• Une fois que la voiture tourna le coin de la Mason Street, la rue tranquille dans laquelle résidait Ellis, et qu’elle pénétra dans la California Street, les jeunes gens découvrirent ce qu’était une grande agglomération à l’heure de pointe. Ce fut à ce moment là qu’ils comprirent ce que trafic routier voulait vraiment dire. Cela n’avait rien à voir avec ce qui se passait à Crestwood où l’on considérait qu’il y avait embouteillage lorsque dix voitures étaient arrêtées aux feux de signalisation. Pendant que Cristina se faufilait dans la circulation avec une habilité dont elle ne se serait pas crue capable, Meredith, Izzie et George regardaient avec stupéfaction le ballet incessant des voitures.

    Ça me donne un peu le tournis, toute cette agitation, déclara Meredith.

    Izzie se tourna vers elle, un grand sourire aux lèvres. Moi, je trouve ça génial ! Il y a de la vie ici, au moins.

    Il y a surtout des tarés, grommela Cristina à qui l’on venait de faire une queue de poisson.

    Izzie ignora la remarque négative de sa camarade. Ici, on va pouvoir aller au musée, boire un verre dans des bars sympas ou manger dans des restaurants chics. Et je ne vous parle même pas des magasins ! Vous savez que San Francisco est un haut-lieu de la mode ?

    Oui, on sait, tu l’as déjà dit, répliqua une Cristina énervée, en donnant un brusque coup de volant pour éviter une camionnette. Mais en attendant d’aller faire du shopping, tu vas passer les prochains jours à récurer et à peindre.

    Ça n’empêche pas qu’on fasse des projets, riposta Izzie avant de se retourner vers l’arrière de la voiture. Une fois qu’on aura remis la boutique à neuf, à nous la grande vie ! lança-t-elle à l’intention de Meredith et George. Cristina leva les yeux au ciel mais s’abstint cette fois de tout commentaire.

    Une heure plus tard, ils arrivèrent sur Marina Boulevard. Par chance, Cristina trouva une place de stationnement devant la boutique. Comme la veille, tout le monde resta dans la voiture, se contorsionnant pour voir la façade. C’est en mauvais état, laissa tomber George, pour qui c’était une découverte.

    Bravo, Goofy ! ironisa Cristina en ouvrant la portière. Ton sens inné de l’observation m’impressionnera toujours.

    Une fois sur le trottoir, Izzie eut à nouveau envie de pleurer. En plein jour, c’était encore pire. La peinture de la façade, qui avait dû être bleue un jour, était en fait d’un gris sale, du moins là où il y en avait encore. La vitre qui était à gauche de la porte était fissurée sur toute la hauteur et tous les châssis, sans exception, étaient pourris. Meredith sentit son amie au bord de la déprime et voulut la rassurer. Après quelques réparations et une bonne couche de peinture, cet endroit sera magnifique, tu verras.

    Cristina ricana. Elle introduisit ensuite la clé dans la serrure de la porte, laquelle lui résista comme la veille. Cristina la secouait énergiquement quand une voix s’éleva derrière elle. Hé, on ne vous a jamais dit que c’était illégal d’entrer par effraction dans une propriété privée ?

    La jeune femme se retourna et toisa celui qui venait de lui faire cette remarque désobligeante. De quoi je me mêle ?

    De ce qui me regarde, répliqua le jeune homme aux cheveux bruns coupés court. Je ne vais pas vous laisser démolir le bien d’autrui sans moufter.

    On est ici chez nous, intervint Izzie. Nous sommes les nouveaux locataires.

    L’inconnu jaugea la jolie blonde d’un air connaisseur. Putain, le canon ! se dit-il. Ses yeux glissèrent du visage de la jeune femme à sa poitrine avant de se poser sur le bas de son corps. Pas de doute ! Un joli petit lot ! pensa-t-il encore. Alors, comme ça, vous avez loué ce trou à rat ? dit-il à voix haute sur un ton moqueur.  

