’elle contenait, pour finalement relever la tête vers son amie avec un petit sourire. Eh bien, je crois que tu viens d'améliorer considérablement la méthode de classement en cours à la clinique, jugea-t-il. C’est même une révolution.

    C'est vrai ? Tu le penses vraiment ? demanda Meredith, les yeux brillants d'espoir.

    Mais bien sûr ! Je ne le dirais pas si je ne le pensais pas, assura Derek. Ta méthode est tout ce qu'il y a de plus logique et c'est évident qu'elle permet de classer plus rapidement. Je ne comprends même pas comment personne n'y a pensé jusqu'à présent.

    Tu sais, quand tu commences un travail, c'est difficile de remettre en question ce qu'on t'apprend et après, tu t'enfermes dans la routine, estima la jeune fille.

    Derek ouvrit une sous-chemise orange. Et ce système de couleur, c’est très ingénieux. Ça, non plus, personne n’y a jamais pensé.

    Meredith s’en félicita. Tant mieux ! ça m'a donné du travail et comme ça, le temps passe plus vite.

    Oui, ça t’a fait du bien, ça se voit. Tu es radieuse. Derek remarqua qu’elle couvait les dossiers d’un regard protecteur, comme une mère le ferait avec ses enfants. Il la sentit fière du travail accompli, à juste titre. Elle avait été vraiment efficace. Bien entendu, il ne s’agissait que de classement. Mais en tenant compte du nombre de dossiers empilés devant elle et du temps dont elle avait disposé, cela relevait de l’exploit. Il se sentit fier lui aussi et éprouva le besoin de le lui dire. C’est formidable ce que tu as fait. Je suis vraiment très fier de toi. Il lui prit une main qu’il porta à ses lèvres.

    C’est vrai ? lui demanda encore Meredith parce qu'elle avait du mal à croire qu’il accorde vraiment de l'importance à ce genre de tâche.

    Meredith, tu veux bien arrêter de douter de tout ce que je te dis ? la gronda-t-il gentiment. Je pense vraiment que tu as fait de l'excellent travail. En plus, il y avait beaucoup à faire apparemment.

    Oui et d'ailleurs, je n'ai pas fini. Après, je dois encore retranscrire toutes les notes qui sont dans le dictaphone, lui apprit Meredith. ça va sûrement me prendre beaucoup de temps, à cause du jargon médical. Je suis sûre que je ne vais pas comprendre la moitié. Et si je comprends, je devrai à chaque fois vérifier l'orthographe. Elle posa sa tête contre l'épaule de Derek. Je ne suis pas encore sortie de l'auberge.

    Il sentit qu'elle était heureuse à l'idée d'avoir encore plein de choses à faire. Quant à lui, ça le soulageait ; il éprouverait moins de scrupules à reprendre un rythme de travail plus ou moins normal. Sans parler du fait qu'il aurait l'esprit tout à fait tranquille en sachant qu'elle était dans le même bâtiment que lui, en sécurité et disponible. Tu ne crois pas si bien dire. Quand tu auras fini de travailler pour Mark, tu pourras commencer pour moi.

    Tu as du classement en retard, toi ? s'étonna-t-elle.

    Pas vraiment, admit Derek en souriant. Mais j'en aurai à ce moment-là. Et puis, j’aime bien ton système de sous-chemises de couleur. C’est clair, précis, logique, ça me plaît. Je veux la même chose dans mes dossiers. Il y aura des notes à transcrire aussi. Et la neuro étant beaucoup plus compliquée que la chirurgie plastique, tu vas suer, je te préviens.

    Meredith sourit avant qu'une pensée ne lui traverse l'esprit et la fasse se rembrunir. Mais et ta secrétaire ? Elle ne va pas râler que je lui vole son travail ?

    Derek balaya le détail d'un revers de la main. Je lui donnerai autre chose à faire, ne t'inquiète pas pour ça. Il ne lui dit pas qu'il était prêt à payer sa secrétaire à ne rien faire du moment que cela l'aidait, elle, à reprendre confiance et à remonter la pente. Et je vais aussi te mettre en contact avec le responsable du service archivage pour que tu lui expliques ta méthode. Elle vaut la peine d'être généralisée.

    Meredith parut embarrassée. Je suis flattée mais ce monsieur, il ne risque pas de se vexer ? Tu comprends, je ne suis personne, moi, ici. De quel droit je vais dire aux gens comment organiser leur travail ? C'est délicat.

    Ecoute, bébé, je ne suis pas là pour faire le bonheur des gens et encore moins pour satisfaire leur ego, objecta Derek. Je veux seulement que leur travail soit le plus efficace possible, à tous les niveaux, pour que les patients soient traités d'une façon optimale. Et ta méthode est incontestablement une amélioration. Il soupira en voyant qu'elle n'était pas convaincue. Si tu préfères, je lui en parlerai moi-même. Soulagée, Meredith opina de la tête avant de se serrer contre lui.


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