    Si Cristina avait la critique et l’ironie facile, elle ne le supportait pas de la part des autres. Je peux savoir qui vous êtes ?

    Le jeune homme tendit le bras vers une échoppe de journaux qui se trouvait à quelques mètres de là. J’m’appelle Alex et j’suis marchand de journaux… et de magazines en tout genre, ajouta-t-il avec un petit clin d’œil coquin à l’intention d’Izzie. La jeune femme resta imperturbable. L’importun tenta alors une autre approche. Vous êtes d’ici ?

    Non, on vient de Crestwood, répondit Meredith. Elle s’en voulut aussitôt en croisant le regard furibond de Cristina.

    Crestwood ? C’est où ce bled ? questionna Alex, l’air hilare.

    Meredith feignit de ne pas avoir entendu. Ce fut George qui renseigna le marchand de journaux. C’est dans le Kentucky.

    Alex éclata d’un rire méprisant. Des campagnards !

    Cristina pointa un index menaçant vers lui. Toi, tu dégages d’ici vite fait avant que je te fasse bouffer tes journaux ! George se plaça entre elle et Alex, pour montrer qu’il était prêt à intervenir.

    Alex, pas du tout impressionné, ricana doucement. Pas la peine de s’énerver. Je voulais juste faire connaissance.

    On n’est pas intéressé, tonna Cristina avant de se tourner vers ses amis. On a beaucoup mieux à faire que de s’occuper de ce minable. Ils entrèrent dans le magasin. 


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  • George plissa le nez. ça pue !

    C’est certain que ça ne sent pas la rose, approuva Cristina. D’un regard circulaire, elle repéra tout ce qu’il y avait à faire, du moins tout ce qui était apparent. Elle désigna un tas de détritus divers qui trônait dans un coin de la pièce. Le plus urgent est de se débarrasser de tout ce bric-à-brac. Ça sera ton travail, Goofy.

    Son ton de commandement déplut fortement à George qui protesta. Pourquoi moi ?

    Parce que tu es l’homme de la situation, persifla Cristina. Elle poussa la porte qui menait à l’arrière-boutique. Meredith, Izzie… Ses deux amies la rejoignirent. Pendant que George déblaie le terrain à côté, vous allez nettoyer ici, ordonna-t-elle. Et après, vous vous occuperez du magasin. Quand ce sera propre, on verra mieux ce qu’il y a à faire.

    Izzie fronça légèrement les sourcils. On peut savoir ce que tu vas faire pendant ce temps là ?

    Je vais réfléchir à un plan d’action, annonça Cristina.

    Woaw quel effort ! lança George depuis l’autre pièce. Trop dur !

    Mais qu’est-ce que tu crois ? rétorqua Cristina. Qu’il suffit de juste passer un coup de balai et mettre une jolie couleur rose bonbon sur les murs pour que cet endroit ait du succès ?

    Le jeune homme ne se laissa pas faire. Non mais on ne va pas tout se taper pendant que toi, tu te reposeras.

    Qui a dit que j’allais me reposer ? protesta Cristina. Je vais aller faire un tour dans le quartier pour repérer les boutiques susceptibles de nous concurrencer. Et faire ami-ami avec les autres commerçants, ça peut servir. Il faut aussi réfléchir au moyen de nous faire connaître parce que si vous voulez mon avis, les clients ne viendront pas sauf si on est différent de ce qu’ils connaissent.

    Tout en écoutant son amie exposer son plan, Izzie arpentait la pièce, passant d’un coin à l’autre, en imaginant à quoi ça ressemblerait une fois qu’elle aurait appliqué ses idées de décoration. Elle sentit l’optimisme la regagner. Il fallait fêter ça ! Avant d’attaquer les grands travaux, ça ne dirait pas d’aller vous balader à Fisherman’s Wharf ? proposa-t-elle à ses camarades. J’ai lu, dans mon guide, que c’était super comme endroit et que…

    Tu ne crois pas qu’on a mieux à faire que de jouer aux touristes ? la rabroua Cristina.

    Izzie insista. Cristina, c’est notre dernier jour de liberté avant longtemps. Dès que nous aurons commencé, tout va s’enchaîner et nous n’aurons plus une minute à nous. Elle implora. S’il te plait, s’il te plait !

    Et de toute façon, on n’a pas de matériel, fit remarquer Meredith.

    Cristina ne put que s’incliner devant cet argument. D’accord. Mais juste une heure ! Après, on revient ici et on se met au boulot.

    Youpie ! cria George Les jeunes gens se ruèrent à l’extérieur. Ce fut au premier qui grimperait dans la voiture.

    Après avoir longé Marina Boulevard, ils arrivèrent à Fisherman’s Wharf. Cet endroit, situé au bord de l’eau, était en fait l’ancien quartier des pêcheurs et des conserveries, leur expliqua Izzie, le nez plongé dans son livre. Il faut absolument que nous allions au Pier 39. C’est là que tout se passe, assura-t-elle.

    Après avoir perdu dix minutes à chercher une place pour garer la voiture, ils arpentèrent Colombus Avenue où ils furent surpris de voir les cable cars, des tramway aux wagons de bois brinquebalants. Ils débouchèrent enfin au Pier 39, une jetée organisée en centre commercial. En cette fin d’été, le soleil brillait et les températures plutôt clémentes leur permirent de s’installer à la terrasse d’un petit restaurant dont la vue sur la mer leur plut immédiatement. Tout en attendant leur commande, ils rirent des facéties des lions de mer couchés les uns sur les autres, se prélassant au soleil en faisant un boucan terrible.

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    Onk ! Onk ! Onk ! Onk ! imita George, déclenchant une crise de fou rire chez les filles. Ils rirent beaucoup moins quand le serveur déposa sur la table les quatre clams chowders qu’Izzie les avait incités à commander. George regarda avec méfiance cette soupe servie dans un petit pain rond. Tu es sûre que ça vaut le coup ? demanda-t-il à sa cousine. 

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    La jeune femme lui parla sur le même ton qu’elle aurait employé avec un enfant. George, dans mon livre, on dit qu’il faut absolument essayer cette spécialité.

    Cristina porta une cuiller à sa bouche et la reposa aussitôt. Ah ça pour être spécial, ça l’est ! 

    Ce fut au tour de Gorge de goûter. Ce n’est pas mauvais.

    Non effectivement, c’est dégueulasse ! renchérit Cristina.

    En tout cas, la présentation est originale, constate Meredith. Et il y a quoi dedans ?

    Des palourdes et des pommes de terre, lui apprit Izzie.

    Meredith repoussa son assiette. Je ne suis pas fan des coquillages. Alors, si quelqu’un veut… George leva le doigt pour montrer qu’il était intéressé. 


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  • Après avoir laissé divaguer son regard sur la baie, Cristina s’adressa à Izzie. Tu as déjà pensé au nom que tu allais donner à ta boutique ?

    Izzie rosit légèrement. Eh bien… en fait, j’ai un nom qui me trotte dans la tête depuis pas mal de temps, confia-t-elle.

    Et c’est quoi ? demanda Cristina, pleine d’impatience.

    Izzie hésita. Je ne sais pas si ça va vous plaire, argumenta-t-elle en triturant sa serviette en papier.

    Meredith l’encouragea. Izzie, je suis sûre que tu as bien choisi.

    Ok, alors j’ai pensé à… Sweet Dream, annonça Izzie d’une voix timide. Sweet à cause des sucreries et dream, parce que cette boutique, c’est mon rêve, expliqua-t-elle.

    Sweet Dream ? répéta Cristina. C’est d’un ridicule !

    Meredith réalisa que ce jugement sans appel peinait Izzie. Moi, je trouve ça très joli. Et en plus, ça a du sens. C’est un très bon choix, Iz. 

    Izzie lui adressa un sourire reconnaissant. Je sais exactement ce que je veux, poursuivit-elle sur un ton plein d’entrain. Une boutique à l’ancienne avec de petites tables rondes recouvertes de jolies nappes à fleurs… Il y aura une terrasse aussi, pour l’été. Et dans les vitrines, des tartes, des gâteaux, des cookies, des muffins, des beignets. Et un coin bonbons avec de grands pots en verre. 

    Cette description enthousiasma Meredith et George. C’est une excellente idée ! C’est super ! Tu pourrais même y mettre tes fameuses sucettes à l’anis que tu réussis si bien.

    Après avoir levé les yeux au ciel, Cristina regarda sa montre. Assez perdu de temps en parlotes ! On a du boulot qui nous attend. Quand ils furent de retour à la boutique, après un passage à la droguerie pour acheter ce dont ils avaient besoin, Cristina ne prit même pas la peine de descendre de voiture. Bon, les enfants, vous savez ce que vous devez faire. Moi je vais faire un tour dans le quartier, histoire de voir qui seront nos concurrents.

    Je crois bien qu’on s’est fait avoir, nota George, une fois qu’elle eut démarré en leur laissant à peine le temps de sortir leurs achats du coffre. Izzie ouvrit la porte du magasin. Après avoir pénétré à l’intérieur, les trois autres se regardèrent avec découragement. Bon, je commence. Cristina est capable de me tuer si elle estime que je n’en ai pas fait assez, dit-il en retroussant ses manches.

    T’inquiète pas, on va t’aider, promit Meredith.

    Ils avaient déjà passé des heures à déblayer et à nettoyer ce qui pouvait l’être lorsqu’Izzie jeta un regard vers l’extérieur. Mais qu’est-ce qu’il fait là, celui là ? Meredith regarda dans la même direction que son amie et aperçut le marchand de journaux qui les observait de l’autre côté de la vitre.

    Hé la petite blonde ! Tu as besoin d’aide ? cria le jeune homme.

    Très digne, Izzie se dirigea vers la porte et la ferma en la claquant. Plutôt crever ! grogna-t-elle entre ses dents.

    C’est une Cristina toute excitée qui refit brusquement son apparition une heure plus tard. Vite, venez, faut que je vous montre quelques chose. Intrigués, ses amis la suivirent sur le trottoir. Regardez là-bas. Elle tendit le bras pour leur désigner un grand bâtiment blanc. Est-ce que vous avez une petite idée de ce que c’est ? Tous trois secouèrent la tête. C’est une clinique ! annonça-t-elle, triomphante.

    Au moins, on sait où aller si on est malade, plaisanta George.

    Cristina lui donna un solide coup sur l’épaule.Tu es vraiment trop con !Cette clinique, ça représente nos futurs clients. Entre le personnel et les visiteurs qui voudront amener des douceurs à leur famille, nous allons faire un tabac ! L’enthousiasme de la jeune femme gagna ses camarades et ils se mirent à danser sur le trottoir. Quand ils rentrèrent dans le magasin, Cristina constata avec satisfaction que la plupart des débris avaient disparu. Vous avez fait du bon boulot, admit-elle. Je ne pensais pas que vous en feriez autant si vite.

    C’est grâce à moi ! clama George en bombant le torse.

    Evidemment, Superman ! se moqua Cristina. Elle sortit du magasin et revint avec un paquet enrubanné qu’elle remit à Izzie. Tiens, c’est pour toi. 

    Izzie la regarda avec un air ébahi. Oh merci ! C’est quoi ?

    Ouvre ! grogna Cristina

    Izzie défit le paquet avec fébrilité. Oh c’est magnifique ! Elle sortit une magnifique plaque faite de fer forgé et d’émail blanc avec "Sweet Dream" calligraphié en rose fuchsia. Emue, Izzie serra son amie dans ses bras. Merci, Cristina.

    Celle-ci, qui n’appréciait guère ces manifestations de tendresse, se dégagea brusquement. Bon… On peut y aller… On a suffisamment bossé aujourd’hui.

    Ils étaient déjà tous à côté de la voiture quand Izzie fit demi-tour. Attendez ! Ils la virent accrocher sa plaque derrière la vitre crasseuse. Elle revint près de ses camarades Voilà ! On peut y aller.

    Alex attendit que la voiture ait disparu pour s’approcher. Sweet Dream, lit-il sur la plaque. C’est quoi, ce machin ?


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  • Le lendemain matin, Cristina déposa Meredith au coin de Marina Boulevard, avec la mission de commencer à nettoyer la boutique, tandis que ses camarades iraient choisir la peinture et le papier-peint. Cependant, Meredith décida de flâner un peu dans les rues avoisinantes avant de s’atteler au ménage. C’était la première fois qu’elle se retrouvait seule dans cette grande ville et l’impression de liberté l’emporta sur sa peur. Elle déambula dans le quartier, prenant une rue à droite, une autre à gauche, au gré de ses envies. Elle arrivait à proximité de Sweet Dream quand une devanture rouge vif attira son attention. Poussée par la curiosité, elle s’arrêta devant le magasin et se sentit mal en découvrant la vitrine. Des tourtes, des pizzas, des paninis, tous plus alléchants les uns que les autres, étaient alignés très joliment sur un fond gris, et à l’arrière-plan, il y avait des gâteaux, de toutes les tailles et de toutes les formes. A travers la vitre, Meredith aperçut aussi, au fond du magasin, de grands bocaux de verre rempli de bonbons multicolores, exactement comme Izzie projetait de le faire. On a de la concurrence, se dit Meredith. Le moral en berne, elle poursuivit son chemin et se retrouva devant la clinique dont avait parlé Cristina. Elle s’arrêta pour regarder le ballet permanent des ambulances et des voitures qui entraient dans le parking et en sortaient. Et que dire des allers et venues du personnel et des visiteurs qui passaient par les imposantes doubles portes battantes ! Toute cette agitation ajoutée à celle qui régnait dans la rue la mit mal à l’aise et elle éprouva l’envie soudaine de se réfugier dans la petite boutique. Elle y arriva en un temps record. Après avoir bataillé pour ouvrir la porte, elle la referma derrière elle et s’y appuya, le cœur battant. Il est temps que je me secoue, se fustigea-t-elle. Au boulot ! Après avoir rempli un seau d’eau savonneuse, elle se mit à genoux et commença à frotter énergiquement. Elle avait déjà récuré la moitié de la pièce lorsqu’un vrombissement de moteur, suivi d’un crissement de pneus, la fit se relever. A travers la vitre crasseuse, elle vit qu’une superbe voiture décapotable noire venait de se garer de l’autre côté de la rue, devant l’échoppe du vendeur de journaux. Mais plus que la voiture, c’est le conducteur qui attira son attention, au moment où il sortit de son bolide pétaradant. D’une belle taille, élancé, des cheveux bruns courts et bouclés, des lunettes de soleil complètement opaques alors que le temps n’était pas particulièrement beau, un jean parfaitement coupé, une veste en cuir noir, tout en lui respirait l’assurance et l’aisance financière. Le genre d’homme qu’on ne risquait pas de croiser à Crestwood. Meredith suivit des yeux l’inconnu qui se dirigeait d’une démarche féline vers l’échoppe de journaux.

    Alex accueillit chaleureusement l’homme, comme il le faisait avec ses meilleurs clients. Hé, Docteur Shepherd ! Alors, prêt à affronter la gloire ?

    Salut, Alex, dit Derek, un sourire quelque peu suffisant sur les lèvres. Quelque chose d’intéressant, ce matin ? 

    Je veux ! s’exclama Alex. On ne parle que de vous dans tous les journaux. Il prit une pile de journaux qu’il avait préparés. Vous et le Docteur Sloan avez les honneurs de la presse nationale. Et je vous ai vus à la télé hier soir. C’est géant, votre truc-là… l’intervention sur les siamoises… Ça m’en a bouché un coin.

    Derek prit un air blasé. Oh ça ! Bah c’est peu de chose… La chance était avec nous, voilà tout. Il feuilleta d’un air faussement distrait les journaux qu’Alex lui avait donnés. 

    Le marchand de journaux prit un air outré, comme s’il n’acceptait pas que le chirurgien diminue ses mérites.Il savait que tous ces gens de la haute aimaient bien être flattés même s’ils voulaient faire croire le contraire. Ben, la chance était avec elles surtout… parce que sans vous, bonjour les monstres ! 

    De là où elle était, Meredith ne distinguait pas vraiment les traits de l’inconnu mais le peu qu’elle voyait lui permettait de penser qu’elle se trouvait en présence du plus bel homme qu’elle avait jamais vu. Elle aurait donné n’importe quoi pour voir de près son visage et surtout, ses yeux, dont on lui avait toujours dit qu’ils étaient le miroir de l’âme ou encore qu’ils étaient liés au cœur. 

    A part ça, quoi d’autre ? continua Derek. 

    Britney Spears continue de se promener le cul nu. Un sacrée garce, celle-là, dit Alex en montrant la couverture d’un tabloïd où l’intimité de la chanteuse était exposée aux yeux de tous. 

    Toujours prête à l’emploi, nota Derek. Si toutes les filles pouvaient être comme elle, notre vie en serait facilitée. Alors, ne sois pas trop dur avec cette fille. 

    Ouais, pas faux… Encore que vous, vous n’avez pas trop de quoi vous plaindre avec les filles, plaisanta Alex. Je les entends, vos infirmières, quand elles viennent acheter leurs magazines. Elles rêvent toutes de vous passer la bague au doigt.

    En attendant, elles devront se contenter de passer dans mon lit, commenta Derek avec cynisme. 

    Alex éclata d’un gros rire gras. Elle est bien bonne, celle-là ! Tiens, en parlant de filles, j’ai un scoop… 

    Derek lui coupa la parole. Tu me raconteras ça une autre fois parce que, là, je n’ai pas le temps… J’ai une intervention dans une heure. Combien je te dois pour tout ça ? s’enquit-il en désignant le tas de quotidiens qu’Alex lui avait remis. 

    6,25 $. Je vous apporterai à la clinique tout ce qui doit encore sortir, promit Alex. Ça me donnera l’occasion de voir vos nouvelles assistantes et de vous faire profiter de mon scoop. Ça va vous intéresser, j’en suis sûr.

    Meredith regarda le bel inconnu qui regagnait sa voiture, ses journaux sous le bras. Elle ne put retenir une petite exclamation de surprise quand elle le vit sauter par-dessus sa portière pour s’installer derrière le volant. Beau mais frimeur ! se dit-elle.La voiture repartit comme elle était arrivée, dans un bruit assourdissant de moteur et un crissement de pneus. La jeune femme quitta la vitre et reprit sa place, à quatre pattes, récurant le sol avec entrain, l’esprit envahi de temps en temps par des images du bel inconnu. 


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  • Alex pénétra dans le hall de la clinique, une pile de magazines sous le bras. Ce n’était pas la première fois qu’il y venait, mais à chacune de ses visites, il était frappé par l’effervescence qui y régnait. Il observa les allers et venues des secrétaires et du personnel soignant, presque exclusivement féminin. Les yeux du jeune homme brillèrent. Ma parole, se dit-il, il faut avoir fait la page centrale de Playboy pour être engagé ici. Il se dirigea vers l’accueil et demanda qu’on lui indique où trouver les Dr Shepherd et Sloan avec qui il avait rendez-vous. Il parcourut le dédale des couloirs en laissant ses yeux vagabonder, ne sachant très vite plus où donner de la tête pour ne rien perdre de la vision quasi féerique qui s’offrait à lui. Mais d’où sortaient donc toutes ces jolies filles ? Il arriva enfin devant le bureau que la réceptionniste lui avait indiqué. Il frappa à la porte et entra après y avoir été invité. Il aperçut les deux chirurgiens penchés sur une revue médicale.

    Mark le salua en premier. Ah Alex ! Qu’est-ce que notre livreur de journaux préféré a pour nous ?

    Alex s’approcha de la table et y déposa les revues qu’il avait apportées. Voilà. C’est tout ce que j’ai trouvé pour le moment. A votre place, je commencerais par l’article du USA Today.

    Derek saisit le journal et commença sa lecture à voix haute. Hier, à San Francisco, les docteurs Derek Shepherd et Mark Sloan, du Golden Health Center, ont changé la vie des petites Amy et Emily Johnson… Mark but chacune de ses paroles jusqu’à ce qu’il entende la fin de l’article. Il est clair que cette intervention hors du commun doit sa réussite au talent du Dr Shepherd qui s’inscrit d’ores et déjà comme le digne héritier de l’éminent Benjamin Carson.

    Et moi ? s’écria Mark. Je compte pour des prunes ?

    C’est qui l’éminent… machin ? demanda Alex.

    C’est un des plus grands, si pas le plus grand neurochirurgien du pays, se rengorgea Derek. Il a été le premier à tenter et à réussir la séparation de jumeaux reliés par la tête.

    Et moi ? insista Mark. Ils ne disent rien sur moi ?

    Derek se replongea dans l’article. Quant au Dr Sloan, sa technique d’extension de la peau est révolutionnaire et lui assure une place de choix dans le Who’s Who de la chirurgie plastique. Aux anges, Mark frappa dans ses mains.

    Ben voilà, vous êtes célèbres maintenant, conclut Alex. Les deux docteurs échangèrent un regard où se mêlaient une extrême satisfaction et une totale incrédulité. Le vendeur de journaux avait raison, en une journée, ils étaient devenus des stars ! Alex, que ce jargon médical avait prodigieusement ennuyé, voulut ramener la conversation à un niveau qu’il maîtrisait. Vous êtes au courant que le voisinage va subir des changements ?

    Non, répondit distraitement Mark en continuant de parcourir la presse. Qu’est-ce qui se passe ?

    Vous savez, la vieille boutique qui est au n° 10 ? Celle qui était abandonnée depuis si longtemps… Pour que sa révélation ait plus d’effet, Alex attendit quelques secondes pour la délivrer. Eh bien, elle est reprise !

    Ah bon ? dit Derek, manifestement peu intéressé par la nouvelle.

    Ouais, elle est reprise par quatre bouseux du Kentucky. Déçu par le peu d’impact qu’avait eu son annonce, Alex décida de frapper un grand coup. Dans la bande, il y a une blonde… Mamma mia !

    Mark leva enfin les yeux. Une blonde ? Quel genre ?

    Un canon ! affirma Alex, ravi d’avoir enfin su éveiller l’intérêt d’un des deux compères. Elle a tout ce qu’il faut là où il faut.

    Ça vaut la peine qu’on se déplace ? demanda Derek.

    Ah ouais ! Vous verriez la paire de nichons ! Et un de ces culs ! Alex dessina dans les airs la silhouette avenante d’Izzie.

    Et les autres ? se renseigna Mark.

    Alex fit une moue. Laissez tomber ! Il y en a une, c’est pas une nana mais une mégère, et l’autre, un thon mal fagoté.

    Et la quatrième ? questionna Mark, excité par la perspective d’avoir un nouveau gibier à chasser.

    C’est un mec, un demeuré qui veut se donner des airs de garde du corps, lui apprit Alex. Mais vous n’avez rien à craindre. Ce n’est pas lui qui vous fera de l’ombre.

    Ah mais c’est une bonne nouvelle, ça ! se réjouit Mark. On va aller voir la blondinette un de ces quatre. Ça nous fera de la distraction. 

    Vous ne serez pas déçus, assura Alex. Et avec votre statut, votre renommée, vous n’aurez aucun mal à conquérir cette paysanne.

    Et quand on lui aura brisé le cœur, tu pourras toujours la consoler, laissa tomber froidement Derek.


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